Algérie

Jijel : les "jeux de cornes" font jouer les prolongations aux fêtes de l'Aïd El-Adha



Jijel : les
Plusieurs jours après les fêtes de l'Aïd El-Adha, les moutons sacrifiés, dépecés et pour une large part déjà digérés font encore du bruit par cornes interposées, a-t-on constaté durant le dernier week-end un peu partout à travers les quartiers de la ville de Jijel.Des garçons de tous âges s'affrontent dans de curieux "combats de cornes" durant les heures de l'après-midi, privant les adultes de sieste durant ce chaud week-end d'un été qui n'en finit pas de s'étirer.
Parés de leurs plus beaux atours, et après s'être régalé de grillades et autres spécialités culinaires préparées au moins une fois l'an durant les jours qui suivent la célébration solennelle de l'Aïd, les enfants s'en donnent à c'ur joie et n'ont cure des lamentations des parents.
Ces bruyants jeux de cornes qui semblent ressusciter les animaux sacrifiés, ont toujours fait partie des joies de l'Aïd El-Adha, soulignent des jijeliens interrogés par l'APS.
Rires, applaudissements et parfois disputes accompagnent les coups secs et répétés, corne contre corne, que les enfants s'administrent jusqu'à la chute ou la fracture de la corne "ennemie".
Au quartier des "64 logements" d'Ouled Aïssa, sur les hauteurs de la ville, les enfants jouent à perdre haleine au milieu d'un décor de cité populaire où les toisons fraîches sèchent au soleil et où les dentelles de crépines pendent dans les balcons aux côtés de ces étranges "ballons" que forment la panse et le gros intestin du mouton, salés et gonflés d'air comme le veut la coutume.
Ils y sècheront ainsi jusqu'à l'Achoura, fête durant laquelle les foyers jijeliens préparent la traditionnelle Bouïcha (panse et gros intestin de mouton farcis d'un mélange de semoule, d'huile d'olive et de fruits secs).
Un jeu qui rend les adultes nostalgiques
"Juste après le sacrifice, les cornes sont évidées puis flambées, avant d'être fixées sur des pieux", se souvient Hamid Othmani, technicien supérieur en bâtiment qui, pour ne plus jouer aujourd'hui n'en dédaigne pas moins d'applaudir avec enthousiasme ses neveux et autres petits garçons du voisinage "chargeant cornes en avant à la manière des preux chevaliers du Moyen-Age".
Tenu par les garçonnets comme une batte de hockey, la corne, prolongée d'un long bâton, attaque la corne de l'adversaire en rasant le sol. Le choc qui s'ensuit peut être violent mais ce qui est recherché c'est le "décrochage" de la corne de l'adversaire.
Très populaire, ce jeu "se poursuivra encore durant toutes les heures de loisirs, jusqu'à ce que nous soyons à court de munitions", expliquent les petits lutteurs.
"Les enfants semblent imiter par ce jeu les adultes qui, la veille de la fête de l'Aïd El-Adha, poussent leurs béliers à s'affronter sur les terrains vagues, avec des paris à la clé", analyse pour sa part une mère de famille, peu enthousiaste.
"Lorsqu'il n'y avait plus de cornes, le jeu de Lahchicha prenait la relève", se souvient de son côté Mohamed Bousseloua, marin pêcheur quinquagénaire qui aime à narrer les jeux saisonniers qui ont bercé son enfance dans le quartier de Kern el Djebel sous le cimetière de Sidi Ahmed Amokrane.
Après les premières pluies d'automne, les enfants ramassaient des bottes d'une plante appelée "Medjir". Ils confectionnaient alors une balle élastique à souhait, avec laquelle ils organisaient des compétitions de jonglage.
"Ceux qui arrivaient à jongler en comptant jusqu'à 100 étaient les meilleurs et les As des As pouvaient tenir jusqu'à 150", ajoute encore l'homme de la mer perdu dans ses souvenirs.
Mais cela, comme les lâchers de taureaux aux cornes fleuries sur la colline des Beni-Kaïd, les cantiques de l'Achoura et les comptines chantées sur les balançoires, font désormais partie d'un folklore de plus en plus oublié aujourd'hui, regrettent les plus vieux habitants de la ville.


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