Algérie

Juste un mot : sales histoires de poêles Culture : les autres articles



Ces derniers temps, les médias nous rapportent bien souvent, trop souvent même, des informations insupportables faisant état de personnes décédées dans leur sommeil, suite à l'inhalation de monoxyde de carbone. Ces informations, qui tombent chaque jour de façon tristement banale, ne nous surprennent plus. Elles ressemblent de plus en plus à celles liées aux accidents de la route. En un mot, elles font malheureusement partie de notre quotidien.
Pourtant, nous apprenons aussi que les émanations de ce gaz toxique et mortel proviennent d'appareils de chauffage ou de chauffe-bains défectueux vendus par des marchands informés, ce qui nous révolte absolument, c'est un véritable scandale et encore plus un crime. L'ami Vautier, portant le prénom de René, cinéaste courageux et visionnaire avait traité ce sujet il y a cinquante ans, dans un film magnifique ayant pour titre Les trois cousins, film qui donna l'occasion à l'autre ami, Mohamed Zinet, d'afficher tous ses talents de comédien. Comme nous apprécions beaucoup les courts métrages de Vautier pour leur simplicité et aussi pour leur façon de traiter la réalité. Ils abordent, en effet, des problèmes politiques et sociaux graves sans en avoir l'air et avec toujours le zeste d'humour qui convient, sans oublier la note poétique.
La dimension pédagogique et formatrice n'en est ainsi que plus forte. Nous sommes au début des années soixante, juste après l'indépendance de notre pays. Trois jeunes de chez nous, trois cousins, se retrouvent émigrés en France, dans la banlieue parisienne plus précisément. Ils ont été obligés de quitter le pays, qu'ils avaient pourtant contribué à libérer, poussés par le chômage et les difficultés de la vie. Ils arrivent à trouver du boulot comme man'uvres dans le bâtiment, secteur où ils sont exploités et sous-payés. Ils occupent une baraque dans un bidonville.
C'est l'hiver, un hiver très rigoureux. Nos trois amis souffrent du froid. Les vieux du village qui étaient passés par là avant eux durant la Deuxième Guerre mondiale, les avaient avertis. Ils avaient donc quitté le pays en emportant dans leur bagage le fameux «bourabah», que leur grand-mère avait tissé pendant de longs mois avec la meilleure laine. Cette épaisse et magnifique couverture aux couleurs éclatantes et joyeuses, le jaune, le rouge, le vert et le blanc. Mais le «bourabah» qui les protégeait si bien au pays ne leur était pas d'une grande aide ici. Nos amis ont toujours froid, surtout la nuit. Alors, ils se serrent la ceinture un peu plus pour faire quelques économies supplémentaires qui leur permettront d'acheter un poêle. Il ne fallait surtout pas, bien sûr, retirer un centime de la somme destinée au bled !
Le dimanche suivant, les cousins se rendent au marché aux puces pour acquérir un poêle d'occasion. Ils le trouvent chez un marchand ordinaire. Mais celui-ci le leur propose à un prix trop élevé pour eux. La somme d'argent dont ils disposent pour cet achat est insuffisante. Ils discutent et marchandent durant un long moment, sans résultat. Le temps passe et le marchand, impassible, ne veut pas diminuer d'un centime le prix de son poêle. Cependant, comme il a compris que ces trois jeunes naïfs en ont absolument besoin, il leur fait une proposition : «Je vous donne le poêle pour la somme que vous avez, mais je garde ici le tuyau d'évacuation. Vous viendrez le prendre lorsque vous aurez le complément. Et en plus, voyez, je vous fais un cadeau : trois kilos de charbon, un kilo pour chacun.»
Contents malgré tout, nos trois amis retournent à pied à leur bidonville, portant à tour de rôle le poêle sur leurs maigres épaules. Arrivés chez eux, ils le placent dans un coin de la baraque et l'allument. Quelques instants plus tard, la chaleur se répand dans la pièce. Ils préparent leur marmite dans un climat agréable, dînent tranquillement, puis décident de se coucher, car il faudra se lever de bonne heure pour aller au boulot. Ils installent leur lit le plus près possible du poêle, se recouvrent de leur grand et beau «bourabah» et s'endorment. Ils dorment tellement bien qu'ils ne se réveilleront plus ! Le monoxyde de carbone a fait son 'uvre durant la nuit. Le lendemain, on les retrouve raides et froids, tous les trois'


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