Algérie

"Je fais appel aux éditeurs..."



Rencontré durant la 10ème édition Fibda où il signait ses oeuvres au stand Dalimen, le père de M'Quidech est un caricaturiste humble et généreux. Du haut de ses 76 ans, notre bédéiste est considéré comme le doyen des dessinateurs de presse de l'Algérie indépendante. Il nous livre ici ses impressions sur l'état de la bd actuelle, ainsi que son sentiment sur la situation des bédéistes en Algérie. Pas très reluisante. A lire.L'Expression: Pour la nouvelle génération qui ne vous connaît pas, qui est Ahmed Haroun'
Ahmed Haroun: Je suis dessinateur depuis les années 1960. J'ai été un des pionniers dans le domaine de la bd en Algérie. On était dans un journal, on ne faisait pas seulement de la bande dessinée, mais des dessins de presse aussi. On y illustrait des articles. Par la suite, en 1967, il y avait un certain Madou, que Dieu ait son âme, qui travaillait à la Sned et m'a fait appel. Il m'a dit qu'il voulait faire paraître une bande dessinée algérienne. Il m'a demandé si je connaissais des dessinateurs. A l'époque, il n'y en avait pas beaucoup, il y avait Slim, Maz... Il a fait une annonce sur le journal. Cela a attiré les jeunes talents qui avaitent un don pour la bande dessinée. Il y eut une rédaction au niveau de la Sned. Il a formé ces jeunes. Il y a toute une technique pour faire la bd. On peut la comparer à un film. Il y a un scénario, un personnage, des figurants etc. Ils ont formé les jeunes. Comme j'étais l'aîné, on m'a chargé des créer le personnage de M'Quidech. Au moment où ces jeunes dessinateurs ont été formés, c'est-à-dire quelques mois après, chacun a créé un personnage, il y avait Bouzid, Richa... et donc plusieurs histoires dans M'Quidech. On a commencé à éditer la première bande dessinée algérienne en 1968. A l'époque ça valait un dinar. On a démarré comme ça. C'est comme ça que la bande dessinée est venue en Algérie. M'Quidech a paru pendant 12 ans régulièrement, puis s'est arrêté. Chaque dessinateur a trouvé un boulot ailleurs. A l'époque, il n' y avait pas beaucoup de journaux, juste El Chaâb, El Moudjahid et puis Algérie Actualité donc, on essayait de collaborer avec tous ces journaux jusqu'à, il y a 10 ans de cela, avec la création du Fibda et où on nous a fait appel. A ce moment-là, on s'est tous manifestés. C'était l'occasion ou jamais. On se disait que le flambeau de la bande dessinée allait être rallumé. On était là et on a créé une revue spéciale qui s'appelle El Bendir. On était une équipe. Comme j'étais le créateur de M'Quidech, je me suis dit, au lieu de créer un personnage nouveau pour cette occasion je vais reprendre mon personnage qui dormait depuis presque 40 ans dans le tiroir. Il a paru dans les premiers numéros d' El Bendir. J'ai fait un recueil, j'ai sorti un livre. Le Fibda est intéressant à partir du moment où on forme des jeunes, car c'est la relève. Il y a des concours qui s'organisent pour les pré-scolaires, les jeunes talents. On les récompense par des prix. On a vraiment encouragé la bande dessinée en Algérie.
Vous pensez quoi maintenant que nous sommes à la dixième édition du Fibda'
On est effectivement à la dixième édition du Fibda. Je demande une chose, c'est de passer à une autre étape, c'est de pouvoir aider ces jeunes à publier leurs oeuvres. Celui qui aime la bande dessinée vient ici au Fibda, il découvre la bande dessinée algérienne et internationale mais en dehors du Fibda, on ne la trouve pratiquement pas...
Justement le Fibda, c'est une très belle vitrine. Mais est-ce que ça se vend bien'
Dans les kiosques on ne trouve pas de bd. Je fais appel aux éditeurs. Il faut que les éditeurs manifestent leur intérêt et aident ces jeunes parce que l'impression, ça coûte cher et ils n'ont pas les moyens pour éditer leurs oeuvres. Des éditeurs peuvent aider ces jeunes, parce qu'il font vraiment du bon travail. C'est à ce moment-là qu'on pourrait trouver la bande dessinée dans les kiosques, les librairies...
Que devient El Bendir'
Il a arrêté, au 14e numéro, je crois d'après les échos que j'ai eus, par manque de subvention. L'argent était limité, malgré le prix qui n'était pas exorbitant, 200 DA le numéro.
Et là, vous êtes présent au Fibda avec quoi'
Je présente ma biographie avec mes dessins des années 60 jusqu'à nos jours. Des dessins de presse, caricatures politiques etc... c'est rassemblé dans un recueil qui s'appelle La bonne Destinée avec une préface de Omar Zelig. Le second que je propose c'est M'Quidech. On y découvre trois histoires de M'Quidech. Des histoires du terroir, bien de chez nous. De vieilles légendes. Ce 3ème livre enfin c'est Bhar Lemnam. Je l'ai édité à mon compte en 2000. C'est inspiré du projet de Bencherif, le chef du Pnsd de Constantine qui voulait créer une mer dans le Sahara. A l'intérieur, ce sont tous des personnages politiciens connus qui vont conquérir cet endroit. Il y a aussi des sportifs, des artistes etc. Il n'y a pas un personnage anonyme. Mais malheureusement, l'impression laisse à désirer. A l'époque, je l'avais édité à Chéraga. Mais le travail a été bâclé; je ne suis pas satisfait. C'est pourquoi d'ailleurs il n'a pas marché. Je l'ai fait à mon compte. A l'occasion du dixième anniversaire du Fibda ils ont fait des réductions de presque 40%. Il valait avant 600 DA, maintenant 3500 DA. Celui-là, comme je l'ai édité à mon compte je le liquide à 200 DA. De toute façon, on ne vit pas de la bande dessinée. On ne peut pas vivre avec. Tous les dessinateurs sont des fonctionnaires ailleurs. Chacun a un salaire quelque part, ils font ça par amour de la bande dessinée. On ne peut pas vivre avec la bande dessinée ici. On a une concurrence de taille, c'est le Net, la télé...Par contre, il y a 30, 40 ans, les gens ça leur faisaient de la lecture. Sauf peut-être à l'étranger où la bd fait vivre, grâce à des personnages connus sur le plan mondial comme Astérix, Luky Luke, Tintin etc. Ceux-là, ma foi, c'est une exception. Mais pour nous autres, on est là pour faire de l'animation pour l'instant, on est là effectivement et ça nous permet de se rencontrer et se retrouver une fois par an. C'est déjà bien.
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