Algérie

L'argent du pétrole



L'argent du pétrole
Entre pays producteurs de pétrole et pays consommateurs, le différend est entier sur l'évolution des marchés pétroliers, après que le baril de pétrole eut atteint des niveaux jugés trop élevés dans le carré des pays développés. Les pays consommateurs demandent aux pays producteurs de pomper davantage pour ramener les cours de brut dans des proportions raisonnables. L'Opep, une organisation qui compte quarante pour cent dans la production pétrolièremondiale, avance, elle, que les marchés pétroliers sont suffisammentapprovisionnés. Cette divergence de vues est liée en fait à des enjeux dans lemonde des matières premières. A qui profite-t-elle, en définitive ' Des experts relèvent que l'envolée des prix affecte l'économie mondiale, si elle s'étire dans le temps, et qu'elle n'est pas profitable à l'évolution de la croissance de l'économie mondiale. L'est-elle cependant aux pays pétroliers dont fait partie l'Algérie ' De manière générale, la bonne tenue des cours du pétrole ne profite pas à la croissance des économies à forte croissance pétrolière. Pas aux ménages, en tout cas. La preuve, des indicateurs économiques sont au rouge dans de nombreux pays pétroliers. Qu'il s'agisse de pays structurés dans l'Opep ou de pays évoluant hors Opep, la manne pétrolière n'a pas été ainsi mise à profit pour une bonne reprise de la croissance et une économie solidement structurée en dehors des hydrocarbures. L'évolution de certaines économies est telle que le pétrole est regardé comme une malédiction. L'or noir, synonyme de richesses, fait ainsi paradoxalement que les secteurs hors hydrocarbures ne démarrent pas dans beaucoup de pays pétroliers. Et l'Algérie en fait partie. Dans l'imaginaire des dirigeants des pays à forte richesse minière, trouver des secteurs de substitution au pétrole équivaut à y consentir des investissements colossaux, repenser des stratégies de développement à long terme.Autant continuer à investir dans les hydrocarbures, un secteur que les pays pétroliers maîtrisent mieux. Si l'on prend le cas de l'Algérie, des efforts étalés sur plusieurs années déployés dans les exportations hors hydrocarbures n'ont débouché que sur de maigres résultats : un peu plus d'un milliard de dollars en exportation enregistré ces dernières années. Des efforts analogues dans le secteur pétrolier auraient permis de faire augmenter de dizaines de milliards de dollars les recettes pétrolières. Problématique l'est et le demeurera la canalisation de l'argent du pétrole, en Algérie et dans beaucoup de pays pétroliers. Exception faite de quelques Etats du Golfe, l'argent du pétrole n'a pas donné naissance à des secteurs structurants et à des secteurs de services à forte valeur ajoutée à même de compter dans le PIB et dans la contribution au budget de l'Etat. L'argent du pétrole est orienté dans les circuits des importations et dans des projets d'investissement à faible valeur ajoutée. Que les prix du pétrole augmentent, cela ne changera rien au quotidien des ménages dans plusieurs pays pétroliers. Et, ce ne sont pas les exemples qui manquent pour illustrer une telle situation. Dans ses différents rapports, la Banque mondiale noircit souvent le tableau lorsqu'elle évoque des poches de misère dans des pays de la sphère Sud dont certains regorgent de pétrole. En Algérie, des réserves de change jamais égalées sommeillent. Des analyses parées d'arguments sont souvent avancées pour justifier une telle mise en jachère de l'argent du pétrole. Il est ainsi expliqué qu'avoir des centaines demilliards de dollars en réserves de change n'est pas synonyme de richesse. Et que puiser exagérément dans les caisses de l'Etat, c'est gonfler indéfiniment les dépenses publiques. Et puis, à quoi peuvent correspondre des réserves de change' Telle qu'elle évolue aujourd'hui, la production nationale reste faible. Et cela n'est pas de nature à faire avancer l'économie nationale. Dans un de ses rapports consacrés à l'Algérie, la Banque mondiale a mis en exergue quelques excès en matière de dépenses publiques. Les passages les concernant dans les documents de cette institution multilatérale ont valeur de reproche à mot couvert. La reprise de la croissance réalisée ces dernières années est en partie le fruit des dépenses publiques, mais à quoi sert alors un bon matelas en devises ' Il sert, en réalité, à rassurer les partenaires de l'Algérie. Cela veut dire que dans un contexte d'aisance financière, les défauts de paiement ne peuvent se produire avec un pays aux comptes performants et solvable. L'Algérie parait ainsi comme une bonne adresse pour ceux qui s'intéressent beaucoup plus au commerce extérieur qu'à autre chose. Et dans ce contexte, les ressources à mettre dans les projets d'investissements sont à chercher dans le privé et dans le partenariat étranger.Y. S.




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