«L'Algérie a le devoir de franchir le pas»

- Quels sont les crimes passibles de la peine de mort dans la loi algérienne 'Ce sont les chefs d'inculpation, qui étaient du ressort de ce que l'on appelait la Cour spéciale, qui sont devenus, depuis l'abolition de cette dernière, de la compétence soit du tribunal militaire ou des tribunaux civils et qui touchent à la sûreté de l'Etat. Il y a aussi les doubles crimes. Par exemple, lorsqu'il y a un vol qualifié, doublé d'un assassinat. Il y a également le terrorisme et les trafics de stupéfiants. Chez nous, la peine capitale n'est pas exécutée depuis 1993.Les dernières exécutions ont concerné les six auteurs du fameux attentat de l'aéroport. Mais les condamnations à la peine de mort sont encore prononcées. Une des garanties que donne la pratique judiciaire chez nous est qu'à chaque condamnation à mort, la Cour suprême fait cassation pour donner une seconde chance au condamné. En ce qui nous concerne, en tant que représentants de la défense, nous estimons que la peine capitale n'est pas la solution idoine pour mettre un terme aux crimes. Elle n'a pas d'effet dissuasif et donc il faut la supprimer. En plus, l'erreur judiciaire n'est pas impossible et peut mener à l'exécution d'un innocent.- L'Algérie observe un moratoire depuis une vingtaine d'années. Qu'est-ce qui empêche, selon vous, les autorités de franchir le pas vers l'abolition de la peine de mort 'Je pense que c'est, essentiellement, en raison de la malheureuse décennie de terrorisme que nous avons vécue. Elle a marqué de manière indélébile la conscience du peuple. Il y a donc un climat social qui empêche l'avancée vers l'abolition de la peine de mort. Mais les exécutions ne se font plus. Généralement, les peines capitales sont commuées, au bout de quelques années, en prison à perpétuité qui devient par la suite des peines de 20 ans d'emprisonnement.Oter 20 ans de la vie d'une personne n'est pas facile à supporter. C'est largement suffisant comme punition. Et nous espérons que l'Algérie essayera de tourner cette page et tentera de trouver d'autres solutions qui s'inscrivent dans la dynamique universelle. Nous avons, en tout cas, le devoir de franchir le pas et de poser le problème avec beaucoup de courage. Si nous réfléchissons de manière très responsable, nous arriverons certainement à un résultat bénéfique pour la société : l'abolition de la peine de mort, car les sanctions disproportionnées sont contre-productives.