Algérie

L'assaut final Point Net


On ne l'a pas beaucoup vue ni entendue, mais la campagne, c'est fini depuis hier. Ou ce matin. Il a sans doute fait trop noir et froid pour que les partis la poursuivent jusqu'à minuit comme le permet la loi, mais la loi est la loi. Personne n'en a vraiment tenu compte, certains en ont même ri jusqu'aux oreilles mais elle était là, la loi.
Personne n'a cherché à savoir d'où vient le «blé» dépensé et combien de blé a été dépensé par chacun. Personne n'a empêché des candidats dont les démêlés avec la justice sont encore tout frais mais la loi ne sert pas à ça : elle sert à convaincre que les élections, c'est sérieux et crédible. Personne ne s'est soucié que des soldats rémunérés au rabais ont défiguré des milliers de murs d'enceinte avec de la peinture noire, ni que de pauvres hères payés au sandwich soient allés remplir des salles de meetings ou tenter la provocation pour en vider d'autres.
Depuis hier à minuit ou ce matin à zéro heure, on ne peut plus rien voir de tout ça. Comme si on avait respecté la loi pendant vingt et un jours, on arrête tout pour en faire une chose sacrée pendant les trois jours qui restent avant le scrutin. C'est sacré, les apparences, la loi beaucoup moins. Pendant trois semaines, on a fait semblant de faire campagne et de convaincre les électeurs dans le respect des «dispositions réglementaires».
Alors on a collé ses affiches sur tous les tableaux alors qu'on n'a le droit qu'à un seul par «site». On a affiché sur les... affiches des concurrents alors que c'est de la... concurrence déloyale ! On sait qu'on a reçu plus d'argent qu'on l'avouera pour la campagne mais ce n'est pas grave, puisqu'on n'utilisera pas tout ce qu'on a reçu pour... la campagne ! Déjà qu'on en a reçu de ceux qui sont censés en recevoir, de ceux qui ne sont pas censés en donner et de ceux qui sont plus censés recevoir que donner !
La campagne, c'est fini depuis hier à minuit, à moins que ce ne soit ce matin à zéro heure. On n'a pas eu de programme mais on a quand même expliqué qu'on en avait un, le discours est décousu mais les stratagèmes cousus de toutes pièces. On dit tous la même chose mais on fait semblant de s'opposer. On appelle à la sérénité le glaive entre les dents et on s'unit dans le déchirement. On se salue par des flèches empoisonnées et on se marche sur le corps pour mettre le pied sur le marchepied.
Il paraît que c'est de la politique et dans une «campagne électorale», c'est de bonne guerre. Il n'y a ni guerre ni paix mais il y a des ennemis, faute d'adversaires. Il en faut quand on fait de la politique, surtout quand on va aux élections et qu'on fait campagne. Il faut respecter l'adversaire mais il y a un sérieux problème, il n'y en a pas. Pour respecter l'adversaire, il faut lui opposer des idées et il faut en avoir. On n'a pas de projet, alors on jette des pierres. Il n'y a pas de programme, on surenchérit dans les promesses.
On n'est pas habitué à être élu pour se soucier des électeurs. Mais on fera semblant, c'est le plus important. Bien faire semblant. En criant au mensonge par le mensonge et au loup alors qu'on est hyène. Il reste trois jours pour mettre les derniers réglages sur papier à musique.
La danse peut commencer. On se congratule sans savoir pour quelle victoire et on se retire dans de ténébreuses chaumières pour l'assaut final. Elle a été vraiment belle, la campagne. Que du bonheur. Ceux qui vont voter jeudi savent pour qui voter. Les 60% qui restent poseront la question au ministre de l'Intérieur. Mais ce sera trop tard, la prochaine fois qu'il parlera, c'est pour annoncer les résultats.
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