Algérie

L'assainissement face au mur de l'administration



Une situation de blocage dénoncée par l'APW qui avait mis en place, en février dernier, une commission d'enquête et de suivi de cette opération.La création de nouvelles zones industrielles et l'assainissement du foncier déjà existant, comme promis par les pouvoirs publics à Tizi Ouzou depuis de longues années, continuent, aujourd'hui encore, de traîner en longueur.
Si, en effet, aucune des nouvelles zones annoncées tambour battant n'a connu un début de concrétisation, la récupération du foncier, déjà attribué à de potentiels investisseurs, mais jamais utilisés, et la viabilisation des anciennes zones d'activité avancent plutôt à pas de tortue. La wilaya de Tizi Ouzou, qui comptait il y a quelques années, 16 zones d'activité et une zone industrielle, qui totalisent 351 ha, 92 ha, répartis en 1 231 lots, s'est vue attribuer, durant cette dernière décennie, deux nouvelles zones d'activité dans les communes de Timizart et de Fréha, et trois zones industrielles, à Draâ El-Mizan, Tizi Gheniff et Souamâa. À l'annonce de l'attribution de ces zones, qui devaient renforcer le parc du foncier industriel de la wilaya d'environ 400 ha supplémentaires et, par conséquent, booster l'investissement, d'aucuns ont applaudi la décision. Sauf que, jusque-là, ces zones n'existent que sur papier rangé dans les tiroirs de l'administration.
Concernant la récupération du foncier industriel affecté à de potentiels investisseurs qui ont fini, pour un bon nombre d'entre eux, par le détourner à d'autres fins ou le sous-louer à de vrais investisseurs, les derniers chiffres officiels rendus publics en 2018 font état de la récupération de 125 lots qui ont été aussitôt affectés à de nouveaux porteurs de projets. D'autres, et ils sont nombreux, font toujours l'objet de contentieux, et ce, au moment où 44% des porteurs de projets à travers la wilaya n'ont pas pu concrétiser leurs investissements faute de foncier industriel, chiffres révélés fin 2018 par l'ex-wali de Tizi Ouzou.
Une situation de blocage dénoncée par l'APW de Tizi Ouzou qui a décidé, en février dernier, la mise en place d'une commission d'enquête et de suivi de l'opération d'assainissement du foncier industriel dans la wilaya. À ce propos, le président de la commission investissement et développement à l'APW, Hamid Hamoudi, a tenu à tirer la sonnette d'alarme quant au devenir de toutes ces zones qui, déplore-t-il, "voient le jour, par décret, mais ne bénéficient d'aucun suivi de la part de l'administration compétente". "Nous avons des zones créées depuis plus de 30 ans et qui souffrent d'un manque de viabilisation adéquate qui permettra aux investisseurs de matérialiser leurs projets, d'où un certain nombre d'investisseurs n'ayant pas pu réaliser leurs projets", a-t-il dénoncé, précisant que "même les zones nouvellement créées sont délaissées". À titre d'exemple, notre interlocuteur cite la zone industrielle d'Azazga qui n'a bénéficié d'aucun aménagement. "Cette ancienne zone est en jachère. Elle n'a ni route, ni gaz, ni eau, ni électricité. C'est pourquoi nous avons demandé une cagnotte au ministère de tutelle pour pouvoir mettre à niveau les zones déjà existantes et une autre cagnotte spéciale pour la viabilisation des nouvelles zones", a expliqué M. Hamoudi, tout en précisant que "les deux nouvelles zones d'activité de Draâ El-Mizan et de Tizi Gheniff, qui totalisent une superficie de 43 ha, ont, quant à elles, bénéficié de plus de 150 milliards de centimes pour leur viabilisation, mais attendent toujours le début des travaux".
"La bureaucratie bloque l'investissement"
Interrogé sur les retards observés dans la prise en charge de la réhabilitation et de la viabilisation de ces zones industrielles, notre interlocuteur estime : "Officiellement, l'administration justifie le retard par les oppositions de citoyens, mais, à notre sens, l'élément qui produit ce retard est la bureaucratie qui règne dans cette même administration. On ne gère pas l'investissement, qui est l'élément central du développement, depuis les bureaux et d'une manière bureaucratique. Nous avons tout simplement demandé de démocratiser le processus d'investissement. Par exemple, l'administration ne peut pas continuer à exiger des investisseurs une montagne de papiers pour matérialiser un projet." Et d'insister : "Aussi, l'élément bloquant de l'investissement est la bureaucratie de l'administration centrale qui ne fait que refléter les incidences de tout le système politique."
Le Calpiref toujours pas réactivé
Selon les indications de ce représentant de l'APW, la non-réactivation du Comité d'assistance à la localisation et à la promotion des investissements et de la régulation du foncier (Calpiref) est un autre élément du blocage. "Suspendu depuis 2016, le Calpiref a été relancé dans le cadre de la loi de finances de 2020, mais, dans notre wilaya, aucune réunion de ce comité n'a été tenue à ce jour. D'ailleurs, faute d'application de cet article relançant le Calpiref, plus de 800 dossiers attendent toujours leur traitement", a révélé le président de la commission d'investissement non sans dénoncer également ce qu'il qualifie d'"attributions hâtives du foncier industriel". À ce sujet, il a relevé qu'"il y a des personnes qui ont présenté des dossiers et reçu des actes de concession, mais n'ont pas pu réaliser leurs projets depuis les années 90". "Face à ces pratiques, en 2016, l'APW a voté une délibération, reprise par la nouvelle assemblée, portant assainissement du foncier industriel. Celui qui veut travailler n'a qu'à réaliser son projet ou céder sa place à un autre investisseur", a-t-il plaidé.
Relancer la dynamique industrielle
De l'avis de notre interlocuteur, relancer l'industrie passe systématiquement par l'assainissement du foncier industriel. "L'esprit de notre démarche est d'assainir le foncier dans notre wilaya pour pouvoir relancer la dynamique du développement à travers l'investissement", estime-t-il rappelant, dans ce sillage, que "l'APW a installé une commission pour suivre le processus d'assainissement de ces assiettes, afin de pouvoir constituer un portefeuille pour les industriels qui attendent un terrain". "Il y a des unités industrielles actuellement actives et qui sont en sous-location à l'intérieur même des zones d'activité. Ces entreprises ont loué auprès de ceux qui ont bénéficié d'un terrain et qui ne l'ont pas exploité, cela est insensé et inadmissible", a encore dénoncé M. Hamoudi, soulignant que la commission qu'il préside est en train d'établir un état des lieux détaillé pour voir le nombre d'assiettes dégagées pour l'investissement, combien d'investissements ont été réalisés, le nombre d'assiettes restées libres, ainsi que les assiettes attribuées qui n'ont pas été exploitées.
Contactée pour avoir sa version sur ce dossier sensible qu'est le foncier industriel, le directeur de l'industrie de Tizi Ouzou, que nous avons rencontré, nous a expliqué qu'il ne peut faire de déclaration sans passer par le cabinet du wali, cabinet que nous avons sollicité. En vain.
K. Tighilt


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