Algérie

Kiosque arabe



Kiosque arabe
Par Ahmed Halli[email protected]/* */Avec l'Égypte, nous partageons l'incorrigible défaut d'être des naà'fs, voire des benêts, qui se croient super intelligents, et hyper malins, et qui se font gruger de ce fait à tous les coups. Souvenez-vous de l'explosion d'exultation nationale qui s'est emparée de nous lorsque nous avons roulé plus naà'fs que nous (les Égyptiens) dans la farine avec «l'épopée» d'Omdourman. Entre deux coups tordus, et dans l'attente d'une proche revanche ou vengeance, nous revenons entre nous pour nous extasier à la moindre occasion sur tel exploit ou tel miracle nés ici et donc fiables. Le dernier miracle, ce n'est pas que nous entrions dans la crise comme si c'était une grosse vague, sans trop de conséquences, mais que notre ingéniosité s'éveille, enfin, face au danger. Le diabète, ce fléau de l'humanité, et plus spécialement de la nôtre, dont seraient atteints plus de trois millions d'Algériens, du moins parmi ceux qui se savent atteints de ce mal. Alors que nous crions famine en matière d'insuline, voilà que de l'Algérie profonde, nous vient l'espoir d'un remède miraculeux, annoncé en grosses manchettes par un quotidien national. Le journal sponsor est encore assez crédible, et suffisamment convaincant pour que tout le monde commence à y croire, les malades et leurs proches, et même les hauts responsables de la santé.L'affaire est tellement sérieuse qu'on nous annonce l'arrivée de ce remède sur le marché, en octobre prochain, et pour rester dans l'air du temps, il s'appellera «Rahmat Rabbi», la divine miséricorde. Dans un pays où la superstition, propagée et entretenue par des marchands de versets, et de hadiths, a mis l'intelligence sous le boisseau, il en faut pas plus pour crier alléluia ! Et si, comme le pressentent de nombreux confrères, «Rahmat Rabbi» se révèle être à la longue une immense duperie, suscitant des espoirs insensés, on pourra toujours dire «Allah Ghaleb». Comme nous, les Égyptiens croient fermement en la prédestination, et en l'intervention de forces occultes, y compris dans le traitement des maladies dites incurables. Notre confrère Kamel Zait nous rappelle opportunément, dans le quotidien londonien Al-Quds, cette relation de famille, ce partage congénital qui nous sert de liant, et nous fait aimer davantage l'Égypte. Parmi tous les charlatans qui ont profité de la crédulité des Égyptiens, et les ont grugés et dépouillés sans vergogne, Kamel Zait cite le cas du fameux Docteur «Kefta». Sans doute une référence à ce chausson d'origine turque, dont la pâte feuilletée et rissolée peut dissimuler n'importe quels ingrédients, y compris les plus douteux, au milieu de la farce.Le douktour Abd-Al-Atti, surnommé Dr «Kefta», avait annoncé il y a deux ans l'invention de l'arme fatale contre le sida, et contre le virus de l'hépatite C, la formule «deux en un» chère aux marchands de shampoings. Le charlatan jouait sur du velours, et surtout en terrain conquis, puisque les Égyptiens se laissent prendre régulièrement à ce genre d'attrape-nigauds. Souvent présentés sous label religieux, ou carrément sous l'étiquette de «médecine prophétique», ces «remèdes» ont soulagé des millions d'Égyptiens de leurs économies. Comme pour «Rahmat Rabbi», la formule miraculeuse du Dr «Kefta» a bénéficié d'un battage médiatique, et du soutien du gouvernement. Kamel Zait signale, incidemment, que «l'inventeur» du médicament R.R. a même été reçu par le ministre de la Santé en personne, mais que son ministère a décidé de faire examiner le produit. Les résultats de cette expertise pourraient valoir à l'inventeur, et à ses sponsors une fin peu reluisante, comme celle qu'a connue leDr «Kefta», finalement démasqué. Cet imposteur était en réalité un technicien industriel, déjà condamné à la prison pour exercice illégal de la médecine. Notre confrère ironise également sur le choix du nom donné au pseudo-médicament contre le diabète : les malades qui en prendraient pourraient difficilement prétendre que la divine miséricorde n'a pas agi sur eux.Avec tout ce tapage, la disparition d'un grand savant, égyptien aussi, et prix Nobel, Ahmed Zawil, est passée quasiment inaperçue, et trop peu de confrères en ont parlé à l'exemple de Hadda Hazem, du quotidien Al-Fedjr. Ahmed Zawil est décédé mardi dernier aux États-Unis, et sa dépouille mortelle devait être transférée hier vers son pays pour y être enterrée, selon ses dernières volontés. Entre autres hommages rendus par la presse égyptienne, j'ai relevé celui du journaliste égyptien Ali Saad Al-Moussi, qui se désole qu'on n'ait pas trouvé mieux que les honneurs militaires pour accueillir le corps du défunt. Il rappelle que le chercheur égyptien a écrit un livre Le siècle de la science, en langue arabe, et donc destiné à ses compatriotes. «Mais nous sommes une nation qui ne lit pas», ajoute-t-il, et bien peu d'Égyptiens semblent être au courant de ce livre qui n'a rien à voir avec le domaine attitré d'Ahmed Zawil. voquant le terrain de recherche de Zawil, notre confrère note encore que l'illustre disparu avait été le premier à observer les débuts de la duplication cellulaire. «Alors que nous, dans son pays, et parmi les siens, ne détectons la duplication des cellules terroristes, qu'après l'éclatement d'une bombe, ou d'une ceinture explosive», ajoute-t-il.Où l'on apprend aussi que le scientifique égyptien qui était un grand admirateur de Nasser avait écrit, à l'âge de dix ans, une lettre au Président égyptien lui souhaitant de réussir à la tête de l'Égypte. Ce qui est extraordinaire, rapporte le quotidien Al-Misri-al-youm, c'est que Nasser a répondu à la lettre de l'enfant qu'était Ahmed Zawil, en l'encourageant à persévérer dans ses études. «Imaginez l'effet d'une telle lettre sur l'enfant», conclut le quotidien.


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