Présentation Un roman où la poésie parvient à peine à effacer les dures conditions de vie des Algériens. Un roman où l’illusion est reine, où les apparences sont faites pour être trompeuses, où les sens guident les hommes et troublent les lecteurs. Voilà ce que nous propose Messaoud Nedjahi dans son nouveau roman, dans lequel la fiction est rattrapée par la réalité, elle-même magnifiée par les rêves. Le lecteur est perdu, emporté, envolé. Il s’enivre, se révolte, il prend parti, il est surpris. Choqué. Et en redemande.
Le destin de Yugwerten, c'est celui de la passion et de la poésie, de l'indépendance et de la rébellion, mais surtout c'est une vie placée sous le signe de la Liberté. C'est le destin de Jugurtha, celui de l'héritier du coquelicot, un homme mystérieux, enthousiaste, idéaliste aussi, qui vit pour ses rêves. Un homme qui verra ses utopies se confronter à la réalité, la cruauté se substituer à ses fantasmes, et l'onirisme s'emparer de la vérité, pour la sublimer, peut-être.
Préface Jugurtha (160 avant J.C./104 avant J.C.)
Grand roi berbère, Yugwerten régna sur la Numidie de 118 à 105 avant J.C. en reprenant l’oeuvre de son grandpère Massinissa. Il s’opposera à tout envahisseur étranger. Sa guerre contre Rome fut une guerre pour la liberté. Toutes les libertés dont il reste désormais le symbole. Tilelli !
— Dis-moi Malaghi ! As-tu revu le fossoyeur(1) depuis sa complainte ?
— Rien qu’hier, oui ! Il ne fossoie plus. Maintenant il écrit l’histoire des héros. L’Aurès est bien vivant. Il n’agonise plus.
— Comment arrive-t-il à écrire leur histoire ? Il y aurait donc des écrits ? à quoi se réfère-t-il, sinon ?
— D’abord à son coeur, puis en interrogeant les ombres fixées sur les pellicules orales des veillées d’hiver que rien ne peut venir altérer. Et puis n’oublions pas qu’il est aidé en cela de Iwal, l’Ombre-Amie qui défie le néant, de la Rose des Allées Bocca qui a retrouvé tous ses parfums et enfin de Tamerwant cette Reine chauve, maîtresse des flots et bien-aimée du disquaire de La Rivière. Des alliées plus que précieuses.
— En effet ! Mais toi, qui es-tu Malaghi ?
— Demande à mon cousin, lui seul sait qui je suis. Malaghi ? Il me suffit d’avoir eu ce plaisir de l’avoir connue.
C’est une fille qui patine et glisse sur le miroir de la vie comme moi, je sautille sur le sable brûlant d’Arabie. Elle a su en quelques mots me redonner ce que j’avais perdu : l’intérêt pour ce que je fais.
Elle me tira de mon lit d’amertume, un présent morne et morose et me ramena à cette date du baiser fatidique. Elle me fit retourner dans le néant auprès de mon ombre-amie, pour que je suive une dernière fois le cours de la rivière des amants et y boire de son miel. Ce fut là qu’elle me dit son secret pour me faire revenir à la vie.
Elle a connu Iwal et cela me suffit. Malaghi ? Je ne l’ai jamais vue. Peut-être ne la verrai-je jamais. Elle est un fantasme, une réalité inconsistante, une image virtuelle qui refuse ma vérité. Elle est elle et aucune autre.
Peut-être était-elle dans le vrai quand elle me parlait de douleur ? Peut-être avais-je tors de faire de la souffrance une joie simplement éphémère ?
Seule la liberté avait su nous unir, amis dans les brumes matinales de notre Aurès natal.
Un jour peut-être, là-bas, tout là-bas du côté des hauteurs d’où se lève le soleil, non loin de Kimel qui la fascine, la retrouverai-je et l’aimer sur la montagne du souvenir. Ne me l’avait-elle pas promis quand dans mon rêve éveillé, elle s’était matérialisée ? Son rire joyeux me manque déjà. Je l’entends qui se fond, se confond à la pénombre lointaine. Il fait déjà jour par ici, alors que chez elle, la nuit ne fait que commencer.
De Malaghi, je pourrai vous en parler et vous dire même plus. Seulement alors que me restera-t-il de son souvenir ? Je voudrai en garder une image, un secret. J’ai d’abord à interroger ma folie.
(1) Lire « La Complainte Du Fossoyeur » dans « Aurès Insolite » du même auteur, chez le même éditeur.
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Posté Le : 12/04/2007
Posté par : nassima-v
Source : www.dzlit.free.fr