En tant que responsable d'un groupe médiatique privé, qu'avez-vous à dire à l'occasion de la Journée nationale de la presse 'Cette journée nationale de la presse décidée par le président de la République est liée à un événement historique qu'est la création du premier journal algérien. C'est aussi un hommage à la corporation qui a accompagné tous les grands moments vécus par notre pays, aussi bien pendant la glorieuse guerre de Libération, qu'après le recouvrement de l'indépendance. La presse nationale a été le témoin privilégié de la décennie noire, durant laquelle la corporation a payé un lourd tribut en défendant l'Etat républicain. C'est effectivement une bonne chose que de consacrer une journée à la presse. C'est un hommage supplémentaire rendu à la corporation.Quelles sont les solutions envisageables pour que la presse puisse dépasser la crise qu'elle subit actuellement 'L'ouverture médiatique au début des années 90 était vécue comme une aventure intellectuelle faite par des professionnels qui se sont lancés dans la création des journaux. Cette expérience, bien qu'elle soit extraordinaire et inédite à l'échelle arabe et africaine, a été rattrapée aussi par les réalités économiques. Les journaux sont aussi des entreprises économiques. L'environnement économique de l'époque n'était pas prêt, notamment en termes de ressources publicitaires. La publicité institutionnelle a permis à plusieurs journaux de vivre. Certains d'entre eux étaient tout simplement des journaux alibis ayant permis à leurs propriétaires de s'enrichir mais les entreprises sont restées pauvres. La multiplication des titres a rendu floue la scène médiatique. La plupart d'entre eux avaient très peu de journalistes, souvent non déclarés à la Sécurité nationale et avec des salaires indécents. Avec la réduction de la pub institutionnelle, beaucoup de titres pour ne pas dire la totalité se sont installés dans la crise. La presse a commencé déjà à subir les effets de l'avènement des chaînes de télévision mais aussi de la presse électronique. Aujourd'hui, les citoyens reçoivent une multitude d'informations en instantané sans devoir attendre le lendemain pour lire les journaux. Aux éditeurs et aux journalistes de revoir leur façon de faire et de s'adapter au mieux à la donne actuelle.Quel bilan faites-vous des réalisations de la presse nationale 'Depuis l'avènement du pluralisme politique et médiatique, il a y eu une avancée en termes de liberté de ton. Les commentaires et les caricatures publiés quotidiennement confirment cet état de fait. L'on s'accorde donc à dire que la presse jouit d'une liberté certaine et qui constitue un acquis indéniable profitable à la société. Néanmoins, les questions de liberté concernent également l'ensemble de la société. On ne peut pas demander à la presse de se substituer aux partis politiques ou à la société civile. Je pense que la presse remplit aujourd'hui pleinement sa mission. Je suis même tenté de dire que c'est la presse qui anime la vie politique nationale en l'absence d'une activité politique faite de débats, notamment contradictoires.Vous en tant que groupe médiatique, vous exercez à la faveur de l'ouverture du champ audiovisuel. Comment évaluez-vous cette entame et quels sont les défis à relever 'Nous et ceux ayant mené cette aventure depuis 2012, avons relevé le défi d'exister en engageant des jeunes journalistes et techniciens. L'autre défi relevé est celui d'avoir réussi à capter le téléspectateur algérien, car jusqu'à l'avènement de ces chaînes, l'opinion algérienne se faisait à travers des chaînes étrangères qui ne sont pas tout le temps favorables à l'Algérie. Depuis l'avènement de ces chaînes, les Algériens s'informent à travers les canaux nationaux. Je pense que c'est un acquis indéniable pour le pays. Maintenant, il reste à relever le défi de la qualité. On sent que d'année en année, des efforts sont consentis en vue d'améliorer les contenus des programmes. D'autant plus qu'avec l'aspect réglementaire qui se met en place, on pourra aller vers plus d'efficacité. Mais à mon humble avis, notre expérience est prometteuse, indépendamment des erreurs commises par nous tous en raison du manque d'expérience et de l'absence d'un cahier des charges auquel tout le monde doit se soumettre. Globalement, le positif l'emporte largement sur le négatif. Aujourd'hui, l'opinion publique n'est plus la cible des chaînes étrangères. On attend maintenant des appels à candidature pour la mise en service de l'autorité de régulation du secteur de l'audiovisuel, instance devant donner plus de visibilité au champ audiovisuel. On saura suite à cela quelles sont les chaînes qui remplissent les conditions requises. A partir de là, on cessera de les considérer comme des chaînes étrangères.Avec l'application justement de ce cahier des charges, beaucoup de chaînes vont disparaître. Comme son nom l'indique, il renferme des conditions d'entrée. Un cahier des charges détermine un certain nombre de conditions que les prétendants doivent remplir. Chacun peut les évaluer à sa façon. On parle de plus d'une cinquantaine de chaînes, mais en réalité, il existe moins d'une dizaine qui ont véritablement investi en moyens humains et matériels et qui offrent aussi des programmes plus ou moins cohérents.Tout le monde reproche à la corporation de ne pas s'organiser. Qu'est-ce qui l'empêche de le faire 'Les gens n'ont pas les mêmes soucis et les mêmes motivations. Il y a des journaux qui avaient, à un certain moment, de bonnes assises. Ils avaient un lectorat et une influence sur l'opinion nationale et considéraient le reste des titres comme des journaux parasitaires qui employaient une autre catégorie de journalistes. Donc, les motivations et les objectifs ne pouvaient être les mêmes pour tout le monde. Alors que la corporation gagnerait à s'organiser.Quel avenir pour la presse publique 'La presse publique a aussi un grand rôle à jouer. Il faudra juste qu'on l'aide à évoluer au rang de presse publique, qui n'est pas à confondre avec la presse gouvernementale. D'autant plus que les titres publics ont les moyens de s'ériger en véritable groupe de presse qui peut concurrencer facilement les meilleurs des titres de la presse privée. La critique n'est pas un désaveu. Les journalistes de la presse publique doivent oser se créer une marge de liberté. Avec les moyens matériels et les compétences qu'ils possèdent, ils pourront aisément renverser la situation. La preuve est quotidiennement donnée par les matinales des radios nationales très écoutées et dont les contenus sont souvent repris par la presse écrite et les chaînes de télévision.Quel est le message que vous adressez aux journalistes à l'occasion de la Journée nationale de la presse 'Je leur présente mes meilleurs v?ux à l'occasion de cette journée. C'est vrai, tout le monde ressent la crise, mais on n'a pas le choix, on doit y faire face. Espérons qu'elle sera passagère.
Posté Le : 22/10/2016
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : K A K
Source : www.horizons-dz.com