On dit qu'en règle générale, la jurisprudence n'acquiert de force réelle satisfaisante, pour tous, qu'après 20 à 25 années de pratique de la loi. Donc, tout au long de ces années, il y a, bien sûr, des hauts et des bas, des satisfactions comme des lacunes. Et, au bout de ces années, un fonctionnement à peu près normal. Pour notre part, dans notre pays, si l'on prend pour date de départ la loi d'avril 1990, relative à l'information, on peut dire que nous sommes encore bien loin du compte. A peine 17 ans de pratique! Et encore! Faut-il souligner que la loi a été presque entièrement mise entre parenthèses à partir d'octobre 1993 après la suppression du Conseil supérieur de l'Information qui constituait l'épine dorsale de la loi. Ce n'est que depuis très peu, depuis quelques mois, qu'elle a été «officiellement» déterrée, personne n'osant, par les temps qui courent, se risquer à proposer un nouveau texte aux députés et sénateurs, le «recul» étant garanti. Devant le «trou noir» créé, avec ses effets négatifs que la situation sécuritaire a surmultiplié, le texte sur l'état d'urgence n'ayant pas donné de bons résultats (le concept d'information sécuritaire n'ayant pas été bien cerné par les uns et compris par les autres), les journalistes ont tenté alors, avec l'aide et la bénédiction du ministre de la Communication de l'époque, faut-il le préciser, de s'auto-discipliner avec une charte de l'éthique et de la déontologie et le Pouvoir s'est vu «obligé», sans demander quoi que ce soit aux journalistes, de recourir à l'amendement de certaines dispositions du code de procédure pénale. Mais, tout cela est resté globalement insuffisant ou inefficace. La preuve! Nous en sommes à discuter encore et encore de la problématique des droits et des devoirs du journalisme. C'est vrai, nous sommes des perfectionnistes et comme tous les perfectionnistes, nous sommes un peu irréalistes. Perfectionnistes, c'est tout à notre honneur mais le risque est grand de nous voir produire beaucoup trop de beaux textes, à la longue inutiles. Irréalistes, c'est beaucoup plus grave, car nous perdons du temps à nous braquer sur l'accessoire et à oublier l'essentiel. Et, quand la manipulation ou la manoeuvre politicienne s'en mêle, le résultat n'est jamais brillant. I / A MON SENS, l'essentiel, c'est de SAVOIR, une bonne fois pour toutes, ce que l'on veut édifier comme Système national d'information et de communication - Libre d'abord et responsable ensuite - Responsable d'abord et libre après Il est évident, pour moi en tout cas, que quelles que soient les expériences, la deuxième option est dépassée et relève d'un autre temps et d'une autre forme de gouvernance des hommes et des idées. Et, c'est la première option qui est celle qui coule de source, notre pays ayant choisi la Démocratie pluraliste et républicaine... tout en prônant dans le discours et l'exemple politiques, le discours scolaire et formateur, le rôle de plus en plus grand joué par la Responsabilité sociale (dans la liberté) du communicateur (journaliste et autres) II/ A MON SENS, l'essentiel, c'est de SAVOIR ce qu'il faut comme codification de cette liberté et de cette responsabilité. Tous les pays démocratiques, tous les pays développés la possèdent sous une forme ou une autre. Mais, là aussi, il faut choisir son système: - A l'européenne, par le biais d'un ou de plusieurs textes de lois et /ou règlements - A l'anglo-saxonne, de manière éparpillée et laissant le temps et les évènements construire la codification Il est évident, pour moi en tout cas, que quelles que soient les expériences, la 1ère option reste pour notre pays, pour l'instant, la meilleure. Pour deux raisons: a) Permettre à nos juges, à nos journalistes, à nos décideurs politiques, à nos gestionnaires, à nos citoyens et à nos avocats, d'«apprendre» et de maîtriser les textes réglementaires de cet aspect malgré tout nouveau de notre vie; b) Permettre une recherche plus facile des règles et des dispositions qu'il faut appliquer (donc gain de temps et d'efficacité, moins d'injustice due à la mauvaise interprétation ou à l'interprétation libre) III / A MON SENS, l'essentiel n'est pas de faire les 10, 15 ou 20 droits et devoirs des journalistes (qui sont des commandements universels connus), mais de SAVOIR comment faire en cas d'irrespect des droits par certains et d'irrespect des devoirs par d'autres. Trois options se dégagent: - En laissant la profession s'organiser elle-même et faire respecter les règles... ce qui existe.... et c'est ce qui n'a pas donné de bons résultats avec la Charte de l'éthique et de la déontologie d'avril 2000 et son Conseil supérieur de l'éthique (qui s'est vite retrouvé «abandonné» par les intéressés et les concernés, sans pouvoir, sans soutien et sans moyens). - En confiant à l'Etat le pouvoir de gérer directement la profession... ce qui sera rejeté par une bonne partie de la profession et... ce qui est contraire à l'esprit démocratique et c'est ce qui facilite les manoeuvres politiciennes circonstancielles. - En mettant en place une commission mixte professionnelle (éditeurs élus ou désignés par leurs pairs et journalistes élus qui seront la grande majorité) plus, peut-être, des magistrats désignés (1 ou 2, pas plus!), plus peut-être, des personnalités de la société civile comme des enseignants (1 ou 2, pas plus!). Cette commission serait autonome, à présidence tournante, bien soutenue matériellement, en toute transparence, par l'Etat et au niveau du seul fonctionnement (Secrétariat par exemple), les membres étant tous volontaires et surtout, surtout, non rémunérés. Afin qu'ils ne se transforment pas en haut-fonctionnaires préoccupés seulement par les avantages de la fonction! Elle sera chargée du suivi de la mise en oeuvre des droits et des devoirs des journalistes, AINSI QUE (la nouveauté est là!) de l'attribution ou du retrait de la carte professionnelle nationale de journaliste, une carte qui ouvrirait droit à divers avantages, cela va de soi, dont celui du droit au travail dans la dignité, dans la liberté et avec responsabilité. Il est évident, pour moi en tout cas, que cette troisième option qui est innovante, reste la plus acceptable et la mieux à même de sortir de l'impasse. De toutes façons, les deux premières ont été déjà essayées et ont, toutes les deux, échoué. Ce type de commission qui relève de la forme mixte, entre la régulation administrative et l'auto-régulation, et forme qui est toute transitoire (en attendant que le corps professionnel «apprenne» à se prendre en charge totalement et que l'Etat «apprenne» à ne plus se mêler des problèmes de gestion quotidienne des métiers), peut être étendue à d'autres domaines de la presse et de la communication: contrôle de la publicité, aide de l'Etat à la presse...
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Posté Le : 03/05/2007
Posté par : sofiane
Ecrit par : Belkacem Ahcene-Djaballah : Professeur Associé A l?Université, Journaliste Indépendant
Source : www.lequotidien-oran.com