L'anguille à l'honneur à El Tarf Elle est classée à l'état sauvage dans la catégorie des poissons d'eau douce

Poêlée façon meunière, panée ou préparée en sauce, l'anguille, poisson serpentiforme à l'aspect peu avenant, a fini, à El Tarf, par «conquérir» les assiettes des amateurs de produits de la mer. Même s'il faut reconnaître qu'elle a été aidée en cela, ces derniers jours, par l'absence prolongée de poissons de mer sur les étals à cause de la persistance du mauvais temps, l'anguille, que l'on appelle aussifranche, morgain ou margagne, a réussi à s'imposer grâce aux dizaines de façons de la préparer.Hamid, un vieux pêcheur aujourd'hui en retraite, rappelle qu'en vérité, si l'anguille est classée à l'état sauvage dans la catégorie des poissons d'eau douce, c'est parce qu'elle y passe la plus grande partie de sa vie avant d'effectuer un «long voyage» vers la mer.«Je considère l'anguille comme un poisson de mer même si elle est pêchée dans des bassins d'eau douce. On le sent à la texture de sa chair, c'est pourquoi j'en raffole», assure-t-il, n'omettant pas de vanter, au passage, le talent de sa femme qui «s'y connaît, dit-il, dans l'art d'accommoder ce poisson à toutes les sauces».Aujourd'hui, dans la majorité des agglomérations de la wilaya d'El Tarf, des dizaines de pêcheurs d'anguilles exposent leurs prises aux abords des marchés, au grand bonheur des consommateurs qui n'en demandaient pas tant, d'autant que les prix du poulet et de la viande rouge ont pris «l'ascenseur».L'anguille est cédée entre 100 et 200 dinars la pièce, selon la taille et l'habileté des uns et des autres à marchander. Elle est dépecée et découpée en rondelles sur place, et il ne reste à l'acheteur qu'à la rincer et à la faire cuire.Dimanche matin, premier jour de l'année 2012, des nuées de personnes se bousculaient déjà devant les vendeurs d'anguilles afin de choisir la «bonne» pièce. Des ménagères taillaient une bavette en attendant d'être servies, les discussions tournant invariablement autour de la meilleure façon de préparer ce «poisson-serpent».Dans la wilaya d'El Tarf, l'anguille est pêchée dans les lacs Tonga et Oubeïra ainsi que dans la lagune de «La Mafragh» où, dit-on, ce poisson pullule.A la direction de la Pêche et à celle de l'Environnement, où l'on se félicite des «centaines» d'emplois créés grâce aux activités de pêche continentale, les responsables concernés assurent que la pêche traditionnelle pratiquée par les marchands d'anguilles ne porte pas atteinte à l'espèce ou à l'écosystème ; néanmoins, disent-ils, cette activité «devra être réglementée».Pour Mounir B, un restaurateur d'une quarantaine d'années, «il serait judicieux de réfléchir à un mode de concession pour une exploitation rationnelle des sites d'anguilles comme ce fut le cas il y a plusieurs années». Une suggestion à laquelle le vieux pêcheur Hamid, grand amateur d'anguilles devant l'Eternel, dit «adhérer pleinement».
APS