Algérie

«J'ai toujours eu envie de raconter des histoires»



Metteur en scène, scénariste et réalisateur franco-algérien, cet amateur de comédie, par ailleurs directeur artistique du «Marrakech du rire», a à son actif plusieurs films dont «Né quelque part», «La Vache» qui a effrayé la chronique à sa sortie ou encore «Jusqu'ici tout va bien». Il était il y a quelques jours l'invité de l'Institut français d'Algérie où il est venu présenter son dernier film «Une belle équipe», notamment à Alger et Oran, précédé d'une master class sur la comédie. Il nous parle ici de sa filmographie, de son écriture et nous dévoile ses projets...L'Expression: Dans votre dernier film, «Une belle équipe» on y voit une équipe de foot féminine qui se bat contre une équipe de foot masculine. Quand on regarde l'ensemble de votre filmographie on remarque que vous attachez un malin plaisir à casser les clichés, notamment par rapport aux profils des gens et même au niveau des endroits où vous filmez. Comment ça se passe au niveau de l'écriture'
Mohamed Hamidi:J'essaye de raconter des histoires originales sur des thèmes qui m'intéressent et qui sont souvent récurrents comme le choc des cultures, la rencontre de deux mondes qui ne sont pas prêts à se rencontrer... J'ai fait ça dans «Née quelque part», dans «La vache» etc. Effectivement, j'essaye de trouver des sujets originaux, intéressants et qui me font réfléchir moi-même et me permettent de m'exprimer,on va dire, sur des problématiques, là, en l'occurrence sur le rapport homme/femme, la place des hommes dans la société, la place des femmes et vice versa...Ce qui est le sujet du film. Car là, on parle d'une équipe de femmes qui remplacent les hommes sur le terrain et tout ce que ça peut entraîner dans le couple et dans la petite communauté, c'est-à-dire les femmes sont sur le terrain et les hommes gardent les enfants, les hommes font la cuisine et c'est intéressant à étudier. Surtout quand c'est le cas d'une comédie avec un déclencheur fort.
Là, en l'occurrence c'est une bagarre. Comme je le disais ce matin lors de la master class, pour faire une comédie, il faut un déclencheur puissant et fort, sur une thématique qui doit être intéressante à creuser.
Parlez-nous, justement de cette master class...
C'est une master class qu'on a montée avec Abdenour Houchiche, qui voulait que je puisse échanger avec des jeunes. Il n' y avait pas que des jeunes d'ailleurs, il y avait aussi des réalisateurs, des acteurs etc. Cela portait sur l'écriture d'une comédie. Ça s'appelait pompeusement:«Ecriture d'une comédie: mode d'emploi.». J'ai commencé à leur dire:« Ne croyez pas que vous allez sortir au bout de deux heures, avec un mode d'emploi. Je vais vous expliquer, juste comment moi je travaille.» C'était plutôt un échange qu'un cours magistral. Je suis un ancien prof. J'ai été prof très longtemps et aujourd'hui je suis très heureux de pouvoir transmettre, mais de manière plus bilatérale. C'est-à-dire avec des allers et retours, des questions et des interventions. Aussi, je demande aux gens qui participent de m'apporter eux- mêmes leurs expériences car ce sont des gens qu sont aussi des professionnels.
Vous avez plusieurs cordes à votre arc. Vous étiez prof puis metteur en scène de Jamel Debbouze qui a produit votre dernier film...
Jamel Debbouze a toujours été coproducteur de mes films. Depuis «Né quelque part». On s'est rencontré sur ce film. Il a coproduit mes quatre premiers films. Il s'est beaucoup investi. Quelque part, s'il n'avait pas été au casting, je n'aurais pas monté le film aussi facilement. Il m'a beaucoup aidé pour ça. Il a joué aussi dans « La vache». Apres, il est resté coproducteur de mes films suivants. C'est en fait en lisant mon premier film qu' il m'a demandé de travailler avec lui.
Comment êtes-vous arrivé à vouloir écrire un film'
J'ai juste voulu écrire un film. Un jour j'ai pris mon ordinateur et j'ai commencé à écrire. Je suis autodidacte de formation. J'ai fait plein de choses avant. J'ai fait beaucoup de musique aussi. J'ai enseigné, fait du journalisme aussi. J'ai créé un média en banlieue parisienne. À un moment, j'ai voulu raconter des histoires. J' ai toujours voulu le faire et comme je l'ai expliqué, ce matin, ce n'était pas quelque chose qui était permis quand on vient du milieu d'où je venais, de se dire, je vais faire du cinéma.
