Algérie

L'économie vénézuélienne, une économie rentière en semi-faillite


Doté de la première réserve mondiale de pétrole (environ 302,25 Mds de barils), le Venezuela est excessivement dépendant des fluctuations du prix du pétrole (qui constitue 96% des exportations). Les matières premières n'ont jamais constitué le facteur décisif du développement, l'exemple le plus frappant étant l'Afrique. Or, la bonne gouvernance et la valorisation du savoir, constituent le pivot d'un développement durable. C'est le paradoxe d'une économie rentière, le Venezuela étant un pays riche en ressources naturelles mais avec une population de plus en plus pauvre, le pays étant au bord de la faillite.L'Algérie, pour ne pas renouveler cette expérience malheureuse, doit méditer la leçon vénézuélienne.
1.-D'une superficie de 912.050 km² avec comme capitale Caracas et des principales villes, Maracaibo, Valencia, Barquisimeto, Maracay, Merida, Ciudad Bolivar avec environ 40 langues autochtones (wayuu, piaroa, pemón, guahibo, etc.), le Venezuela fait partie de la CEPALC (Commission économique pour l'Amérique Latine) et de la MCCA (Marché Commun d'Amérique Centrale). Il est partenaire du MERCOSUR, s'étant retiré de la Communauté andine, qui regroupe plusieurs pays du cône sud, en 2006. Le Venezuela a une population de 32, 401 millions en janvier 2018 dont 93, 4% urbaine et 6,6% rurale avec une densité de 28,5 habitants par km2, une espérance de vie de plus de 72 ans, et un taux d'alphabétisation de 95,5%.
Avec la crise pétrolière, le produit intérieur brut (PIB), en milliards de dollars courants US a été estimé selon le FMI à 242 milliards de dollars en 2015, de 236 en 2016, de 215 en 2017 avec une prévision de 207 en 2018 et 184 en 2018. Les principaux secteurs d'activités dans le PIB : secteur agricole : 3,8 % ; secteur industriel : 45,8 % avec dominance des hydrocarbures (96% des exportations en devises) et le secteur des services : 50,4 % en 2015 qui est passé à 71% en 2017 avec la dominance de la sphère informelle.
Les exportations de produits non pétroliers ne sont que marginales (4 à 5% du total) et sont en diminution constante en valeur et en volume en raison des difficultés croissantes rencontrées par l'appareil productif national. Elles sont dominées par les produits chimiques et minéraux (6070% du total).La dette extérieure du Venezuela est estimée à 150 milliards de dollars. L'économie du Venezuela est intimement liée à sa production pétrolière, qui représente la quasi-totalité des exportations du pays et fournit au pays la première source de recettes en devises.
Or, la production de pétrole a atteint son plus bas niveau depuis 30 ans, à 1,5 million de barils par jour, selon l'Organisation des pays exportateurs de pétrole (Opep). La dette extérieure du Venezuela est estimée à 150 milliards de dollars en 2017..La population souffre de graves pénuries d'aliments et de médicaments, faute d'argent pour les importer. Le pays ne dispose plus que de 9,7 milliards de réserves et devait rembourser au moins 1,47 milliard avant fin 2017, puis 8 milliards en 2018.
Utilisant à fond le financement non conventionnel qui par la suite n'a pas été maitrisé faute de réformes structurelles, cela a entrainé une spirale inflationniste. Avec la chute des recettes d'hydrocarbures qui tiennent la cotation de la monnaie, cette baisse de la production a induit et des dévaluations fréquentes du bolivar fuerte depuis 2013 qui ont entraîné le pays dans l'impasse sur le plan économique.
Annoncés en mars 2016 et implémentés en mai 2017, le système de taux de change multiple du Venezuela a connu des changements la banque centrale cotant que les deux premiers taux.
Les biens qualifiés d'"essentiels" peuvent être achetés au taux moyen officiel, appelé DIPRO , suite à une liste des biens "essentiels" qui peuvent prétendre à ce taux, notamment les importations de nourriture, de médicaments ainsi que certaines opérations d'entreprises pétrolières publiques.
