Après Cherif Kheddam et tout récemment Mohamed Benhanafi, la Kabylie pleure la disparition, jeudi matin, de cette autre icône de la culture amazighe, Mehenni Amroun à l'âge de 74 ans.
Benhanafi disait de lui peu avant sa mort : «Votre région recèle un artiste émérite, préservez- le car comme lui il n'y en a pas deux en Algérie.» Mehenni Amroun, auteur-compositeur, interprète et comédien, avait voué toute sa vie à la culture. Homme de radio qu'il a rejointe en 1963 sous la direction de Mohamed Hilmi, après un parcours militant au sein de la fédération du FLN en France, le défunt avait fait les beaux jours de la Chaîne II avec ses mémorables sketches et son émission culte Laayouv Nedunith (Les travers de la vie), où il scannait la société algérienne. Artiste polyvalent, c'était cependant au théâtre radiophonique qu'il avait excellé dans des rôles mélodramatiques. «Ecarwegh »(«J'ai frémi»), s'était ému, devant son jeu de scène en 1980, Mouloud Mammeri, invité à l'avant-première de l'adaptation théâtrale de son roman La Colline oubliée, où Mehenni avait admirablement campé le rôle de Mokrane. Sa chanson Jedjiga, Tahjedjigth Guiress (duo avec Nouara en 1971), une sorte de mélange de rap mêlant complaintes du cœur et hymne à la vie, connut la consécration. Elle fut la première chanson kabyle dont le clip le montrant pousser Nouara en balançoire fut repris en Eurovision. D'abord conçue comme générique d'émission, la chanson fut jouée avec une guitare à deux fils et une vieille chaise en guise de percussion. Son nom est aussi intimement associé au combat pour la réappropriation de la culture berbère. Avec ses amis de la radio, il participa à l'éveil identitaire dans les universités algéroises. Sa chanson outrageusement engagée pour l'époque Jedik (Tes Ancêtres), lui avait valu bien des déboires avec les services. Tout comme cette audace d'avoir chanté au Majestic en 1968 un brûlot de Slimane Azem, en pleine inquisition identitaire. Son compagnon Kechi Lounès, qui l'avait côtoyé durant 42 ans à la radio, n'a pas trouvé les mots pour restituer la dimension de cet artiste, dont la modestie et la simplicité n'ont pas contribué à une aura ô combien méritée. Il aimait tamazight et il a eu son printemps comme sépulture. Les milliers de personnes qui l'ont accompagné vendredi à sa dernière demeure, dont de nombreuses figures connues de la culture, ne l'oublieront jamais.
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Posté Le : 21/04/2012
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Salem Hammoum
Source : www.lesoirdalgerie.com