Algérie

L'auberge espagnole



La rupture du contrat entre Sonatrach et Repsol et Gas Natural est-elle politique ? Même si entre les officiels algériens et espagnols on a tendance à calmer le jeu, « l'affaire » est devenue en Espagne un enjeu d'empoignade politique intérieure. L'affaire sera en effet examinée mercredi au parlement avec des questions au gouvernement qui seront formulées par le Parti populaire et Convergence et Union (CiU). Les deux groupes parlementaires ont demandé au ministre de l'Industrie Joan Clos de venir s'expliquer sur l'activité de son département dans cette affaire. Il va de soi qu'il s'agit moins de s'informer que de saisir l'opportunité de pourfendre le gouvernement Zapatero. Même si un député du CiU, Josep Sánchez Llibre, veut des explications sur « le grave préjudice provoqué par l'Algérie aux politiques énergétiques espagnoles », c'est bien d'une dispute politique intérieure qu'il s'agit. D'ailleurs, on ne semble pas attendre les réponses, le procès est déjà fait par les partis d'opposition et dans les médias: politique extérieure « désastreuse », incapacité de l'équipe au pouvoir de défendre le peu de multinationales espagnoles à l'étranger... Une des réactions les moins dures consiste à considérer comme « malheureuses » les déclarations de Miguel Angel Moratinos sur le fait qu'il s'agissait « d'un problème entre des entreprises ». En réalité, c'est une occasion de tomber à bras raccourcis contre un gouvernement « incapable de défendre » les intérêts espagnols, non seulement en Algérie mais aussi en Bolivie, en Argentine et au Venezuela. Ceux qui n'ont pas admis le « virage pro-marocain » du gouvernement sur la question du Sahara Occidental, comme le Parti populaire, présentent l'affaire de Gassi-Touil comme étant la facture à payer de l'abandon du Plan Baker. Certains dénoncent la naïveté politique du gouvernement face au jeu du voisin français, d'autres voient dans Electricidade du Portugal un « cheval de Troie » de Sonatrach pour s'emparer du marché espagnol. Cela va dans tous les sens. C'est, sans jeu de mots, l'auberge espagnole. Et, indéniablement, c'est une manifestation concrète d'une démocratie où les acteurs ont le pouvoir de demander à un gouvernement de rendre des comptes sur sa manière de conduire les affaires du pays. Il faudra évidemment beaucoup de sang-froid à celui de M. Zapatero pour maintenir une ligne de conduite consistant à admettre qu'il s'agit d'un contentieux entre entreprises, mais qu'il mettra ses ressources politiques dans la recherche d'une solution. Car, de multiples manières, y compris dans le dessein de la piéger, le gouvernement espagnol est incité à entrer dans une confrontation politique avec l'Algérie. Tout le monde y perdrait, les entreprises espagnoles autant que Sonatrach, sinon davantage, alors que le litige est soumis de part et d'autre à l'arbitrage international.


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