« Je conseille les responsables de l'ENTV de s'excuser auprès des téléspectateurs algériens pour la médiocrité des programmes »

Dans un entretien fleuve qu'il nous a accordé, profitant de sa présence en Algérie, le commentateur vedette d'Al Jazeera Sport, Hafid Deradji, a évoqué différents sujets liés au secteur de l'information, déclarant qu'il détient des informations graves sur l'ENTV.** Cette année, vous passez le mois de Ramadhan en Algérie, comment vivez-vous ce mois sacré '
J'ai eu la chance de passer le mois de jeûne en Algérie. C'est la première fois depuis mon départ vers Al Jazeera, il y a trois ans.
** Comment avez-vous trouvé l'Algérie après tant d'années d'exil '
Avant de faire mon départ vers le Qatar, je ne pensais pas que notre pays était en état d'arrêt, mais quand j'ai vu avec mes propres yeux le développement du Qatar et ses investissements, un pays de 400 mille habitants et de 1.5 million d'immigrés, je me suis rendu compte que l'Algérie n'avance plus, en dépit des moyens humains et matériels et les richesses dont elle dispose. Je me demande vraiment pourquoi avec 273 millions de dollars, nous n'avons pas pu améliorer la vie des citoyens et le niveau de notre télévision.
** Comment expliquez-vous le recul de l'EN depuis sa qualification au Mondial de 2010 '
Je crois que les médias ont surévalué le niveau des joueurs de l'EN et les ont montré comme des champions. Nous avons donné aux joueurs la valeur qu'ils ne méritaient pas. Nous n'avons pas investi dans notre qualification au Mondial 2010, bien au contraire nous l'avons exploité politiquement et socialement.
** Comment critiquez-vous les médias alors que vous avez fait partie de ceux qui ont qualifié les joueurs de l'EN de champions lors de vos commentaires sur les matches disputés par l'Algérie '
Je n'ai jamais fait partie de ceux qui ont surestimé le niveau de nos joueurs. Je commentais mes matches de l'EN comme tout un algérien. N'importe quel algérien aurait commenté de la même façon que moi.
** Ne vous envisagez pas de revenir en Algérie '
Je pourrais revenir dans un proche avenir, comme je pourrais revenir dans dix ans !
** Est-ce que c'est le flou enveloppant le projet de la création d'une chaîne sportive qui vous empêche de revenir en Algérie '
Le projet d'une chaîne sportive en Algérie aurait pu réussir en 2000, à cette époque, il y avait seulement quelques chaînes sportives. D'ailleurs, Al Jazzera Sport a été créée en 2003, mais maintenant en 2011, ce projet ne pourrait pas réussir. La télévision algérienne n'a plus le choix que la création d'une chaîne destinée au public jeune à caractère sportif et artistique, car le projet d'une chaîne sportive n'est plus à l'ordre du jour.
** Ne croyez- vous pas que votre regard sur l'ENTV a changé '
Je tiens à dire que le niveau de la télévision algérienne est déplorable sur le plan professionnel et moral. Lors du mois de Ramadhan de l'année dernière, le président de la République a ordonné le ministre de la Communication de s'excuser auprès du peuple algérien pour la médiocrité qui caractérise cette institution du service public. De ma part, je conseille les responsables actuels de demander des excuses auprès des téléspectateurs algériens pour la médiocrité des programmes.
** Est-ce que vous pensez qu'on regarde en Algérie les programmes de l'ENTV '
A travers tous les pays de par le monde, les téléspectateurs sont fidèles à leurs chaînes nationales. Mais hélas en Algérie, ce n'est pas le cas. D'aucuns pourrait justifier cette situation par l'ouverture, mais en réalité on fuit la médiocrité.
** Pourquoi vous n'avez pas critiqué l'ENTV quand votre ami Hamraoui Habib Chaouki a été à sa tête '
Je ne critique pas l'ENTV car Hamraoui n'est plus à sa tête. Je ne critique pas les journalistes et le personnel, parce que le niveau a été meilleur avec le même nombre d'employés, mais hélas maintenant c'est plus le cas. En réalité, l'Algérie ne possède pas une chaîne de télévision de haut niveau, d'où la médiocrité qui caractérise les programmes des autres chaînes.
** Vous étiez au courant des lacunes à l'ENTV, mais vous n'avez pas réagi, vous étiez responsable même, vous ne trouvez pas que votre revirement a d'autres significations '
Ce n'est pas un revirement. Je discutais souvent avec Hamraoui Habib Chaouki et d'autres collègues les problèmes. Quand j'étais responsable, nous nous critiquions entre collègues. A l'époque j'étais tenu par le secret, mais maintenant je suis libre de m'exprimer librement.
** Pourquoi vous évitez les téléspectateurs algériens quand ils vous appellent lors de votre émission '
Parce qu'ils me mettent dans l'embarras quand ils confondent mon statut de journaliste à Al Jazeera avec celui de l'ex commentateur de l'NTV.