Entretien réalisé par Samira Imadalou
La Tribune : Quelle lecture faites-vous de la demande du FMI adressée à l'Algérie pour renflouer ses réserves '
BACHIR MESSAITIFA : La demande du Fonds monétaire international (FMI) ne concerne pas uniquement l'Algérie et n'est pas un fait nouveau. Ce dossier remonte à novembre 2011. Le conseil d'administration du FMI avait proposé le relèvement des ressources financières du fonds de 238 milliards de dollars à 755 milliards de dollars. La différence entre le niveau actuel et le niveau requis est couverte par l'augmentation de la contribution des membres, y compris l'Algérie. Ce qui se produit régulièrement tous les 5 ans selon le règlement du fonds. Ainsi se fait la révision du taux de contribution des pays membres dans le capital utilisable du fonds, selon des indicateurs macroéconomiques, à savoir la taille du produit intérieur brut et réserves de change.Puisque l'Algérie a enregistré durant cette dernière décennie une avancée considérable dans ces deux indicateurs, alors le relèvement de sa participation dans le capital du fonds est tout à fait normal. Tout simplement, parce que la contribution d'un pays est calculée sur la base d'un facteur spécifique au PIB et des réserves de change. Actuellement, la participation de l'Algérie dans ce fonds est à hauteur de 1,92 milliard de dollars, soit moins de 0,35 % du capital. Selon les indicateurs macroéconomiques de l'Algérie, ce taux devrait être de 0,41%, soit environ 997 millions de dollars pour augmenter la part de l'Algérie à 2,89 milliards de dollars.
Que fera l'Algérie à votre avis et quelle option préconisez-vous dans ce cadre '
Je pense que l'Algérie va répondre positivement à cette demande qui remonte à novembre 2011.Ce dossier a de nouveau été présenté lors d'une réunion restreinte en avril dernier à l'occasion des assemblées annuelles du FMI et de la Banque mondiale. L'on s'attend à ce que l'accord soit ratifié en octobre 2012 lors des prochaines assemblées annuelles d'automne des institutions de Bretton Woods. D'autres pays notamment les pays, ceux du G20 tel le Japon sont également concernés par cette demande.L'augmentation de la contribution de l'Algérie dans le capital du FMI ne fait, en fait, que refléter les équilibres financiers du pays et l'amélioration du PIB. Ces deux éléments représentent 55% des points pris en considération sur le plan macroéconomique dans les révisions à la hausse des contributions des pays dans le capital du fonds.
Quels sont les avantages que pourrait tirer l'Algérie en renflouant les capacités financières du FMI '
Si l'Algérie accepte de renflouer les ressources financières du FMI, elle en tirera plusieurs avantages. Cette décision lui permettra d'augmenter ses quotes-parts et de renforcer son rôle dans le contrôle du système financier international. L'Algérie pourra aussi accroître ses capacités à puiser dans les réserves du fonds, dans le cas d'une crise financière. Ce qui est possible en Algérie en raison de la fragilité et de la vulnérabilité de l'économie nationale, sachant que les équilibres financiers sont basés à 60% sur les exportations d'hydrocarbures. Cette augmentation est importante car elle constitue 200% de la contribution de chaque année, ce qui signifie dans le cas où l'Algérie accepte la demande du Fonds, la possibilité de retirer 5,8 milliards de dollars par an. Un chiffre plus important par rapport aux capacités actuelles qui s'élèvent à 3,8 milliards de dollars annuellement.Troisièmement, doubler la cotisation comme demandé par le conseil d'administration du FMI signifie pour l'Algérie une participation dans les décisions stratégiques de ce dernier. Comme c'est le cas pour les grands pays à l'image de l'Allemagne, l'Amérique et la France.Accroître la contribution de l'Algérie dans les actifs du Fonds avec environ 1 milliard de dollars ou 997 millions dollars n'est rien par rapport aux réserves nationales en devises libellées en dollars parce qu'ils ne représentent que 0,5% des réserves de change déclarés par les autorités.L'autre possibilité pour l'Algérie est d'emprunter au fonds sur la base des obligations proposées par l'Institut monétaire international.
Est-ce que la conjoncture nationale et internationale se prête à une telle décision '
Sur le plan politique, la contribution de l'Algérie dans l'amélioration de la capacité du Fonds international à financer les soldes financiers internationaux contribuera à développer la vision du pays sur le système monétaire international d'un monde multipolaire. Il s'agit aussi pour l'Algérie de soutenir ses appels réitérés à chaque occasion pour le renforcement de la place des pays du sud et des pays émergents au sein du FMI et dans la conception des relations commerciales et financières entre les nations. Ces appels ont toujours été rejetés par les principaux pays influents au sein du FMI, tels que les Etats-Unis, la Grande-Bretagne et l'Allemagne dans une certaine mesure. Mais, dans les circonstances actuelles, avec l'aggravation de la crise de la dette souveraine dans la zone euro et la baisse de l'indice de la croissance et de l'emploi dans les centres économiques du monde : l'Amérique, le Japon et la Chine, les pays excédentaires comme l'Algérie ont besoin d'exploiter cette situation historique pour restructurer le système économique international sur la base «gagnant-gagnant» pour partager les avantages plus équitablement.
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Posté Le : 06/05/2012
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : S I
Source : www.latribune-online.com