Algérie

L'Algérien lit de moins en moins



L'Algérien lit de moins en moins
Il susciterait, aussitôt, étonnement et curiosité. Même les tablettes exhibées dans les trains et autres lieux publics sont, dans la plupart des cas, des instruments pour jouer, s'informer. Serait-il juste, en l'absence de statistiques, d'études fouillées et précises, de conclure à un divorce définitif et consommé entre lui et le livre ' Cette précaution, que pourrait conforter l'afflux de visiteurs lors des différentes foires du livre, paraît s'avérer un trompe-l'?il. Le changement est trop brutal dans le paysage social pour ne pas assener des conclusions et des certitudes. L'image de jeunes femmes ou d'hommes plongés dans la lecture d'un roman a quasiment disparu. Vraie ou fausse, l'histoire de la personne, qui suscita, sur un quai du métro d'Alger, la méfiance d'un agent de contrôle en dit long sur le déclin de cette saine pratique dans notre société. Impatiente, semble-t-il, de finir sa lecture, celle-ci était restée plus d'une vingtaine de minutes indifférente au passage dans un fracas assourdissant des rames. C'est alors que le cerbère chargé de traquer les mauvaises personnes se rapprocha d'elle, intrigué par un comportement aussi insolite et inhabituel.Génération paresseuse 'Il se trouve maintenant beaucoup d'étudiants, même inscrits en facultés des lettres, qui avouent, sans une once de honte ou de regrets, n'avoir jamais lu, ne serait-ce que les romans classiques que les collégiens connaissaient dès l'entrée en sixième. De plus en plus, la lecture chez de nombreux adolescents s'arrête au suivi des péripéties des championnats de football ici ou ailleurs dans les journaux. Un professeur, dans une grande école sur les hauteurs d'Alger, étudiant à la faculté des sciences économiques d'Alger à la fin des années 70, se désole de voir la plupart de ses étudiants « n'avoir même pas la curiosité d'acheter un journal ». « De mon temps, je ne pouvais rater Le monde de l'économie, un outil qui m'apportait de nouveaux éclairages » dit-il d'un ton désabusé. Le phénomène ne serait pas algérien plaident ceux qui mettent en avant la désaffection générale pour l'écrit même si elle ne prend pas la même ampleur partout. Dans tous les pays, et la presse écrite est la première à en faire les frais, les nouvelles technologies ont instauré de nouvelles habitudes de lecture, de recherche de l'information qui déconsidèrent l'écrit. « Il faut relativiser ce jugement car, ailleurs, le cinéma, la télévision et l'université peuvent se révéler des passerelles pour la (re) découverte d'auteurs, de courants littéraires etc. Certes, tout le monde n'a pas baissé les bras. Quelques enseignants animés de bonne volonté et gardant quelques illusions fournissent des livres à résumer pour des lycéens. « J'étais surpris, raconte un parent qui travaille à Alger, de recevoir un appel de mon fils me demandant un petit résumé de la ?'Terre et le sang'' de Mouloud Feraoun ». Quant aux éléments relatifs à sa bio-bibliographie, un clic sur Wikipedia aurait suffi au paresseux. On n'hésite plus à parler de génération paresseuse. Moins sévères, d'autres atténuent et relativisent le constat. « Les jeunes d'aujourd'hui ont une offre de loisirs plus variée et plus large » constate une avocate qui, du temps de sa jeunesse, n'avait, pour passer le temps et rêver, une passion immodérée pour les livres de Pearl Buck et Guy des Cars. Le gérant d'une librairie située dans un étage du centre commercial de Bab Ezzouar nous confie aussi que « toute la collection de Tintin a été épuisée en une semaine et les enfants et ados sont très friands de BD ». « Il ne faut pas croire que personne ne lit, que le livre a perdu sa place dans les foyers ». Il consentira, tout de même, à reconnaître « que c'est une minorité qui raffole de Harry Potter et de Malika Secouss ». Il n'est pas rare de rencontrer, au hasard des manifestations autour du livre, lors de ventes dédicaces, des jeunes qui n'ignorent rien des grands auteurs, algériens ou étrangers. Tel étudiant peut parler avec aisance des « gens de Mosta » de Habib Tengour que de « La ferme des animaux » d'Orwell. Un autre a un goût prononcé pour les écrits de philosophie ou Coello. Ce sont souvent d'heureuses exceptions dans tous les milieux, y compris ceux censés être de traditionnels viviers de lecteurs. Face à une telle situation aussi inquiétante, les éditeurs, l'école, qui n'assure même plus sa mission première d'alphabétiser et les associations qui interviennent dans ce domaine, peinent à renverser une lourde tendance porteuse d'interrogations et inquiétudes.




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