Algérie

Kidal toujours sous l'emprise du Mujao



Kidal toujours sous l'emprise du Mujao
Exécutions sommaires, rapts, banditisme armé et reprise des attaques djihadistes. La violence au nord du Mali reste perceptible, mais les éléments d'une rechute plus grave sont réunis.«La guerre au Mali n'est pas finie, contrairement à ce qu'on vous dit. L'enlèvement de nos collègues maliens, qui travaillent pour le Comité international de la Croix-Rouge, était prévisible, affirme, un haut responsable d'une ONG à Kidal. Nous avons eu des alertes et des recommandations pour éviter de nous déplacer dans la région depuis que des civils touareg ont été abattus à la sortie de la foire de Tamkoutate (Gao). Il est impossible de geler nos actions, essentiellement sur le terrain, car des citoyens en dépendent, et cela qu'importent les risques. Les populations de Kidal et les régions du Nord sont toujours otages des règlements de compte entre l'Etat malien et les groupes armés, politiques ou extrémistes», explique-t-il.En effet, mardi dernier, le Mujao (Mouvement pour l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest) a revendiqué l'enlèvement de l'équipe de la Croix-Rouge, qui se trouvait dans le Nord du Mali. Elle avait disparu depuis le 8 février. Parmi les cinq personnes figuraient quatre membres du CICR et un vétérinaire d'une autre organisation humanitaire. «Tous sont Maliens et étaient partis de Kidal pour regagner leurs bases à Gao», avait précisé dans un communiqué le chef de la délégation du CICR au Mali, Christoph Luedi. Près de Gao, à Tamkoutate jeudi 6 février, une trentaine de Touareg ont été exécutés froidement par des individus armés. Ils ont été présentés dans un communiqué du MNLA comme des membres du Mujao : «Un groupe de terroristes du Mujao à bord d'une dizaine de motos a attaqué et massacré vingt-cinq civils touareg sortant de la foire hebdomadaire de Tamkoutate. Suite à ce massacre terroriste, les troupes du MNLA ont engagé une course-poursuite contre ces assaillants.»Guerre asymétriqueLe journaliste malien Adam Thiam a publié un édito dans le journal Le Républicain où il interroge sur l'incapacité des autorités, à la fois maliennes et internationales, d'arrêter le Mujao. «La preuve est que les nouveaux prisonniers du Mujao sont des Touareg, autochtones de la région, précise-t-il. Il est vrai que le Mujao avait, auparavant, enlevé, à Gao, des diplomates algériens. La seule différence avec cette époque est que maintenant, cohabitent dans le Nord, l'armée malienne, les troupes onusiennes et les soldats français. On a beau être en guerre asymétrique, on ne peut éviter de se demander pourquoi le Mujao peut autant prospérer», écrit-il. Au Nord, la situation se dégrade, et ce, depuis fin 2013. Banditisme, attaques armées et tirs d'obus sur des bâtiments appartenant à l'armée et la gendarmerie malienne ont égrainé négativement le mandat d'IBK et retardent le retour de l'Etat et le redéploiement de son administration. «Même si la mission française Serval, soutenue par les forces militaires africaines a fait reculer les activités djihadistes dans le Nord, la population fonctionne de manière presque autonome, explique un officier de la gendarmerie de Gao. La confiance est rompue, puisque l'Etat a failli dans sa protection. Les dernières manifestations du peuple le prouvent, et ce peuple n'est pas totalement séparatiste ou autonomiste. D'autre part, il faut reconnaître que le gouvernement d'IBK ?uvre pour une réconciliation et exploite tous les programmes de réhabilitation, des services minimums?» AmbiguïtésTous les efforts déployés depuis plus d'un an par Serval et les partenaires militaires sur le terrain n'ont pas atteint l'objectif principal qui est la reconquête des grandes villes du Nord et l'aide au redéploiement progressif de l'administration malienne. L'Accord de Ouaga signé en juin dernier devait assurer la stabilité. Une stabilité compromise par la présence des groupes armés qui refusent de quitter la zone ou même de participer aux forums régionaux et au programme de dialogue national initié par l'Etat. «L'Accord a été obtenu au forceps. Si j'en avais critiqué la forme à l'époque, c'était pour dire que je comprenais, certes, la préoccupation de la communauté internationale pour la tenue immédiate d'élections et l'enjeu que cela avait dans tout processus de «peacebuilding», explique Bakary Sambe, enseignant, chercheur à l'Observatoire des radicalismes et conflits religieux en Afrique. A mon sens, tenir des élections à tout prix n'était pas non plus la solution.Le problème de Kidal est resté intact et cela a généré un conflit de perception du ?conflit malien?, entre, d'une part, la communauté internationale qui reste dans une optique de droit des minorités et la classe politique malienne qui perçoit ce statu quo comme une volonté d'aller vers une partition de leur pays, d'autre part. Il y a aussi des ambiguïtés qu'il fallait lever sur la résolution 2085 qui différenciait les groupes armés des organisations terroristes. Même si cela avait été très clair dans le libellé, l'opinion publique malienne et africaine ne l'a pas compris de la même manière. Aujourd'hui, c'est le méli-mélo complet entre l'activité des bandes armées, qui cherchent une alternative à l'économie de guerre, de trafics et de rançons, et les groupuscules touareg qui se multiplient au fur et à mesure que la représentativité se dispute autour d'un conflit devenu une sorte de gagne-pain pour beaucoup», explique-t-il.




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