Au lendemain de l'indépendance, le gouvernement algérien s'est retrouvé face à des défis que peu de pays ont connu : créer de toutes pièces une administration avec un personnel non- formé et installer un nouvel ordre économique. Le seul choix «possible» fut de copier et de s'inspirer de l'administration coloniale «fortement inspirée par le jacobinisme et les idées de l'Etat omniprésent et régalien». Une administration centralisée, détentrice de tous les pouvoirs a été mise en place en raison du manque flagrant de cadres de haut.Pour combler ce manque d'encadrement, le gouvernement a créé l'Ecole nationale d'administration pour «participer à la vaste entreprise de reconstruction de l'Etat». L'illustre ENA était «une institution de formation supérieure relevant, à l'origine, de la Présidence de la République, l'Ecole s'est vu confier la responsabilité de former ''les futurs cadres de l'administration'' destinés aux services centraux et extérieurs de l'Etat». D'autres institutions ont été créées, toujours sur le modèle français, à l'instar de l'Institut des travaux publics. Cette vision de l'administration n'a pas évolué. C'est toujours le même modèle qui a cours, malgré les évolutions socioéconomiques du pays.Au niveau économique, le socialisme «spécifique» et les différentes révolutions industrielle et agraire ont fait de l'opérateur économique privé et des grands propriétaires des «prédateurs» et des «exploiteurs» et presque des traîtres. Cette position idéologique a fait perdre énormément de temps et d'argent à l'Algérie. En 2011, l'Algérie se retrouve avec une industrie très peu florissante et peu contributive au PIB. Les grands groupes restent publics et le privé est, pour une large part, cantonné dans les services. Pourtant, l'ENA enregistre à son actif, depuis sa création, la formation de près de 6 000 cadres, parmi lesquels un nombre appréciable occupe ou a occupé de hautes fonctions dans les administrations centrales et locales. A cela, il convient d'ajouter les millions de diplômés universitaires formés depuis l'indépendance.Les différentes transformations politiques et sociales n'ont pas permis encore une réelle réforme de l'administration ou économique. Le poids de l'administration centrale est tel, que peu de décisions peuvent se prendre par les élus locaux ou les agents économiques. La création des autorités de régulation ne s'est pas accompagnée par une perte de pouvoir pour les ministres des secteurs concernés, à l'instar des Télécoms ou de l'Eau. Les banques publiques fonctionnent à coups d'orientations de son propriétaire, à savoir que le Trésor et les banques privées se contentent de financer les opérations de commerce extérieur.Les différents mouvements de protestation démontrent que l'évolution sera lente. L'émergence d'une nouvelle élite est, à chaque fois, perturbée par une judicieuse redistribution de la rente, et les Algériens ont perdu, pour beaucoup d'entre eux, le sens de l'effort. Les Algériens connaissent les noms des présidents, des ministres, de certains généraux emblématiques et des walis, mais personne ne connaît réellement qui sont les 5 000 fonctionnaires exerçant les fonctions supérieures ou occupant des postes supérieurs dans la Fonction publique. Pourtant, ce sont ces derniers qui décident ou aident à la prise de décisions. Certains sont aux commandes depuis des années, alors que d'autres sont de retour en leur qualité d'expert alors qu'ils ont pris une retraite dorée. Les échecs sont patents malgré les efforts de formation et les réalisations qui ont coûté des centaines de milliards de dollars.L'économie algérienne est toujours dépendante des hydrocarbures. L'Etat continue à gérer les zones industrielles et les plus grandes entreprises. La création d'entreprises industrielles reste le parent pauvre des différents programmes. Le management public n'aime ni le risque ni l'innovation. Réduire le pouvoir de l'administration reste le chantier à mettre en 'uvre pour terminer les réformes de libéralisation. Mais l'hydre bureaucratique ne lâchera pas une seule miette de son pouvoir, et la corruption ainsi que le copinage continueront à déterminer qui sera un «bon» patron. Il serait temps que ceux qui ont échoué depuis des années pensent à «dégager».
A. E.
Posté Le : 31/10/2011
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Amine Echikr
Source : www.latribune-online.com