L?angoisse du coureur de fond

Les Jeux africains ont démarré à Alger, ce qui est logique puisque l?Algérie y participe régulièrement. Comme elle participe par ailleurs à tous les jeux possibles et imaginaires. Aux Jeux panarabes, maghrébins et méditerranéens, de même qu?elle joue régulièrement à la Ligue arabe, à la conférence musulmane, afro-asiatique, celle de l?UMA et bientôt peut-être aux joutes de l?OTAN ou celles du GMO, grand moyen-orient américain, ou encore aux jeux de l?Union méditerranéenne du président Sarkozy. En attendant les premiers jeux berbères, on peut se demander où se situe exactement l?Algérie. Ce qui revient à se demander à quoi, dans son immense solitude, doit penser le coureur de fond algérien aux Jeux africains ? En guettant ses adversaires au coude à coude, comment se situe-t-il au milieu de la foule ? Lui-même est Africain mais pas vraiment. Arabe, de loin, Berbère, au fond, Musulman le vendredi et Méditerranéen mais juste en été. Ecartelé entre ses différentes aires d?influence qui sont autant de couloirs de course, le coureur de fond algérien zigzague et doit se demander pourquoi il est là. Et pour cette raison sûrement, il tourne en rond autour du stade. En fait, ce n?est pas vrai. Un coureur de fond, même algérien, ne pense à rien pendant qu?il court. Tout juste pense-t-il à sa course, à la façon de la gagner et de contrer ses adversaires directs. Même si un électroencéphalogramme pratiqué dans les derniers 800 mètres montre que le coureur de fond algérien pense à quelque chose de précis ; à l?arrivée, qu?il n?aimerait ne pas voir arriver, à cette piste d?athlétisme qu?il souhaiterait voir s?étaler plus loin dans l?espace pour traverser la Méditerranée. A cet éternel départ qu?il ressasse et qui n?en finit pas d?arriver. Dans son infinie solitude, le coureur de fond africain sait que courir longtemps est la seule façon de sortir d?Afrique.