Fin 2017, ce taux était de 9,9875 VEF/USD. Les importations considérées comme non essentielles peuvent être échangées a un taux différent, le DICOM qui est un système d'enchères conçu pour permettre un taux théoriquement variable dans le temps. Courant 2017 le taux moyen de ce système était de 3340,82 VEF/USD. Il existe un troisième taux sur le marché parallèle très fluctuant, fonction du taux d'inflation très élevé ,où l'accès aux dollars américains étant limité au travers des deux systèmes officiels, La valeur du dollar américain sur ce marché noir coté fin 2017 à environ 40000 USD/VEF.
Selon le Fonds monétaire international (FMI), le PIB réel du Venezuela devrait se contracter de 18% en 2018. Cela représenterait un recul de 45% de l'activité économique vénézuélienne par rapport à son niveau de 2013 avec une hyperinflation. L'inflation a explosé, en un an, à 13 779 % (d'avril 2017 à avril 2018) et selon Alejandro Werner, chef du département Hémisphère Ouest au FMI, la croissance des prix à la consommation atteindra 1.000.000% à la fin de l'année 2018, «une situation similaire à l'Allemagne de 1923 et le Zimbabwe de la fin des années 2000».
Dès lors nous assistons à une détérioration du pouvoir d'achat des couches les plus vulnérables et le nivellement par le bas des couches moyennes qui constituent la base du pouvoir. En 2018, près de 90% des habitants vivent ainsi sous le seuil de pauvreté selon l'enquête sur les conditions de vie au Venezuela (Encovi), contre 48% en 2014.
2.- Le constat est que le Venezuela est une économie rentière en semi faillite malgré ses à fortes potentialités. Si le Venezuela a des réserves de pétrole, une des plus importantes du monde, c'est un pétrole lourd et coûteux à extraire. Par ailleurs, son principal marché par le passé étant les Etats Unis d'Amérique, avec la révolution du pétrole et du gaz de schiste, les USA deviennent auto-suffisants et exportent même.
Se disant victime d'une guerre économique, le président du Venezuela Nicolas Maduro, face à l'ampleur de la crise économique, a décidé d'opérer un resserrement de la politique budgétaire, décrétant en janvier 2016 «l'état d'urgence économique» d'une durée de 2 mois renouvelable, d'augmenter le prix de l'essence, une première depuis près de 20 ans (même si le prix reste particulièrement faible).
Il a aussi autorisé une dévaluation très forte de la monnaie, avec plusieurs cotations , dont l'objectif serait de relancer la production locale, mais en réalité d'essayer de combler le déficit budgétaire au prix d'une inflation importée. En effet, selon une étude récente réalisée par BNP Paribas, le gouvernement a mis en place un système de rationnement.
Chaque citoyen ne doit pas acheter plus que sa quote-part et il ne doit pas se rendre plus d'une fois par semaine dans les magasins publics. La banque centrale coordonne la mise à disposition des dollars issus, en grande partie, de la rente pétrolière en appliquant plusieurs taux de change, le plus faible concerne les produits de premières nécessités.
Le gouvernement de Nicolas Maduro accuse les spéculateurs, les entreprises privées et l'opposition de gonfler les prix et d'asphyxier économiquement et par là de déstabiliser le pays, entendu le régime en place. Ne s'attaquant pas aux réformes structurelles, avec des actions conjoncturelles, il décrète l'occupation temporaire de grandes usines et des expropriations, solutions conjoncturelles, qui amplifient les tensions. Les lois économiques étant insensibles aux slogans politiques, le ralentissement de l'investissement privé devrait se poursuivre malgré la probable élimination progressive des restrictions aux importations et aux devises. La méfiance des investisseurs locaux et étrangers face à l'insécurité du cadre juridique devrait encore favoriser les sorties de capitaux du pays.
En résumé, le Vénézuéla, économie rentière souffre avant tout d'une mauvaise gouvernance. L'Algérie doit méditer l'expérience vénézuélienne, surtout avec le recours au financement non conventionnel qui, non maitrisé, conduira inéluctablement à l'inflation à terme, les lois économiques étant insensibles aux slogans politiques. Il faut avoir une vision stratégique avec une quantification précise dans le temps de ce mode de financement et surtout une nette volonté politique de réformer, loin des utopies des années 1970 et ce afin d'éviter un scenario catastrophe vers 2012/2022 avec des incidences politiques sociales et géostratégiques au niveau de la région.
Dr Abderrahmane Mebtoul professeur des universités, expert International
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