Algérie

Jusqu'à quand '



Le silence du président de la République est troublant. Troublant parce que l'Algérie gronde de l'Est à  l'Ouest. Troublant parce que les Algériens se demandent légitimement si ceux qui les gouvernent sont à  ce point sourds aux râles de la rue. Ils s'inquiètent de ce que rien ne vienne «d'en haut» pour les rassurer qu'on s'occupe véritablement d'eux.
Bientôt trois mois depuis les violentes émeutes de janvier, le Président s'enferme toujours dans sa tour d'ivoire, comme si de rien n'était.
Entre temps, des pays voisins ont connu des révolutions ; ils planchent désormais sur les meilleures feuilles de route qui puissent offrir à  leurs peuples le bien-être social et leur permettre de respirer l'air de la liberté sous la conduite de nouvelles têtes qui ne rappellent pas les mauvais souvenirs de la dictature. Mais où en sommes-nous dans tout cela ' La rhétorique officielle veut que l'Algérie ne soit pas la Tunisie ni l'Egypte, c'est-à-dire les deux pays où les révolutions ont bien réussi. Le message est limpide dans les bouches de Belkhadem, Medelci et Ould Kablia : le pouvoir, en Algérie, est suffisamment fort pour ne pas àªtre changé par la rue. C'est, à  quelques détails près, la même rengaine que chantait Moubarak.
Question  à un dinar : est-il politiquement sain d'établir un rapport dialectique entre la force supposée d'un pouvoir et la revendication citoyenne d'un changement, fut-il pacifique '
Dialectique   Le bon sens voudrait que la sagesse populaire soit décryptée non pas comme un signe de faiblesse des Algériens, mais comme la crainte légitime d'un basculement aux conséquences difficilement imaginables.
Il serait suicidaire de ne pas prendre la mesure du climat délétère qui s'est emparé de notre pays. Un signe qui ne trompe pas : la protestation sociale est entrée même dans les «18 mètres» de la Présidence où pas moins de sept sit-in ont été organisés en moins d'une semaine.
C'est que, à  la charge des partisans du discours lénifiant, tout, absolument tout est transformable en protestation et même émeute en Algérie. Comme une cocotte minute, nos compatriotes tempêtent pour le logement, contre le relogement, pour les fruits, contre les prix, pour les billets de stade, contre les factures de Sonelgaz…
Citadelle imperméable imprenable...
Tout cela n'est évidemment pas une pathologie. C'est une colère saine contre une conduite malsaine des affaires du pays.
Quand on dénonce la distribution népotiste du logement, quand on crie contre le squat de l'espace public par les marchands de l'informel, quand on est remballés d'un établissement de santé publique, cela s'appelle une revendication politique, n'en déplaise à  Belkhadem, Ould Kablia et Medelci, qui croient réinventer les sciences politiques. Si les enseignants, les médecins, les sapeurs-pompiers, les étudiants et même les non-voyants crient leur douleur, c'est parce qu'ils souffrent.
Et c'est signe que les responsables de leurs secteurs respectifs ont lamentablement échoué dans leur diagnostic.
Réduire autant de poussées d'adrénaline à  de simples revendications sociales et politiquement incolores dénote au mieux d'un profond mépris, au pire d'une cécité politique.
Il est un fait que les Algériens se sentent complexés par le vent de liberté qui a soufflé sur la Tunisie et l'Egypte. Peut-être que ceux qui nous gouvernent ne le perçoivent pas ou le feignent-ils, de là où ils sont.
Mais jusqu'à quand continueront-ils à  considérer l'Algérie comme une citadelle imprenable pour les forces du changement et imperméable aux coups fourrés qui pourraient venir même de l'extérieur ' Ce qui arrive en ce moment à  la Libye, anesthésiée par El Gueddafi, devrait nous secouer.
L'Algérie est un immense pays riche qui suscite des convoitises. Elle est au-dessus de tout. Il serait dommage de la gérer aussi légèrement.
 


redv depose dossier visa
BOUABDALLAH ABDELGHANI - professeur - MSILA, Algérie

25/03/2011 - 12849

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