C'est officiellement le début des élections législatives en Egypte. Elles
commencent sur fond de fortes divisions au sein de l'opinion tiraillée entre
des options contraires et conflictuelles. Une impasse avec au moins trois
acteurs : Place Al-Tahrir, l'armée et les Frères
musulmans.
La défiance d'une partie des Egyptiens à l'égard du pouvoir militaire
restait forte en Egypte. Elle s'est exprimée, hier, à la veille du début des
élections législatives, par une nouvelle manifestation monstre pour le transfert
du pouvoir à un gouvernement de «salut national» civil. Une perspective que les
militaires qui assument directement le pouvoir depuis la chute de Moubarak ne sont pas près d'accepter. Le maréchal Hussein Tantaoui a rejeté clairement l'offre surprise de Mohamed ElBaradei, ancien chef de l'Agence internationale de
l'énergie atomique (AIEA) et prix Nobel de la paix qui s'était dit prêt à
assumer la direction du gouvernement de «salut national» réclamé par la
«Coalition de la jeunesse de la révolution» qui anime la contestation de la Place Al-Tahrir.
En faisant une telle offre de gérer un gouvernement de salut national de
transition, Mohamed ElBaradei renonce de fait à toute
ambition présidentielle. Cette proposition de l'ancien chef de l'AIEA faisait
partie des tractations engagées avec le CSFA pour tenter de trouver une issue à
la crise. Le maréchal Tantaoui a en effet rencontré ElBaradei et Amr Moussa samedi et il devait rencontrer
dimanche d'autres dirigeants politiques. Il a opposé une fin de non-recevoir à
la proposition d'ElBaradei qui a, aux yeux des
militaires, le défaut de les pousser à la sortie et de consacrer leur défaite
politique alors qu'ils entendent bien garder la haute main sur la transition.
TANTAOUI DURCIT LE TON
Du coup, le maréchal Hussein Tantaoui s'est
fait menaçant. «Des grands défis nous attendent et nous y ferons face. Nous ne
permettrons pas à un quelconque individu ou une quelconque partie de faire
pression sur les forces armées», a-t-il déclaré. Et pour montrer que le pouvoir
militaire n'est pas en position de faiblesse, le maréchal Tantaoui
a souligné que la rencontre avec Mohamed ElBaradei et
Amr Moussa a eu lieu à leur demande. «Les forces armées étaient devant deux
options en assumant le pouvoir en Egypte après la révolution: ou la violence, ce
que nous avons refusé totalement, ou bien assumer avec patience. C'est ce que
nous faisons et ce qui se passe malgré les occupations et les grèves qui
menacent notre économie». Il a évoqué les grands «défis extérieurs» de l'Egypte
et qui ne sont pas «connus de nombreux manifestants sur la Place Al-Tahrir».
«Il y a des éléments étrangers qui tentent de porter atteinte à la sécurité du
pays et utilisent des éléments de l'intérieur. Nous les dévoilerons
prochainement», a affirmé le maréchal.
UN MILLION POUR LA «LEGITIMITE HISTORIQUE»
Un message de fermeté alors qu'une manifestation «millionième» dite de
«la légitimité historique» se déroulait à la Place Al-Tahrir
pour réclamer le transfert rapide du pouvoir aux civils. A l'opposé, une contre-manifestation
de soutien aux militaires se déroulait à la place Al-Abbassiya,
au Caire. L'Egypte donnait, hier, d'être un champ de bataille avec trois
acteurs. Des militaires d'autant plus décidés à ne pas donner l'impression
d'être défaits politiquement par la Place Al-Tahrir qu'ils
ont de grands intérêts économiques à préserver. C'est ce qui explique
d'ailleurs l'introduction de disposition supra-constitutionnelle
lui assurant une compétence exclusive sur les affaires de l'armée et son budget.
En face, la coordination des révolutionnaires de la Place Al-Tahrir
qui veut une transmission immédiate du pouvoir aux civils et mettre fin, avant
la tenue des élections, au pouvoir des militaires qui, il ne faut pas l'oublier,
sont aux affaires depuis 1952.
LES «FRERES» SE PLACENT
Le troisième acteur, les Frères musulmans (Parti de la liberté et de la
justice) (PLJ) veulent que les élections, prévues pour aujourd'hui, se tiennent
effectivement. Ils soupçonnent les coordinations de la Place Al-Tahrir
de vouloir entraver les élections afin de les empêcher d'accéder au pouvoir. Une
posture qui fait des Frères musulmans des alliés objectifs des militaires même
s'ils ont leur propre agenda politique. Ils ont cependant averti les militaires
qu'ils ne transigeront pas sur le fait que le prochain gouvernement doit être
formé par la majorité élue. Ils répondaient à un responsable militaire, membre
du Conseil suprême des forces armées (CSFA), le général Mamdouh
Chahine, qui a affirmé que le futur parlement n'aura aucune autorité sur le
gouvernement. Hier, des dizaines de milliers de manifestants étaient regroupés
à la Place Al-Tahrir. Aujourd'hui, c'est jour de
grande incertitude.
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Posté Le : 28/11/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Salem Ferdi
Source : www.lequotidien-oran.com