Algérie

Jours d'après: le putsch en Egypte vu du Maghreb



Comment la crise égyptienne est-elle perçue dans les pays du Maghreb ' De l'inquiétude, des appréhensions en Tunisie et au Maroc. En Algérie, ce sont des mauvais souvenirs qui remontent.La crise égyptienne a rappelé de mauvais souvenirs aux Algériens. Les lectures souvent opposées de la situation en Egypte évoquent souvent le tournant de 1992 avec l'arrêt du processus électoral et la plongé dans la guerre civile ou la « décennie noire ». Entre ceux qui parlent de « coup d'Etat » contre Mohamed Morsi et ceux qui évoquent un « deuxième acte de la révolution » se profile en background les deux visions opposées de la crise en Algérie. C'est le thème dominant des internautes algériens sur les réseaux sociaux qui évoquent avec un certain effroi la possibilité d'un «scénario algérien » pour l'Egypte. D'autres contestent la comparaison entre la situation algérienne et égyptienne.
Certains nuancent les comparaisons en faisant valoir que contrairement aux égyptiens, les islamistes algériens ne sont jamais parvenus au pouvoir, le second tour des élections n'ayant pas eu lieu. Les divisions d'hier se retrouvent un peu dans le regard sur la crise égyptienne. C'est en regardant en arrière que les algériens se placent pour ou contre le coup d'Etat égyptien. Si pour certains, le coup d'Etat participe à légitimer l'action qu'ils ont pu mener dans le passé, d'autres le perçoivent comme un catastrophe pour le peuple égyptien. «L'Egypte s'engage sur la voie de la transition politique après l'éviction du président Morsi. Mais cette transition qui s'amorce ne sera pas de toute repos » titre le quotidien national algérien El Moudjahid.
Mais plus la situation s'aggrave et plus le pessimisme s'installe. La classe politique algérienne ne s'est pas trop prononcée sur la crise égyptienne. On aura remarqué la prise de position en faveur de la destitution de Morsi par le Parti des Travailleurs qui s'était pourtant opposé en 1992 à l'arrêt du processus électoral en Algérie. Le MSP (mouvement de société de paix), qui est membre de la mouvance des Frères Musulmans, a été le plus clair à dénoncer un coup d'Etat. Il a tenté, le 8 juillet, d'organiser une manifestation de soutien devant l'ambassade d'Egypte, rapidement avortée par l'intervention de forces de l'ordre. Le 12 juillet dernier, c'est un meeting qui a été organisée devant le siège du parti. Abderrazak Mokri a dénoncé « l'agression » dont sont victimes les Frères Musulmans en Egypte ». Selon lui, les auteurs « du coup d'Etat contre la légitimité, qui ont entraîné l'armée dans cette aventure, ne sont pas conscients qu'ils l'entraînent dans la division et à son affaiblissement ». « Les véritables démocrates dans le monde arabo-musulman dont les mouvements islamistes » a affirmé Makri. Certains internautes algériens nMe sont pas privés de rappeler à Makri, sur sa page Facebook, que le MSP s'est mis du côté de l'armée en 1992 après l'annulation du processus électoral.
Une Tunisie divisée
A contexte identique, la population tunisienne ne peut s'empêcher de voir en les événements actuels égyptiens un écho. Que ce soit les tunisiens ou égyptiens dans l'opposition, ils reprochent à leur gouvernement de vouloir mettre en place un régime liberticide et de plonger le pays dans un importante crise économique. Une partie du peuple tunisien était très enthousiaste dès les premiers événements en Egypte en manifestant dans la rue.
Le mouvement Tamarrod contre-Morsi en Egypte a donné naissance à un mouvement semblable en Tunisie dès début juillet. Il ne semblait pas être pris au sérieux, mais l'assassinat, jeudi, d'un député d'opposition, Mohamed Brahmi pourrait le relancer sur d'autres bases. Alors que la Tunisie était le berceau du printemps arabe, une franche de la population serait cette fois-ci prête à suivre le mouvement né en Egypte. Le mouvement a d'ailleurs lancé une collecte de signatures le 4 juillet dernier pour dissoudre l'Assemblée nationale constituante (ANC) et d'autres institutions.
Pour le chroniqueur et écrivain tunisien Hatem Bourial au Réseau de l'information, dès début juillet « c'est tout une onde de choc qui traverse la Tunisie, un pays où de nombreuses voies avaient à s'inspirer du mouvement égyptien Tamarrod ». Pour le bureau exécutif de l'union générale tunisienne du travail (Ugtt), dans un communiqué, dès le 4 juillet adresse ses félicitations au peuple égyptien qui a si imposer sa légitimité et sa volonté grâce à sa détermination et la clarté de ses revendications. Du côté de l'opposition politique le porte-parole d'Al Massar, Samir Bettaieb, alors contacté par le HuffPost Maghreb, espérait que ces événements « influencent positivement la situation en Tunisie».
L'activité des réseaux sociaux en Tunisie s'affiche en grande majorité également contre-Morsi, toutefois la Tunisie reste divisée. Les partisans de la coalition au pouvoir s'affichent naturellement pro-Morsi et descendent dans la rue pour manifester leur soutien le 13 juillet encouragés par le parti Ennahdha.
Par l'intermédiaire de son leader Rached Ghannouchi, le parti au pouvoir en Tunisie, condamne « un véritable coup d'Etat consacrant la division du peuple égyptien. Mais il écarte un scénario à l'égyptienne en Tunisie affirmant que la configuration politique n'est pas la même. La situation est Egypte est source d'angoisse pour les islamistes tunisiens.. Rached Ghannouchi a indiqué le 23 juillet que son mouvement menait une médiation auprès des islamistes d'Egypte afin « de sortir d'une crise exacerbée dont les conséquences seront catastrophiques, non seulement sur l'Egypte, mais sur les pays du printemps arabe ».
Inquiétudes profondes au Maroc
Pour les autorités marocaines, l'agitation égyptienne dès fin juin suscite de l'appréhension. Certains s'alarment comme le chercheur marocain Khalid Chégraoui dans le journal en ligne Le 360 pour qui « la situation est catastrophique » avant même la destitution du président Mohammed Morsi. Les Marocains ont peur que le chaos se répande en Egypte. C'est donc plutôt dans un état d'esprit conservateur que la population marocaine aborde les récents événements égyptiens. Mais la menace de contagion suscite toutefois la peur au Maroc, surtout pour le P.J.D, parti de la justice et du développement, qui a tardé à communiquer sur le sujet. Ce n'est que le 10 juillet que le parti condamne officiellement « le coup d'Etat militaire qui a provoqué la chute du premier président élu de l'histoire de l'Egypte ». Abdellah Baha, bras droit du leader du PJD Abdellah Benkrane a estimé que les erreurs de Morsi ne pouvaient justifier le coup d'Etat. S'en suivront les parlementaires du parti dans un communiqué dénonçant que « ce coup d'Etat représente une violation manifeste de tous les principes et us démocratiques » et s'inquiètent des conséquences que ces événements pourraient avoir car « cet antécédent servira de justification au renversement d'autres chefs d'Etat démocratiquement élus ». Le PJD redoute le chaos, d'autant plus que sa position au gouvernement est devenue plus fragile ayant dû faire face à la démission de membres de l'Istiqlal le 9 juillet dernier, alors deuxième force politique du pays ainsi qu'à une relation de flottement avec le Palais royal.


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