Algérie

L'ammoniac, une autre victime de la crise


Les prévisions de la demande mondiale pour 2012 de ce produit à très forte valeur ajoutée vont pour la deuxième fois consécutive être révisées à la baisse. La crise serait une nouvelle fois à l’origine de cette tendance, avec la combinaison d’une incertitude économique et de prix élevés. Fort heureusement, pour Fertial, la filiale algérienne du groupe espagnol Villar Mir (GVM), qui la contrôle à hauteur de
66%, la production d’ammoniac attendue de ses trois usines – Annaba et deux à Arzew - devant totaliser plus de 620.000 tonnes à fin 2011, ont déjà trouvé preneur en Fertiberia, l’autre filiale espagnole de GVM. Car répondant à la stratégie pour laquelle a opté le leader européen des fertilisants, depuis son installation en Algérie, la société Fertial cède la totalité de sa production à «sa sœur aînée» Fertiberia. C’est en les intégrant dans sa structure globale d’exportations d’ammoniac que celle-ci arrive, en effet, à placer les quelque 620.000 tonnes issues des usines de Annaba et d’Arzew sur le marché mondial ou sont échangées 18,7 millions de tonnes/an. «Ces deux dernières semaines, nous avons fortement ressenti la baisse de la demande mondiale de l’ammoniac. Le marché est extrêmement inactif. Nos partenaires parlent de sérieuses tensions. La situation n’est pas rassurante du tout», indique Jorge Requena Lavergne, administrateur directeur général de Fertial, expliquant cette «inertie» inquiétante par la crise mondiale actuelle. Admettant l’impact divers, mais généralisé de cette crise sur le secteur de l’ammoniac, le responsable se veut, toutefois, rassurant sur les débouchés commerciaux pour les produits de son groupe même si le chemin vers une reprise opérationnelle complète est probablement lent et difficile. Les raisons de son optimisme : le renforcement de la compétitivité des filiales de Villar Mir que lui a assurée, lors de la crise de 2008, le processus d’internationalisation développé à partir de 2002. Selon M Requena, même si Fertiberia venait à connaître des difficultés  pour écouler son ammoniac aux Etats-Unis d’Amérique et en Europe du Nord qui en sont les plus grands marchés demandeurs – 30 million T -, le boulevard lui sera assurément ouvert dans d’autres régions grâce à ses circuits commerciaux internationaux. «Vu son étendue, la crise va inévitablement impacter Villar Mir mais beaucoup moins que d’autres Groupes dont l’activité reste concentrée sur une poignée de marchés en Espagne ou en Europe», précise-t-il. Ainsi, la demande moins importante que prévu des Etats-Unis et de l’Europe du Nord qui importait pourrait, aux yeux du responsable, être partiellement compensée par l’augmentation de celle de l’Afrique et de l’Asie. En attendant, les lobbies du négoce peuvent se frotter les mains. Car, poursuit Jorge Requena, le circuit de commercialisation, l’environnement géopolitique et économique dans lequel évolue l’ammoniac, influencent les techniques de négoce. D’autant qu’en termes de prix, la conjoncture demeure favorable malgré l’effondrement du commerce mondial : les cours de l’ammoniac ne cessent d’augmenter. Ils se sont établis à 620 dollars la tonne contre 590, il y a à peine quelques mois. L’ammoniac est, en effet, devenu essentiel dans le secteur économique pour répondre aux besoins nutritifs à l’échelle mondiale, car utilisé à environ 81% pour la fertilisation des sols. Ses mérites en agriculture sont multiples : utilisé comme fertilisant, il contribue au succès du concept d’agriculture raisonnée. De même, son injection à l’état gazeux dans le sol permet une captation optimale par la plante, limitant ainsi au maximum la déperdition d’azote tant par évaporation que par lessivage, explique le directeur du complexe algéro-espagnol Fertial. D’où la forte demande américaine et européenne d’avant-crise ; 30 millions de tonnes consommées/an, dont 9 millions principalement importées de Russie et d’Ukraine.
Quand Fertial voit grand
A des milliers de kilomètres des turbulences d’outre-frontières et en dépit des tensions du marché international fortement ressenties à la société mère, c’est un climat tout autre qui règne à Fertial. Sereins, les 740 travailleurs de l’usine de Annaba et les 560 d’Arzew semblent résolument déterminés à redoubler d’efforts pour faire de leur entreprise la fierté de l’industrie pétrochimique algérienne. Et pour y parvenir, ils ont un challenge à relever : un million de tonnes d’ammoniac à l’horizon 2013. Considérant les résultats jusque-là réalisés, notamment à Annaba, l’on s’accorde à dire que ce «un million de tonnes» n’est finalement pas une ambition démesurée et l’on s’y approche à grands pas :
315 000 de tonnes sur un budget 2011 arrêté à 316.000 T contre 260.000 T en 2010. Destiné à plus de 90% au marché international, le volume de production des trois usines a, à ce jour, permis à l’Algérie de conforter sa position de 8e exportateur d’ammoniac au monde. Malgré tous ses efforts, elle n’a, néanmoins, pas même l’ombre d’une influence sur la production mondiale. Que représentent quelque 600.000 T à comparer aux 151 millions T dont 80 % (120 MT) émanant de 14 pays seulement' A peine 0,4%. Que manque-t-il donc à notre pays pour qu’il puisse prétendre à entrer dans la cour des grands et mettre à rude épreuve ses deux potentiels concurrents arabes, le Qatar et l’Arabie Saoudite avec l’incessant lancement de leurs nouvelles usines de deux millions de tonnes ' Rendre effectives les 1,32 millions de tonnes appelées à être mises sur le marché international par le nouveau complexe Sonatrach-Orascom d’Arzew. Telle est la réponse de Mohamed-Tahar Bedja conseiller exécutif auprès du directeur général de Fertial qui reconnaît que même si la dynamique de progrès y existe, Fertial a encore une marge de progression. Néanmoins, elle ne peut aller au-delà d’un million de tonnes : ses trois usines totalisent des capacités nominales de l’ordre de 3000 T /J,  alors qu’il existe des modules de production d’ammoniac de 3300 T/J. Ce goût de défaitisme que le responsable de Fertial laisse percevoir est, aux yeux de nombre d’observateurs, injustifié.  Des possibilités de grignoter des parts de marchés à ces «géants» de l’ammoniac, il en existe pour peu que Fertial daigne consentir des investissements dans l’extension de ses capacités de production.
Une nouvelle unité pourquoi pas ', s’interrogent-ils. Fertial a l’avantage de bénéficier du gaz algérien – environ 80% du coût de fabrication de l’ammoniac - à des prix très bas et d’une main-d’œuvre peu coûteuse, mais au savoir-faire incontesté, sans parler des bénéfices induits par l’envolée exponentielle des prix sur le marché mondial (100 à 200 dollars la tonne au moment du rachat en 2005 de Fertial contre les 620 dollars actuels), argumentent-ils. 200 millions de dollars déjà réalisés depuis la prise des rênes du complexe pétrochimique à fin 2010 et 17 millions d’euros en 2011, les mêmes observateurs le concèdent à Villar Mir. Mais s’interrogent-ils encore, ce dernier n’a-t-il pas les moyens et assez d’avantages liés aux investissements directs étrangers pour faire mieux dans sa filiale algérienne '                 
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