Algérie

L'aumône officielle



La solidarité nationale, voilà une idée qui renvoie à des pratiques traditionnelles ancrées dans la société algérienne du temps où les moyens étaient insuffisants pour subvenir aux besoins des familles. La solidarité renvoie à des obligations religieuses d'abord, culturelles ensuite, humaines enfin puisqu'elle ne saurait se limiter aux seules frontières d'un pays. Concepts aussi nobles qu'utopiques si l'on s'en tient à ce qu'ils ont produit comme programmes contenus dans ce qu'il convient d'appeler « le solidarisme ». Chez nous, la solidarité a été emprisonnée dans des attitudes propagandistes, humiliantes et budgétivores. C'est ce qui a donné lieu à un ministère sur mesure, celui de la Solidarité nationale. Un signe de l'appauvrissement d'un peuple qui ne comprend plus où va l'argent de ses richesses, si ce n'est à bannir définitivement cette distribution en direct de différents produits. On apprend que le ministère en question va distribuer 500.000 trousseaux scolaires au profit d'enfants issus de familles démunies, n'ayant aucune possibilité de poursuivre normalement leurs études sans être assistés par l'Etat. Est-ce suffisant et n'y a-t-il que 500.000 enfants dans ce cas ? Certes non, si l'on ajoute à ce chiffre les familles qui ont un revenu insuffisant pour vivre dans la dignité. Juste pour manger d'abord. Le drame, c'est que les représentants de l'Etat pensent bien faire, alors que les questions fondamentales demeurent celles liées à la création d'emplois et à la revalorisation des salaires à un niveau acceptable, au lieu de dépenser la rente pétrolière en prestige. Qui croit encore au prestige du pays lorsque les chaînes interminables devant les ambassades nous rappellent à l'ordre, lorsque des jeunes à la fleur de l'âge préfèrent se jeter à la mer plutôt que d'assister, immobiles, à leur échec ? Un suicide collectif qui dira sûrement son nom un jour. Un jour. Le Ramadhan est proche et déjà une autre action est en voie de préparation: distribuer des couffins remplis de plats préparés ou de produits de base à des chaînes de femmes et d'hommes surpris en pleine aisance du pays à mendier. Malédiction ou cécité des adeptes d'un ordre incohérent fait pour quelques-uns qui n'ont eu d'autre choix que de garder le pays sans clôture ? Où est donc passée cette dignité qui a gangrené les discours et caché une réalité qui se fait à notre insu ? Pendant ce temps, la mendicité prend des formes de plus en plus changeantes. Et ce n'est pas un ministère de la Solidarité qui en diminuera les effets. Il n'y a qu'à s'asseoir à la terrasse d'un café pour s'en rendre compte, maintenant que l'aumône s'est officialisée.


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