Algérie

L'écrivain, l'ambassadeur et les autres



Toute une semaine de buzz, de pour ou contre, d'admiration ou de lynchage; il a réussi à extraire un grand lectorat de la léthargie livresque qui ne se secoue que lors d'un salon et encore avec beaucoup de convulsions. On oublie l'instant et ses polémiques. On se souviendra du déraillement et ses avatars. Y a rien à nier dans sa renommée, ni pouvoir lui denier sa brillance cosmique. Son talent graphique est une certitude qui parle à toutes les langues.Lui qui fait des hirondelles, des sirènes, des singes, des loups, tout ce que doit le jour à la nuit comme équation africaine de Kaboul à Bagdad; n'habite pas à Cuba et n'est pas épris uniquement de l'amour d'Elena. Y a un autre amour qui le sangle tel un uniforme.
Les lettres et la patrie. Son récent passage a fonctionné comme une rotative où le vrombissement était un applaudimètre assourdissant et qu'un léger grincement de certains pignons tentait de déranger l'enthousiasme béant.
Quand il y a trop de silence, l'on essaye toujours de créer un bruit qui nous arrange ou un autre silence qui nous captive.
Aucun autre écrivain n'était capable de rassembler autant de lecteurs, que lui, du moins de mémoire. On le critique sur son «ego», sa «suffisance» sur son «parler» que sur ses ?uvres. Le «je», le «moi» et la personnalisation excessive dans la signature de ses exploits, ses gloires, ses prouesses, ses franchissements de frontières ne lui auraient en rien détrôné le mérite qui lui sied au podium. Plusieurs de ses fans disent préférer le lire que de l'écouter. D'autres le voir écrire que de l'entendre parler. Il faut néanmoins connaître la personne, pas l'écrivain loin des conclusions hâtives.
Il est génial quand il est simple individu. L'homme, l'Algérien. En 2012, il m'avait préfacé, à Paris mon livre «Galou, goulna» et depuis je l'ai revu à plusieurs fois... à Paris, Alger, Québec. Sa tournée, que l'on aurait souhaitée plus vaste géographiquement, un peu plus à l'est du pays avait, mieux qu'un meeting électoral, pu réunir tous les âges, toutes les couleurs, presque à l'identique des personnages qui animent les pages de ses livres.
On l'écoutait dire ses visions, ses spasmes, son rêve national qu'il aimait tant voir tout le monde y adhérer. A l'intérieur de chacune de ses histoires, y a une partie de sa maman, une autre de ses déboires et contretemps. Il n'y a pas de héros dans ses ?uvres, il n'y a que des personnes mortelles et communes à l'espèce humaine, sauf qu'il les fait tantôt souffrir dans des drames d'attentat ou jouir l'instant d'un pouvoir de raïs pour une dernière nuit ensanglantée. Ses acteurs naissent très bien sous une plume imbibée toujours des techniques du langage nécessaire à chaque scène. Ses descriptions de lieux tiennent en compte tout ce qu'exige l'orthodoxie onomastique. Le détail est ainsi à percevoir tel un compte-rendu d'une imagerie médicale localisée. Une IRM littéraire. Des différents noms, prénoms ou pseudos qu'il colle à ceux et celles qui tanguent le canevas romanesque; rejaillissent en fait toutes les identités, les humeurs, le courage et la lâcheté. On ne lit pas Yasmina par épisodes, on le poursuit jusqu'à la dernière page. Ses romans ne sont pas des feuilletons, l'on ne guette à bout de souffle que l'intrigue finale. Haletant, il nous tient à la gorge. Il est difficile, une fois ouvert, qu'un de ses livres puisse se fermer sans y aller à sa fin. Subjuguant, attractif; le fil narratif devient tel un goût irrésistible pour un goinfre affamé à n'assouvir qu'à la cessation de cet appétit dévorant. Les émulations qui attisent cependant la diatribe par-ci et par-là doivent se réduire à des vues étriquées ou à des défauts de vue du mérite. Elles restent incarnées chez ceux qui aiment ou haïssent, admirent ou maudissent non pas les personnages qui se créent sous sa verve, mais la gloire de leur auteur. Son déjeuner avec l'ambassadeur de France (ou est le mal ') prenait le goût d'une mauvaise cerise que l'on mettait sur un gâteau déjà gâté, selon certains. De « hizb frenssa » à la « promotion de la francophonie » ; les délires envieux finissaient en dards aiguisés la jolie tournée.
Qui n'aurait pas eu le plaisir de le voir autour d'un thé en compagnie de la ministre de la Culture ou d'un jeune lecteur avide d'un Yasmina Khadra ' Soyons « vertueux ».


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