Tlemcen
De notre envoyé spécial
Sid Ahmed Serri, l’un des grands maîtres de l’Ecole d’Alger de la musique andalouse, est monté sur scène pour interpréter, sans se préparer, un «mceder» avec l’ensemble El Anadil (Rossignols) de Chéraga, lors d’un concert programmé dans le cadre de l’exposition «Nouba, hommage aux maîtres», organisée par le département patrimoine immatériel et chorégraphie de la manifestation «Tlemcen, capitale de la culture islamique 2011». Le public a applaudi debout le professeur, le chef d’orchestre, chanteur et oûdiste Sid Ahmed Serri après sa descente de scène. Une manière de saluer un artiste heureux d’assister à un hommage de son vivant. «Je ne voulais pas monter sur scène au début, car cela fait une éternité que je n’ai pas chanté. On m’a convaincu de le faire. J’aurais voulu voir le texte avant, pour être plus à l’aise. Après, je me suis adapté», nous a confié Sid Ahmed Serri, après le concert.
Mené par Youcef Oueznadji, élève du maître et sociétaire d’Al Djazaïria Al Mossilia, l’ensemble El Anadil a interprété la nouba «dhil» et un «aâroubi» Ana el memhoun bel ghram et Tal dha sahar ya na. D’une section musicale andalouse au Centre culturel de Chéraga au début des années 1990, El Anadil est devenue une association en 2000. «Au début, j’ai fait la tournée des écoles et collèges pour chercher les belles voix. J’en avais sélectionné 75. J’ai commencé avec ces voix. Nous avons produit deux CD. En 2003, nous avons sorti une nouba «mjenba». Notre dernier album est un ensemble de madh. Ce soir, nous avons animé un concert avec la moitié des membres de l’association. Notre première classe est composée de 46 personnes», nous a exliqué Youcef Oueznadji.
Selon lui, Sid Ahmed Serri est le père spirituel et le président d’honneur de l’association. «Je suis son élève depuis 1973. Et les membres de l’association, que vous voyez ici, sont ses petits-fils», a-t-il ajouté. «Youcef Oueznadji arrive à obtenir des résultats sensationnels. Certains de ses élèves ne sont pas venus pour ce concert. Neuf d’entre eux ont obtenu le bac cette année et sont occupés à achever les démarches d’entrée à l’université. Youcef travaille quotidiennement et c’est lui-même qui forme ses élèves», a témoigné Sid Ahmed Serri. La relève, selon lui, ne peut être assurée qu’avec des personnes bien formées ayant un répertoire.
Tout compte fait, Sid Ahmed Serri, président de la Fédération nationale des associations de musique classique algérienne, aura été celui qui a le plus fait pour la préservation du patrimoine national en enregistrant, sur CD, l’ensemble de son répertoire entre 1998 et 2002 (le premier enregistrement de l’artiste remonte à 1955). «J’ai joué un peu au Don Quichotte. Depuis l’indépendance de l’Algérie, je n’ai pas cessé d’appeler à sauvegarder le patrimoine musical national. Certains chouyoukh étaient encore en vie. Il fallait en profiter avant qu’ils ne disparaissent. Cela n’a pas été fait. Des amis m’ont forcé la main pour que j’enregistre mon répertoire pour laisser quelque chose», a souligné modestement Sid Ahmed Serri. Présent également à Tlemcen, Noureddine Saoudi, chanteur, professeur à l’ensemble Fakhardjia puis membre fondateur de l’association Essoundoussia d’Alger, chercheur en préhistoire, s’est félicité de l’organisation des hommages à des artistes encore en vie. «L’hommage d’aujourd’hui est particulier.
Il vient à point pour couronner une carrière exemplaire, ponctuée par l’achèvement d’une symphonie qui est l’enregistrement de
l’intégralité de ce que la mémoire de Sid Ahmed Serri contenait comme trésor. Cette action est un des événements marquant de la vie artistique en Algérie », nous a déclaré Noureddine Saoudi. Il a estimé que Sid Ahmed Serri représente «la mémoire» de l’Ecole de la san’â d’Alger. «Il a parachevé un travail et nous a légué un patrimoine et une très grande responsabilité. La génération, dont je fais partie, a besoin de trouver d’autres voies pour s’exprimer. Il faut chercher ce qu’il y a lieu de faire dans le cadre de ce patrimoine enregistré, un travail orchestral, un travail de composition, de la recherche, etc. Le matériau existe, nous n’avons plus de problèmes de déperdition. Il faut trouver la voie pour entrer dans l’intimité de cette dimension musicale», a-t-il ajouté. Noureddine Saoudi se concentre ces derniers temps sur le domaine de la composition qu’il trouve fécond.
Posté Le : 22/09/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Fayçal Métaoui
Source : www.elwatan.com