Algérie

L'aubaine des "bazaristes"



De plus en plus de «barbus» ouvrent des bazars en n'omettant pas de les baptiser «La Saoudienne». «Abou Fayçal», «Abou Zakaria», «Abou Ishak...»Les enfants et les jeunes filles sont les catégories les plus ciblées par les commerçants.
Alors que les budgets familiaux s'effritent en ce mois de Ramadhan, pointe à l'horizon une grosse dépense qui mettra les portefeuilles à rude épreuve. Même la bonne initiative des ministères du Commerce, de l'Agriculture, de la Solidarité... d'assister le citoyen en intervenant directement dans le circuit commercial pour réduire les prix n'aura pas suffi. La majorité des personnes questionnées pense que certaines habitudes doivent désormais disparaître. «Nous accumulons dépenses sur dépenses. A la rentrée scolaire on met le paquet pour les habits et les affaires scolaires. Le temps de rééquilibrer la situation, arrive le Ramadhan qui, malheureusement, coïncide avec la période des grandes vacances d'été. Le mois terminé, c'est l'Aïd el Fitr, puis les fêtes, les noces et les cérémonies des reçus aux examens, la rentrée succède à cette période où les caisses sont remises à zéro. L'Aïd el Adha reste aussi une occasion pour tarir la source avec la fête du sacrifice du mouton et les habits pour les enfants. C'est le coup fatal aux bourses moyennes.»
La grande tente et les foires
Ces habitudes et rites ne sont pas propres à Bouira mais concernent toute l'Algérie. Un fait caractérise, néanmoins la wilaya de Bouira, et plus précisément son chef-lieu de wilaya. Habituellement, une foire s'organise une à deux fois par an. Le parking du stade olympique Rabah-Bitat, lui, reçoit une foire par mois. Une grande tente et des chapiteaux proposent toute la production chinoise contrefaite. Le lieu est la destination privilégiée des femmes surtout. Cette tente immense vient d'être reposée à Aïn Lahdjar, une dizaine de kilomètres à l'ouest du chef-lieu. Elle reviendra à Bouira dans les prochains jours. Dans le même ordre d'idées et suite à la «guerre» sans merci menée par les policiers contre les étals anarchiques et le commerce informel, un stade de proximité vient d'être affecté aux marchands ambulants. La décision a mis dans leurs états les riverains de la cité des 120 Logements et la cité des 130 Logements. En cédant l'espace au commerce, toute la périphérie verra les scènes des années passées revenir. Pour rappel et tout au long du mois de Ramadhan, les pouvoirs publics ont milité contre l'informel, mais tant qu'on ne touchera pas le haut de la pyramide, rien ne changera. A l'approche des fêtes de l'Aïd, ce mode commercial illicite revient au galop. Les trottoirs sont squattés par des jeunes qui vendent des tees-hirts, des ballerines, des habits pour enfants. Ils arrivent juste après le ftour, déposent leurs marchandises sur des cartons et vendent à la criée. Les clientes, surtout des femmes sorties respirer un peu d'air frais «tombent» sous le charme des prix souvent réduits comparativement à ceux des magasins. Contrairement aux années passées, les services de sécurité ont sensiblement réduit cette activité en veillant à ce que personne ne squatte les trottoirs. Les commerçants doivent s'installer dans des lieux réservés à cet effet.
Les bazars et la jet-set locale
De plus en plus de «barbus» ouvrent des bazars en n'omettant pas de les baptiser «La Saoudienne». «Abou Fayçal», «Abou Zakaria», «Abou Isaak...» sont les dénominations données à des magasins superbement aménagés, dotés de la climatisation et proposant des articles divers. Les enfants et les nourrissons, les futures mariées ont les honneurs puisque des stands entiers leur sont réservés. La situation en Tunisie, pays de transit des palettes embarquées à Marseille et dans les ports européens, a sensiblement réduit l'activité de la filière. Ces magasins, qui par le passé étaient la destination des moins aisés, mais aussi des nantis se sont réduits. Seuls quelques-uns continuent à se spécialiser dans le soulier sportif. L'apparition de ces commerces à la faveur de la loi sur le terrorisme laisse penser que ce créneau serait peut-être celui du blanchiment de l'argent racketté pendant la décennie noire. Pour les prix, les habits pour enfants et nourrissons sont les plus élevés. Les commerçants savent que les parents admettent facilement les caprices de leurs progénitures. En marge de cette vague de bazars, s'ouvrent aussi des magasins spécialisés dans le vêtement de luxe. Deux catégories sont ciblées. Les jeunes et les richissimes affairistes. Là les prix défient tout entendement. Les devantures sont décorées à l'européenne et des enseignes style Givanchy, Griffa, Schoes... des marques étrangères orthographiées n'importe comment et dans un anglais ou français hachés. La casquette à 3000 DA, la paire de training à 35000 DA le survêtement à l'effigie du PSG à 18000 DA... n'est-ce pas cela qui pousserait les jeunes au vol et au trafic de drogue' Pour se vêtir et plaire à la voisine il a besoin d'au moins 70 000 DA sans compter le coût du portable. Voilà une piste à exploiter si on est déterminé à rétablir les valeurs dans ce pays. Par le passé, à Bouira, tout le monde savait que des familles étaient spécialisées dans le soulier, d'autres dans l'habillement, d'autres encore dans l'alimentation... le vêtement par le passé était l'apanage des Mozabites. Ils sont loin ces temps-là. Le grand pas en avant fait quand on était au bord du précipice (pardon pour le plagiat) donne ses fruits. Les quelques sous qui resteront serviront aux cadeaux dans les fêtes et noces des membres de la famille et l'Aïd de cette année aura un goût d'inachevé pour les enfants qui n'auront pas des habits neufs en raison de la dégradation du pouvoir d'achat.


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