Algérie

«Je n'ai rien vu. On ne m'a rien dit !»


Le tribunal criminel de Blida poursuivait les auditions, hier, dans l'affaire Khalifa. Plusieurs témoins ont défilé sans apporter cette fois encore du nouveau.Abla Chérif - Alger (Le Soir) - L'un de ces témoins n'est autre que Abou Djerra Soltani, en tant que témoin et en qualité d'ancien ministre du Travail et de la sécurité sociale de l'époque.
Le tribunal lui dirige plusieurs questions toutes destinées à éclairer sur l'origine des décisions prises en faveur des dépôts qui ont été effectués dans la Khalifa Bank. «Les différentes caisses avaient toutes un caractère particulier, dit-il, chacune d'entre elles était régie par des lois et un conseil d'administration, à l'exemple de la Cnas, sur les 29 membres de son conseil d'administration, 18 étaient affiliées à l'UGTA, et deux autres à la Fonction publique».
«Je n'ai pas été informé des décisions relatives aux dépôts d'argent à la Khalifa Bank», poursuit-il avant d'être relancé par la cour qui lui demande alors si les commissions du ministère à la tête duquel il se trouvait alors assuraient une mission de surveillance au niveau de ses caisses.
«La mission de surveillance incombe aux directeurs des caisses, et c'est eux qui doivent aussi informer le ministre lorsque des situations irrégulières se présentent (...) aucune des caisses ayant procédé à des dépôts à la Khalifa Bank ne m'ont informé préalablement de leur décision» répond l'ancien ministre. L'ancien directeur de la Caisse nationale des retraites (CNR) est appelé à la barre. «Je vous ai adressé une lettre pour vous informer du fait, dit-il, la loi est claire à ce sujet, si aucune réponse n'est transmise au bout de trente jours, le Conseil d'administration peut entamer la concrétisation de la décision prise».
Abou Djerra Soltani est appelé pour s'expliquer : «Je n'ai reçu aucune lettre m'informant d'un quelconque transfert de l'argent ou de son dépôt, si cela avait été le cas, j'aurais pris les dispositions nécessaires (...) ce qui s'est produit alors est grave, les caisses étaient dans une situation d'instabilité, cet argent a été déposé par calcul (...) il y avait huit caisses affiliées au ministère du Travail, mais toutes les décisions relevaient du Conseil d'administration, le ministre ne pouvait même pas mettre fin aux fonctions d'un directeur».
Le procureur de la République prend le relais : «La Cnas a déposé mille milliards de centimes à la Khalifa Bank et la CNR mille milliards.» Abou Djerra Soltani a répondu : «Certaines de ces caisses avaient des problèmes et l'Etat était intervenu pour les aider, l'une d'elle n'est autre que la CNR, lorsque j'ai appris qu'elle avait effectué un dépôt à la Khalifa Bank, j'ai été très surpris, c'est très grave, si je l'avais appris, j'aurais agi . Le procureur insiste : «Vous n'avez pas été informé '» Le témoin persiste : «Je n'ai ni recu ni envoyé de lettre».
L'ancien ministre du Travail est la seule haute personnalité à comparaître. Les avocats déplorent d'ailleurs plusieurs absents : Mohamed Djellab, ancien ministre des Finances, Mohamed Laksaci, ancien gouverneur de la Banque d'Algérie, sont réclamés. Le tribunal annonce que la demande est acceptée et que dans le cas où ces derniers sont dans l'incapacité de se déplacer, il sera fait lecture de leurs dépositions.
Les auditions se poursuivent, celle d'une victime qui regrette de ne jamais avoir pu récupérer les cinq millions de DA déposés, puis celle de l'ancien directeur adjoint de la Khalifa Bank à Didouche-Mourad. Comme tous les anciens responsables de cette banque qui se sont succédé, il affirme qu'il n'y a «jamais eu de trou financier». Toutes ces affirmations sont cependant contredites par l'expert, Hamid Foufa, qui affirme au contraire que des trous financiers avaient été détectés dans les neuf agences Khalifa et la caisse principale. Il fait savoir qu'en 2005, «ce trou» était de 3 milliards de DA.
«L'argent sortait des neuf agences, mais il disparaissait en route (...) il n'y avait pas d'irrégularités dans la comptabilité, mais les caisses étaient vides (...) si l'inspection de la Banque centrale avait accompli son travail de surveillance, l'affaire Khalifa n'aurait jamais existé».
Des témoins affirment, eux, avoir opté pour la Khalifa Bank en raison du taux d'intérêt élevé qui y était pratiqué. C'est le cas de l'antenne de la Cnas de Koléa qui a déposé cinq millions de DA, du responsable du Conseil d'administration de la mutuelle de la DGSN. Sur les 225 millions de DA déposés en 2001, seuls trente millions de DA, ont cependant pu être récupérés, affirme ce dernier.
Abdelaziz Khalifa, promoteur et frère du principal accusé comparaît lui aussi. Il se défend de toutes les accusations qui lui sont portées et notamment d'avoir utilisé l'argent du crédit accordé par la BDL de Staouéli pour fonder la Khalifa Bank. Ce dernier affirme qu'il s'agissait d'un financement destiné à un tout autre projet dans le domaine pharmaceutique.
A. C.
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