«Les nations ne
se font que par l'éthique: si celle-ci s'en va, elles s'en iront à leur tour» Ahmed
Chawqi.
Il est de ces
comportements qui laissent l'individu perplexe. L'indiscipline, ne peut être
que le propre de peuplades non dégrossies. On se lève comme on veut, on
travaille quand on peut et on refuse tout ce qui est organisé. Le végétatif,
l'emporte sur le solidairement utile. Il nous suffit de lever la tête au ciel
pour nous rendre compte que, même un vol d'oiseaux migrateurs, est préfiguré
par une forme géométrique. Toujours en triangle, donc planifié, le sommet en
est la tête dirigeante. On présage déjà du but à atteindre. Autant les règles
élémentaires de la vie islamique sont déflorées, autant les règles de civilité
occidentale sont violentées, on vogue sans repères décelables. Plus la
grossièreté est savamment inconvenante, plus on en tire une indicible fierté.
On s'invite sans vergogne, on s'incruste et on tient le crachoir pour
déblatérer des heures durant. Le mépris affiché vis-à-vis d'autrui, la démesure
des jugements arrêtés et l'incontinence verbale trouvent malheureusement
preneurs, par l'écoute et la soumission aux nouveaux prophètes. Ces
prédicateurs autoproclamés, s'érigeant en passage obligé, terrorisent par le
verbe, quitte à user de simulacre. La discipline, maître mot de toute vie
communautaire, part en lambeaux sous la poussée d'une notabilité surfaite. On
n'imagine pas de grands imams, tels El Karadaoui ou El Bouti, faire irruption
dans une modeste mosquée, dont les fidèles sont silencieusement alignés
derrière un imam de troisième zone, pour le supplanter ou critiquer son prêche.
Dans nos murs, tout, est malheureusement permis. L'usage coutumier et la
bienséance sont allégrement piétinés par une caste qui se dit être
intellectuelle. Il suffit que l'on ne soit pas programmé au podium pour ériger
dans un coin, un auditorium parallèle aussi dérangeant qu'un essaim de taons
vombrissant. Et pourtant, on le fait rarement avec les extra-muros ; dans ce
cas précis, on fait curieusement allégeance, on dompte ses mÅ“urs barbares, pour
apparaître sous son meilleur jour.
L'hypocrisie, mène des multitudes par le bout
du nez. Le travail rebute, les plaisirs de la table réunissent en moins de
temps qu'il n'en faut, pour l'invite. Les règles sont aussi malmenées que le
morceau de viande dégoulinant de sauce ou le potage aspiré bruyamment. A peine
attablé, sans parfois y être convié, on se met à l'Å“uvre sans égard pour le
service. Quand certains sont à peine à l'entrée, d'autres, sont déjà à la crème
dessert ou à la pastèque rougeoyante. On se précipite sur la victuaille sans
attendre le geste discret, du maître de séant. Il n'est tenu compte d'aucune
hiérarchie sociale. On est là pour la bouffe, on bouffe pour, en fin de compte,
éructer d'aise. On a vu des étudiants s'attabler avant le maître, des agents
subalternes avant le ministre, des infirmiers avant le prof et vogue la galère
! A la poste, on feint de regarder ailleurs, pour ne pas céder sa place à une
dame ou à une personne âgée, souvent impotente. Que dire encore de ces enfants
gâtés qui font faire les pires entourloupettes à leur ascendance, pour
satisfaire à leur gâterie morbide. Le rappel des rudiments de convenance, n'est
pas toléré ; il en coûtera à celui qui tente de corriger par une simple
remarque. On devient, l'ennemi juré. La sonnerie incongrue des téléphones
mobiles en tout lieu et en tout moment, est cette plaie de la modernité non
domestiquée par une semi ruralité ou une semi urbanité, c'est selon l'angle
d'observation. Le plus effarant, ce sont ses entretiens prolongés qui peuvent
émailler le cours d'une conférence ou d'un recueillement mortuaire. Gare à
celui qui contrevient, par une indisposition ou un regard appuyé, à ces
errements inopportuns et déplacés. On ne s'en excuse même pas. Normal ! La
déontologie professionnelle, quant à elle, est à deux vitesses. Elle est
bassement instrumentalisée quand des intérêts purement mercantiles sont en jeu.
Elle devient curieusement muette quand il s'agit de prévenir, ou de réparer des
préjudices moraux ou physiques. Il est des cercles, où la vie personnelle de
tiers est éhontément déballée. On parlera volontiers de choses intimes qu'il a
été donné, de glaner à travers la rumeur, et d'en affirmer la véracité.
L'ordonnance médicale d'un praticien présentée par le patient, à l'autre
confrère, le fera passer à la moulinette pour délit d'incompétence. La
plaidoirie d'un avocat, subira un sort funeste de la part du confrère et sans
état d'âme. La réserve et la retenue morale n'ont aucune signification, dès
lors que tous les coups tordus sont permis, dans ce qui peut être apparenté à
une savane. Quoiqu'encore, la hiérarchie socio- zoologique, sous ces latitudes,
est instinctivement respectée.
On s'évertue à casser tout ce que l'autre
tente d'ériger, au risque de tout reprendre. Le podium, ne disposera que d'une
seule et unique place, tout le monde y postulera, quitte à le faire lamentablement
choir avec fracas. La cohabitation est mal vécue, on rejette volontiers sur
l'autre, les nuisances que l'on produit soi même. Faut-il encore, rapporter la
décrépitude sociétale au régime politique et à la mauvaise gouvernance ? N'y
aurait pas une voie de salut pour sauver ce qui peut l'être encore ? Ou faut-il
espérer une révolution coloriée pour on ne sait qu'elle aventure ? Des
Levantins, venus de très loin, nous donnent à chaque jour que Dieu fait, des
leçons d'organisation, de savoir vivre et de savoir faire ; mais ceci, ne
semble nullement imprégner les esprits pour bousculer les us archaïquement
établis et revanchards. Faut-il reprendre le chemin de l'école préparatoire
pour la révision des préceptes de l'éducation civique ou l'initiation aux leçons
de choses ? On ne peut continuer à fermer l'Å“il sur des comportements, certes
individuels et isolés, mais qui portent atteinte à la communauté dans son
intégralité. Le meilleur exemple à donner dans le registre de l'inconséquence,
est celui du Hadj. S'il y a bien des exemples d'indiscipline caractérisée à
soumettre à examen, c'est bien celui de la colonie nationale en pèlerinage. La
fronde, dégénérant parfois en des affrontements véhéments, à la limite des
voies de faits, est fréquemment observée. On vilipende pour une clayette de
pommes ou une corbeille de brioches. On se bouscule à la montée d'un bus
immensément vide ou d'un avion dont les places sont arithmétiquement réservées.
On se donne en spectacle aux autres nations qu'on compte volontiers, comme
moins développées que la nôtre. A vouloir manifester sa rancÅ“ur envers la
désorganisation, à laquelle chacun y participe, on ne se gêne pas pour donner
la plus mauvaise image de son propre peuple. L'ego, dévastateur dans le
contexte, fait fi de toute considération, fut elle pour la dignité nationale.
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Posté Le : 10/06/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Farouk Zahi
Source : www.lequotidien-oran.com