Il fallait être un extraterrestre pour pouvoir se dire, je vais faire du cinéma. J'ai mis du coup un peu de temps, toujours avec cette envie de raconter des histoires, de monter des projets. Je me suis dit, je vais raconter une histoire et on verra bien si cela va intéresser les gens. J'ai écrit mon premier film qui est «Né quelque part».
Des histoires qui vous ressemblent et qui ressemblent aux gens que vous côtoyez.
Oui bien sûr. Je suis dans la comédie parce que c'est ce qui me permet d'aborder des sujets sérieux sans se prendre au sérieux et aussi parce que j'aime le ton utilisé. Je trouve qu'il est important aujourdhui d'aborder des sujets sérieux, mais sans être donneur de leçons. Dans la comédie, on n'est pas des donneurs de leçons. Parce qu'il y a une spécificité de personnalités et c'est assez enrichissant de pouvoir.. Ce qui est bien avec une comédie, c'est qu'on peut tordre les principes. Ça nous permet d'être parfois très profonds et d'être plus surprenants.
«Né quelque part» et «La vache», ce sont deux comédies avec un soupçon de drame à la fin, qui nous pousse un peu à pleurer...ce drame-là comment vient-il à l'écriture'
C'est comme dans la vie. Il y a du drame et de la comédie. Dans «né quelque part», il y avait déjà un drame, celui de la maladie du père, le retour au pays... j'ai beaucoup parlé de Chaplin ce matin. parce qu'on parlait de l'universalité de l'humour, des choses qui font rire le monde entier, des codes de l'humour et je disais qu'effectivement ce qui est génial dans le Kid par exemple c'est que à cinq minutes d'écart, vous êtes morts de rire quand il se fait corriger par le père d'un petit , parce que son fils adoptif s'est battu avec un gamin et puis cinq minutes après, on vient lui arracher le petit des mains et ça nous fait pleurer. C'est ça qui est fort dans le cinéma. C'est de pouvoir faire ce grand écart-là. Moi j'essaye de le faire aussi quand je travaille. Ce n'est pas tellement réfléchi, mais c'est juste parce que je raconte la vie des gens et comme dans la vie, il y a des moments de rire, des moments de pleurs, gais, tristes... et ces moments-là cohabitent parfois la même journée, d'une minute à l'autre...
Comment êtes-vous venu à l'écriture'
Je suis un littéraire de formation. Je suis agrégé en économie, j'ai beaucoup écrit. L'économie c'était alimentaire. J'ai toujours aimé écrire et lire. C'est ce qui m'a guidé. Encore aujourdhui, je me considère plus comme un scénariste et un metteur en scène. Le cinéma c'est l'aboutissement du processus, disons. On m'a proposé de réaliser mes propres films et j'adore ça. Je fais ça avec beaucoup de plaisir. De conviction. Mais c'est vrai que je pourrai écrire des films que je ne réalise pas, qui seraient réalisés par d'autres. Mais je ne sais pas si je pourrai réaliser des films écrits par d'autres. Pourtant, je pourrai écrire des films pour les autres, ce n'est pas sûr que je pourrai réaliser un film que je n'ai pas écrit. Il faut vraiment que ça soit dans ma veine, dans mon ton. Mon énergie.
Enfin, peut-on connaître vos projets'
J'ai deux films. Le premier s'appelle «Citoyen d'honneur» qui est déjà tourné avec Kad Merad et Fatsah Bouyahmed et Oulaya Amamra qui a joué dans «Divine», puis dans «Fragile». C'est un film que j'ai tourné au Maroc. Le film se passe en Algérie.
Pourquoi avoir tourné au Maroc alors'
Parce que c'est dur de tourner en Algérie. Comme c'est un film qui se passe en général dans les villages, c'est plus efficace pour moi de travailler au Maroc, la production elle est en partie marocaine avec Jamel Debbouze, par contre, les comédiens sont algériens. Oulaya est maroco-algérienne, Kad Merad est d'origine algérienne. Il y a aussi Zinedine Soualem...J'emmène mes acteurs algériens et je fais mes films là-bas. Ce film sortira en septembre. Sinon j'écris actuellement avec Emma Beniston, un film sur une classe de danse hip-hop dans un lycée parisien. Je suis en train de finir le scénario. On coécrit un scénario ensemble. Le film devra se tourner normalement au mois d'octobre prochain.


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