Algérie

L'autre drame passé sous silence



Les incendies continuent à ravager des massifs forestiers de Béjaïa et ses environs et restent la préoccupation de l'heure, reléguant au second plan l'autre tueur, celui dont on parle peu en ce moment. Pourtant, il est là, ravissant en silence des vies humaines sans distinction d'âge et de sexe. Lui, c'est le virus de la Covid-19, dans son nouveau variant, le Delta. Un virus virulent, auquel on ne fait plus attention et qu'on favorise même, avec cette attention exceptionnelle accordée à la lutte contre les feux de forêt, tout aussi meurtriers. On fait fi de toute précaution: pas de distanciation sociale dans cette lutte sans merci contre les flammes, favorisant davantage les contacts humains et donc la propagation de ce satané virus.Bien que la majorité des hôpitaux de Béjaïa soit dotée de centres de production d'oxygène, le virus Covid-19, avec son variant Delta, continue à tuer à Béjaïa. Chaque jour que Dieu fait, des villages et des familles sont endeuillés. Des hommes partent à la fleur de l'âge, sans pouvoir dire adieu aux leurs et sans cérémonie d'inhumation. Plus que les flammes, le Delta tue en silence.
Pas besoin de connaître les bilans des services de santé, qui se font rares d'ailleurs, depuis le début de la canicule et des incendies qui ravagent nos contrées. Les annonces de décès sur les réseaux sociaux témoignent, à eux-seuls, d'une hécatombe qui se déroule en silence, dépassée par l'ampleur des incendies de forêt devenus la préoccupation principale.
Avant-hier, c'était le village Ibourayen qui perdait un des siens. Mouloud Tihian, un employé des services météorologiques de l'aéroport Abane Ramdane à Béjaïa, qui quittait les siens, des suites de sa contamination au virus Delta. Il avait 51 ans, laissant derrière lui quatre enfants.
Hier, le village Zioui enterrait l'un des siens en la personne d'Amariout Khellifa, âgé de 51 ans. La commune de Chemini connaissait une série de décès, dûs à la Covid-19, avec la disparition de plusieurs hommes et femmes. La liste est tellement longue.
Du côté des services de la santé publique, on fait état de la saturation des structures hospitalières, due, essentiellement, à la hausse vertigineuse des contaminations au virus.
Le surveillant général chargé des inspections au CHU Khellil Amrane, s'est montré alarmé hier: «Nous recevons de plus en plus de patients contaminés», indique-t-il, déplorant le non-respect des gestes barrières. Hafid Boudraham parle de «l'inefficacité du confinement tel qu'il est organisé actuellement» et préconise «un confinement total de 10 jours au moins, pour briser la chaîne de contamination» et, par ricochet, arrêter cette hécatombe.
Si au niveau des villages de la wilaya, un effort a été fait en sévissant contre l'organisation des fêtes de mariages et autres célébrations de succès au bac, dans les villes, par contre, certains marchés sont toujours en activité et les rassemblements ont lieu sans faire cas de la distanciation sociale. Le masque est souvent mal porté et certains continuent à serrer les mains à chaque retrouvaille, lorsque ce n'est pas carrément des embrassades.
C'est dire le relâchement préjudiciable avec lequel beaucoup s'accommodent comme si de rien n'était où, par la force des choses, avec les rassemblements autour des foyers d'incendies et la lutte collective contre les flammes, on se rend peu compte des dégâts.
Hier, cinq feux étaient encore en activité: à Adekar, Boukhlifa, Toudja, Kendira, avec deux importants incendies, mais la situation s'apaise quelque peu, indique la Protection civile de Béjaïa. Cela ne devrait pas, pour autant, faire oublier l'autre tueur mondial. La prudence est de mise.


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