Khelli l'bir beghtah Après plus d'un demi-siècle...

«Chassez le naturel, il revient au galop», dit l'adage. Il est des crimes qui n'ont jamais été élucidés vu la grande opacité dans laquelle ils ont été commis. Toutefois, le temps finit par résoudre tous les dilemmes et fait la lumière sur ces crimes, même après plusieurs années ou plusieurs siècles. L'histoire ne retient jamais le mensonge car la vérité s'impose toujours aux esprits du commun des mortels. L'un des crimes qui a endeuillé le pays d'un million et demi de martyrs est celui dont a été victime l'un des premiers architectes de l'Algérie indépendante. Durant des décennies le nom de Abane Ramdane a été occulté comme pour empêcher que la vérité sur ce crime pas comme les autres, ne soit révélée au grand public. Après plus d'un demi-siècle, les premières fuites sur cette affaire, et d'autres plus ou moins anciennes, ont commencé à poindre sur Internet. Reprises par certains titres, ces informations et les noms d'anciens moudjahidine de la guerre de Libération qui y sont cités ont poussé d'anciens leaders du FLN à briser le silence dans lequel ils se sont murés des décennies durant. L'une de ces personnalités n'est autre qu'Amar Benouda qui a indiqué qu'Abane a bel et bien été assassiné par ses amis au Maroc. Plus grave encore, l'un des chefs historiques de la rébellion nationaliste algérienne, en l'occurrence Lakhdar Bentobbal, a confié avant sa mort que Abane Ramdane a été tué par les membres du Comité de coordination et d'exécution CCE composé de plusieurs figures historiques dont Amar Ouamrane, Krim Belkacem, Abdelhafidh Boussouf et lui-même. Le débat de l'assassinat d'Abane Ramdane a été ressuscité à l'occasion du cinquante cinquième anniversaire de sa disparition. Si les auteurs présumés de ce crime sont partiellement connus aujourd'hui par le grand public, les raisons de cette disparition demeurent occultes. Certains disent que le meurtre d'Abane a été prémédité après qu'une photo du leader incontesté a été publiée par un quotidien italien, accompagnée de la légende suivante : «Voici le président du futur Etat algérien.» Est-il plausible que l'on assassine un leader de la trempe d'Abane à cause d'une banale photo légendée sur un journal étranger ' Cette thèse ne tient pas debout. En réalité, l'homme a été assassiné parce qu'il avait une tout autre vision d'un Etat basé sur des fondements pragmatiques et non théologiques ou autres. Ce ne sont que supputations, mais ce qui est sûr c'est qu'avec la mort d'Abane c'est l'ultime espoir de toute une communauté qui est mort. Au demeurant, cet homme dont le nom désigne l'un des plus grand palais de justice en Algérie demeure paradoxalement le premier Algérien à avoir souffert de l'injustice. Enfin, de quoi je me mêle ' Khelli l'bir beghtah.