Algérie

L?art et la manière


Il est devenu un lieu commun de dire que l?Algérie est un immense chantier dont la mise en ?uvre génère des enjeux de développement colossaux. Mais il s?agit en fait d?une vérité indéniable fondée sur des besoins immenses en matière de logement pour ne citer que ce secteur vital. Or, le paradoxe est que ce chantier démesuré n?absorbe pas pleinement les énergies requises pour sa conduite. Il y a en effet un déficit, au plan national, d?une main-d??uvre spécialisée susceptible de fournir au bâtiment les corps de métier qui lui sont nécessaires. Les grands projets immobiliers, évalués en centaines de milliers d?unités, requièrent en effet des plâtriers, des coffreurs et autres carreleurs sans lesquels aucune entreprise ne peut être menée à bout. La conséquence en est que l?Algérie accueille des ouvriers étrangers pour combler des déficits trop manifestes pour rester pendants. Au-delà de ce paradoxe, il convient de considérer le statut du travail manuel dont la réhabilitation ne peut constituer en Algérie qu?un objectif stratégique d?intégration. D?autant qu?il s?agit en réalité de métiers à forte teneur esthétique et artistique comme peuvent en témoigner les travaux des menuisiers ébénistes, des faïenciers ou des décorateurs d?intérieur. Il est incompréhensible que dans un pays qui, comme l?Algérie, a articulé ses traditions dans l?habitat autour du beau, l?art du fer forgé, du bois, se soit ainsi dissipé. Le mobilier extérieur des médinas algériennes atteste de ce sens de l??uvre accomplie dans le respect des normes de l?architecture et de l?art. Il n?est certes plus possible de reconstituer au pareil les portes ou fenêtres des palais de La Casbah d?Alger, par exemple, mais pour autant il n?est pas inutile d?attirer les jeunes Algériens vers les ressources de ce patrimoine magnifique. L?architecture, à travers ses éléments constitutifs, est un pan de la personnalité nationale. La problématique des corps de métiers est pour tout dire au c?ur des objectifs de développement dans toutes les disciplines. Pas seulement celles du bâtiment, mais de domaines qui touchent au tourisme qui est éligible à devenir un facteur d?avancée pour le pays. L?action la plus déterminante est celle de susciter chez les jeunes Algériens la passion pour des métiers aussi honorables les uns que les autres. On connaît le culte voué, dans des pays avancés, à des chefs-cuisiniers, des décorateurs, des couturiers ou des coiffeurs : ce sont des personnalités qui font l?ouverture des journaux télévisés ou la une des magazines à grand tirage. En Algérie, haut-lieu de la gastronomie, l?art de la cuisine est relégué au stade de la gargote. Il n?est pas normal que ce fonds légué par d?anciennes corporations d?artisans algériens soit quasiment en voie d?extinction et ne bénéficie pas à l?économie du pays qui ne s?appuie pas seulement sur les projets grandioses mais aussi sur l?apport de ces artisans qui travaillent tous les jours. C?est l?interaction entre les divers compartiments du développement qui crée les richesses les plus durables. Et c?est un domaine où la nature ne peut qu?avoir horreur d?un vide qui produit du désespoir.
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