Algérie

L'Ecole informelle



L'Ecole informelle
"Il n'est pas facile d'éradiquer le phénomène dans l'immédiat." Ainsi répondait, jeudi dernier, le ministre de l'Education à une question orale d'un député.Baba Ahmed a fini par s'adapter à la logique politique : l'Etat, impuissant à organiser la vie nationale autour d'objectifs institutionnels, s'adapte à l'ordre mercantile que sa stratégie populiste a fini par généraliser à tous les secteurs d'activité. De la même manière que le ministre de l'Intérieur ne demande plus qu'à "encadrer" les gardiens de parkings sauvages et que le ministre du Commerce ne cherche plus qu'à "contrôler" les commerçants informels, le ministre de l'Education se contente, finalement, de rechercher "des solutions progressives et la conjugaison des efforts de toute la communauté éducative dans un souci d'assurer à tous les élèves les mêmes chances de succès et préserver le principe de gratuité de l'enseignement".Or, en tolérant ce phénomène, l'Etat confirme l'échec de son Ecole, sinon son impuissance à contenir une dérive mercantile et anti-pédagogique de la fonction enseignante.Les cours particuliers ne sont plus ce qu'ils étaient : des cours de rattrapage pour les élèves en difficulté ou un luxe pour les enfants de familles aisées. D'une part, les parents d'élèves se sont massivement investis dans le financement des compléments d'enseignement pour leurs enfants, en se saignant pour certains ; d'autre part, les enseignants se sont tout aussi massivement convertis à cette activité d'enseignement parallèle.En s'adaptant aux perversions nées de sa propre politique, le pouvoir s'épargne les bilans de ses catastrophiques fautes. Car au commencement, il y avait, en plus de l'inefficacité pédagogique de l'Ecole algérienne, le déclassement politique de la fonction d'enseignement. Après avoir été réservé aux profils irrecevables pour des emplois dans les sociétés nationales et autres institutions privilégiées de souveraineté, le secteur de l'enseignement a été longtemps maintenu dans un méprisant état de sous-rémunération. Il est tout de même plus conforme à son statut, pour un instituteur, de donner des "cours du soir" que d'aller aider le marchand de lait de son quartier !De dérive en dérive, il est devenu concevable de considérer les cours complémentaires que l'on dispense à ses propres élèves comme composante de son cycle scolaire ! À mille dinars de l'heure par élève, à raison de dix élèves trois heures par jour, cela fait plus qu'un complément de salaire !En novembre dernier, le ministre proclamait qu'il comprenait "qu'un élève aille, de son plein gré, demander à un enseignant de lui assurer des cours particuliers", mais estimait que "l'enseignant (qui) oblige l'élève à venir prendre des cours chez lui, c'est contraire à l'éthique". Aujourd'hui, il dit privilégier la "voie du dialogue" dans le traitement de ce phénomène ! Versant ainsi dans cette espèce de stratégie des "accommodements raisonnables", comme on le dit au Canada, qui font le lit de dérives historiques.Cela a l'avantage de noyer un maximum de citoyens dans l'ambiance nationale de frénétique avidité. De régler les problèmes sociaux en tolérant un système de revenus extra-économiques et extrabudgétaires. Et d'ainsi s'assurer la "stabilité" que garantit un système de prédation généralisée.La qualité du produit des institutions, Ecole comprise, peut attendre.M. H.musthammouche@yahoo.frNomAdresse email




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