Algérie

L'Afrique dans tous ses états Putsch chaotique au Mali, respect des résultats électoraux au Sénégal


L'Afrique dans tous ses états                                    Putsch chaotique au Mali, respect des résultats électoraux au Sénégal
L'idée reçue sur l'Afrique des coups d'Etat et des dictatures n'illustre plus réellement la situation de tout le continent noir. Les historiens le disent et l'écrivent, les artistes et les créateurs le prouvent, mais tout cela ne semble servir à rien et on continue à relayer les préjugés dont l'Afrique noire et ses 700 millions d'habitants continuent de souffrir. Cela est d'autant plus vrai que l'élection au Sénégal avait été marquée par beaucoup de doutes et de risque lorsque le président sortant, Abdoulaye Wade avait insisté lourdement pour se représenter à un scrutin en forçant la main à la constitution. Le risque d'un maintien au pouvoir pour l'éternité s'était profilé. Il n'en a rien été, le processus électoral a été respecté dans le pays et Wade a cédé la place à Sall. Le Sénégal, pays frontalier avec le Mali, n'a donc pas connu les difficultés et la crise qui a concerné son voisin. Des Africains voisins qui ont des parcours différents sans qu'aucun des deux pays n'influe sur l'autre. C'est en fait cela la grande nouveauté dans la perception de l'Afrique et des politiques qui s'y pratiquent. Il reste que cette perception est loin de faire son chemin dans les médias occidentaux quand ils traitent de l'Afrique. Le sous-entendu répété le plus souvent est que l'Afrique demeure le continent des coups d'Etat, des putschs et des dictatures. Dans le cas malien on a vu aussi comment l'UA a bien indiqué que la junte qui a pris le pouvoir ne sera pas reconnue et ne pourra en aucune manière devenir un interlocuteur valable. Mieux, des pressions seront exercées sur les putschistes pour les pousser à rétablir l'ordre constitutionnel au plus tôt. Il est vrai que la perception négative que l'on peut avoir de l'Afrique est liée à une histoire tumultueuse. Depuis les années 1950, on a compté plus de 65 coups d'Etat et putschs en Afrique. Le Mali en est à son troisième en à peine quarante ans. Le Sénégal depuis son indépendance n'a jamais vu de prise de pouvoir par la force. L'épisode Wade n'ayant été au final qu'un coup de tonnerre sous un ciel bleu. Ces deux pays donnent finalement l'illustration de cette Afrique différente, plurielle et en constante évolution, que l'on a pris pourtant l'habitude de décrire - par commodité de langage ou par paresse intellectuelle - comme une unité géographique et politique. L'Afrique, continent des putschs et des dictatures n'existe plus. Le continent noir est divers et sa diversité d'évolution politique et sociale est une réalité avec laquelle il faut compter si on veut analyser sereinement ce qui se passe sur ce continent. Les deux cas, malien et sénégalais, prouvent justement que les pays africains sont des pays comme tous les pays du monde avec des réalités historiques différentes et des évolutions politiques particulières. Par ailleurs, l'effet inverse est tout aussi faux. Essayer de déterminer des cas particuliers ' tel qu'on veut montrer le Sénégal - comme pour mieux affirmer une règle, tend à dire la même chose. Les Africains dans leur majorité étant condamnés à la mauvaise gouvernance, à la dictature et, chemin faisant, au sous-développement. De toute évidence, ce déni de justesse intellectuelle quand on parle de l'Afrique est empreint de relents colonialistes qui ne disent pas leur nom. Effectivement, comment expliquer cette propension de certains intellectuels et analystes à refuser de voir que les pays africains sont une diversité culturelle sociale et politique qu'on ne peut aborder que de manière individuelle et indépendante. Cette propension à fondre tout dans un même moule se retrouve aussi dans le discours politiques. Le fameux discours de Dakar de Nicolas Sarkozy en juillet 2007, en est une parfaite illustration. Pour le président français, le drame de l'Afrique est lié au fait que « l'homme africain n'est pas assez entré dans l'Histoire. (...) Le problème de l'Afrique, c'est qu'elle vit trop le présent dans la nostalgie du paradis perdu de l'enfance. (...) Dans cet imaginaire où tout recommence toujours, il n'y a de place ni pour l'aventure humaine ni pour l'idée de progrès ». Ce discours qui avait soulevé un tollé en son temps, ne faisait que remettre au goût du jour les préjugés habituels qui n'ont jamais disparu des médias ou de pas mal d'ouvrages spécialisés. Une répétition de lieux communs et d'idées reçues sur l'Afrique subsaharienne qui reprennent du poil de la bête quand justement les hommes politiques s'en saisissent. Il est vrai que face à un continent qui souffre de tous les maux, il n'est plus utile de mettre des gants pour parler de l'Afrique en recourant aux clichés. Faut-il s'étonner qu'une loi sur les effets positifs de la colonisation ait été voté au parlement français ' Cela procède sans nul doute de la même démarche intellectuelle qui veut que l'on sache et que l'on dise que l'Afrique est en « faillite » et que son avenir est compromis pour des décennies. Si on peut, sans coup férir, jeter la pierre aux potentats locaux incompétents ou corrompus, cela permet aussi d'effacer du même coup les responsabilités occidentales dans les drames africains. Cette tendance à faire que l'Afrique est un tout politique qui obéit aux mêmes règles dédouane aussi tous ceux qui participent au maintien de l'image de l'Afrique sous-développée, incapable de se gérer par elle-même.
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