Algérie

L'armée fait bouger les lignes


Vers la décantation
L'ANP souscrit à une démarche consensuelle, mais encore faut-il la présenter.
Ahmed Gaïd Salah parle de solutions qui devront venir «dans les plus proches délais». L'armée peut alors s'engager «dans l'accompagnement des fils de notre patrie, lorsqu'ils présenteront leurs propositions constructives comme le requiert le noble devoir national». C'est très clair en fait. L'armée est dans l'attente d'une initiative sérieuse qui sortirait d'un dialogue constructif. C'est là la «sève» du dernier discours du chef d'état-major de l'ANP.
C'est dire que l'institution militaire qui ne veut pas se départir de sa conviction qu'il faille aller le plus tôt possible vers une élection présidentielle, ne fixe pas un délai précis. Il va de soi que l'échec du processus constitutionnel devant déboucher sur un scrutin au 4 juillet prochain est acté. Mais cela n'empêche pas l'état-major de l'armée de souligner l'impératif d'éloigner l'idée «de périodes de transition aux conséquences incertaines, car l'Algérie ne peut supporter davantage de retard et de procrastination (ajournement, Ndlr)». Le chef d'état-major qui s'est exprimé, hier, à partir de la 6e Région militaire, a dit la volonté de l'institution qu'il dirige, en faveur d'un retour rapide à la légalité constitutionnelle. Un souci que l'ANP partage avec l'essentiel de la scène politique nationale et la société civile.
Le chef d'état-major qui a marqué, dans son discours, la détermination de l'armée à éviter tout délitement de la situation, à travers une posture ferme, ce qui sied au rôle de l'armée, dans n'importe quelle République qui se respecte, n'a pas moins souligné, à l'entame de son allocution, l'extrême nécessité «d'adopter la voie du dialogue sérieux, rationnel, constructif et clairvoyant, qui place l'Algérie au-dessus de toute considération». Le message est d'autant plus clair, qu'en liant l'appel au dialogue à celui de ne pas reproduire un nouvel ajournement du scrutin présidentiel, la seule conclusion qui s'impose tient dans la décision d'ouvrir grandes les portes du dialogue, sans exclusif et sans préalable. Ahmed Gaïd Salah qui a toujours appelé au dialogue en orientant la classe politique et la société civile vers le représentant intérimaire de l'Etat, en la personne de Abdelkader Bensalah, élargit le cercle et n'hésite pas à user du «nous» en évoquant le dialogue. «Nous devons, en tant qu'Algériens, tirer l'enseignement des expériences et des évènements tragiques passés, où la raison était absente, et dont l'unique perdant était la patrie», dira-t-il, comme pour effacer les frontières qui puissent exister entre militaires et civils, dans la recherche d'une solution à la crise dans le seul intérêt de la nation. Pour faire prévaloir la raison, Ahmed Gaïd Salah plaide en faveur de «la nécessité que toutes les parties fassent preuve de responsabilité à faire du dialogue la bouée de sauvetage de la patrie». Le propos est, on ne peut plus clair, et l'invitation est destinée à l'ensemble des patriotes, se sentant concernés par la crise.
La posture de l'institution militaire répond principalement à sa mission historique, qui devrait la mettre en dehors du jeu politicien. En rappelant l'absence de toute «ambition politique» dans la démarche de l'armée, son chef traduit l'aspiration des militaires «de servir notre pays et notre Armée, conformément à nos missions constitutionnelles, et c'est là une position dont nous ne dévierons jamais».
Dans son discours, le chef d'état-major souligne le rôle de gardien de la Constitution et de la stabilité du pays, et dans le même temps, met en évidence l'impératif que tous les Algériens sincères s'associent à trouver le moyen le plus court pour un retour à la stabilité et à la légalité constitutionnelle. Il n'y a, en réalité aucune contradiction dans le propos du général de corps d'armée, en ce sens qu'il reste dans son rôle, lorsqu'il n'entrevoit aucun bénéfice à des périodes de transition. Il revient à la classe politique, dont le rôle est justement de présenter un plan sérieux de sortie de crise. Il lui faut convaincre l'armée, la société civile et le peuple. Il faut le faire sur pièce, pas en théorie. L'ANP, dont les chefs sont certainement conscients de la difficulté de trouver une feuille de route crédible en dehors de la Constitution, peut souscrire à une démarche consensuelle, mais encore faut-il la présenter.
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)