Algérie

L’agriculture dans la ville



Au Forum sur l’agroalimentaire, le ministre de l’Industrie et de la Promotion des investissements avoue que son attention pour les questions de développement n’a pas englobé l’agriculture. Déjà que pour une mission intersectorielle, l’intitulé même de “stratégie industrielle” était porteur de l’omission. Qu’il ait pensé aux services, comme il le rappelle, constitue un réel effort de dépassement du dogme des industries industrialisantes…
Cela, on attend toujours de connaître le contenu final de la stratégie et les modalités de sa mise en œuvre. On n’en sait pas grand-chose sinon qu’un tardif éveil à l’industrie pétrochimique fera que l’Algérie pourrait s’investir dans quelques-unes de ces industries polluantes, dont les pays soucieux de leur santé écologique sont en train de se délester. Cela rappelle que ce n’est pas toujours une mauvaise chose qu’on soit oublié de la planification nationale. L’avenir environnemental de la baie de Béni Saf ne serait pas, d’ores et déjà, compromis si l’on n’y avait pas pensé pour un projet de complexe aluminium.
Apparemment, il n’est pas possible d’envisager un acte d’investissement sans son pendant en dégradation de patrimoine naturel. Un parc naturel contre une route, une portion de littoral contre une usine, un domaine agricole et le massacre alluvial contre une cité…
Si l’on n’avait pas, jusqu’ici, méprisé le tourisme, que seraient devenus nos rivages et nos oasis ?
L’autogestion, la révolution agraire et les cessions népotiques d’EAC et EAI ont fait que l’agriculture plaide, en la matière, pour une vertu de l’oubli. Il n’est pas sûr qu’on doive le reprocher aux autorités de la “stratégie”.
Il n’y a pas seulement que l’agriculture qu’on oublie ; c’est peut-être tout le monde rural qu’on ignore. Parce qu’il est à peine croyable que nous soyons 87% de citadins en Algérie, comme l’établit le dernier recensement. Parce que la moyenne mondiale étant de 50/50 et parce qu’on dépasse, en termes de citadinité, des pays relativement développés comme le Portugal (60/40), ou surdéveloppés comme les États-Unis (81/19), on ne peut qu’être surpris du ratio national.
Mais le ministre de l’Intérieur, sûr de la qualité de son administration, s’est dit satisfait de la manière dont l’opération de recensement a été conduite, mais juste parce que ses résultats se rapprochent des chiffres consolidés de l’état civil. “Il y a au moins quelque chose qui marche”, s’est réjoui un Zerhouni apparemment à l’exigence modeste. Il n’y a pas longtemps, à la lumière d’une abstention électorale, il était question de millions de lettres pour questionner des millions de ménages sur leur lieu de résidence et, subitement, on sait, au centième de pour cent près, qui d’entre nous est dans quelle ville et dans quel lieu-dit.
L’administration locale vient donc de faire un saut qualitatif tel qu’on pourrait peut-être envisager de ne plus devoir présenter nos cartes de vote pour avoir droit à un certificat de résidence.
Si le rapport entre population rurale et population urbaine qu’elle a établi au cours du récent recensement se confirmait, cela expliquerait au moins pourquoi la terre est mal exploitée : nous sommes presque tous en ville. Et pourquoi il n’y a plus de ministère de la Ville : le pays est une ville.


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