Algérie - Revue de Presse

Investissements, décentralisation, visas... Ce que pensent les élus français de l?Algérie



«Les élus algériens ont une marge de manoeuvre très mince, ils dépendent du pouvoir central».«Les investisseurs français rencontrent de grands problèmes de bureaucratie en Algérie». «Renault a trouvé un énorme terrain pour construire son usine au Maroc qu?il n?aurait jamais pu avoir en Algérie».Aussi désolant qu?il est, ce constat a été fait, hier, par des élus français à la résidence de l?ambassadeur de France à Alger. Il s?agit de Charles Joslin, le président de «Cités unies France» (CUF), issue de l?organisation mondiale «Cités et gouvernements locaux unis» (CGLU) dont le siège est à Barcelone. L?ex-ministre de la coopération et aussi de la francophonie et actuellement sénateur, élu des Côtes d?Armor dans la Bretagne, était accompagné du directeur général de CUF, Bertrand Gallet et de Georges Morin, président de la section française de CGLU et maire-adjoint à la culture et au patrimoine dans la commune de Gieres, dans l?Isère. Les représentants de CUF sont venus en Algérie pour parler de «coopération décentralisée, un secteur à part entière de la coopération bilatérale», précise un fonctionnaire de l?ambassade de France, à Alger. Une coopération qui a déjà à son actif des projets concrets à l?exemple de la restauration de la basilique «Notre Dame d?Afrique» financée par trois communes de Marseille et une partie par l?Etat français, la réhabilitation du «Jardin d?Essais» que se partagent les communes d?Alger et de Marseille, la rénovation de la Casbah et autre projet relatif à la gestion des déchets soutenu par les Bouches-du-Rhône. CUF comptabilise aussi quelques jumelages entre des villes algériennes et d?autres françaises comme c?est le cas de Skikda-Belfort, Saint Etienne ?" Annaba ou Alger-Marseille mais, dit le fonctionnaire de l?ambassade, «qui sont tombés en désuétude à cause de la détérioration de la situation sécuritaire dans les années 90». «Les élus algériens sont liés au pouvoir par une très forte centralisation»Charles Joslin explique que CUF est une association d?élus de 500 adhérents regroupant toutes les grandes villes françaises et la plupart des régions et départements. «Elle a 30 ans d?âge, et a en charge l?action internationale des collectivités et la coopération décentralisée», dit-il. Il affirme qu?elle parraine «beaucoup d?actions avec la Méditerranée, le Maroc, la Tunisie, la Palestine, le Liban et évidemment l?Algérie». Joslin retrace les relations algéro-françaises qui, selon lui, «ont été consolidées par la visite de Chirac à Alger en 2004, celle de Sarkozy, en juillet dernier, et une autre d?Etat à la fin de l?année». Sans compter, rappelle-t-il «le traité d?amitié qui a capoté pour des raisons que l?on sait et d?autres qu?on ne sait pas». Il touche aussi du doigt, «les allégements introduits par la France dans les procédures d?octroi des visas pour les Algériens». Joslin retiendra, non sans étonnement, que la baisse du nombre de visas français accordés est certainement dû au rejet des demandes mais aussi au non-remboursement (même en cas de refus) du chèque de banque de 6.000 dinars (60 euros) que les services consulaires exigent. «Ils considèrent que ce sont les frais d?examen du dossier», relève le fonctionnaire de l?ambassade. Il estime, cependant, que «la relation France-Algérie est en voie d?amélioration, la coopération de ville à ville oblige à apurer le contexte politique en général». Il pense qu?il est possible d?organiser «probablement en 2009, une rencontre entre les élus des deux pays». Mais en attendant, il interroge: «les élus algériens ont-ils une marge de manoeuvre importante, qu?est-ce que la décentralisation?» C?est Georges Morin, ce natif de Constantine qui lui répond: «la véritable coopération avec les élus algériens a démarré en 2002 mais nous avons des fenêtres de tirs assez étroites en raison d?une fin ou d?un début de mandat qui ne coïncide pas avec les nôtres». Comme «deuxième difficulté, un certain déséquilibre, la France a un siècle de démocratie locale alors qu?en Algérie, les élus sont liés au pouvoir par une très forte centralisation, notamment, avec les walis, c?est un peu étouffant». Il semble que cette appréciation des choses, il l?a déduite de ses discussions avec des élus algériens qu?il avait rencontrés tout autant que ses collègues, à son arrivée. Il affirme, en outre, que «les élus algériens n?ont pas de formation». Que l?avantage de la France «est d?avoir une administration au service des élus mais en Algérie, le vrai problème, c?est l?administration locale». Ceci étant dit, les Français estiment que «c?est une coopération qui marche malgré tous les obstacles parce qu?il y a une volonté politique». A l?ambassade de France, on tient à noter que les flux d?investissements français en Algérie ont atteint 300 millions de dollars en 2006, «c?est peu mais c?est en progression de 113%». Des flux qui se traduisent par des actions dans l?agro-alimentaire, la pharmacie et autres pièces détachées. C?est-à-dire en vente mais jamais en construction ou en production, avions-nous relevé. «Tous les obstacles qui bloquent l?investissement en Algérie découragent les Français», dit le représentant de l?ambassade. Il lance en vrac «les grandes difficultés d?accès au foncier industriel -Renault a trouvé un énorme terrain pour construire son usine au Maroc qu?il n?aurait jamais pu avoir en Algérie-, les difficultés bancaires, la grande bureaucratie...» Aux yeux des Français, comme le soutient Joslin, «le Maroc apparaît comme un pays libéral -même si ce n?est pas le cas en matière de droits de l?Homme et de démocratie- au lieu d?un Etat qui reste marqué par ses origines».  Bertrand Gallet tient à préciser que «le déficit en investissements français n?est pas à mettre sur le compte de l?Etat français mais sur celui d?un état d?esprit en Algérie». Pour lui, «quand on parle planification on imagine déjà les lourdeurs bureaucratiques même si la planification n?existe pas officiellement mais la pratique reste encore celle-là». La demande «spécifique» des élus françaisJoslin revient sur l?élection de Sarkozy qui s?est faite «par siphonnage du FN, ce qui voudrait dire que la maîtrise des flux migratoires pourra se traduire par une fermeture accrue de nos frontières parce que ça répond à une partie de la population française». Un enfermement qui, dit-il, «ne manquera pas de porter atteinte à la relation franco-algérienne». Et l?Union méditerranéenne? «Plutôt du bien du point de vue de l?intention mais en pratique, c?est compliqué», dit-il. Il estime cependant que l?idée de Sarkozy répond à des démarches d?adhésion à l?Europe comme celle du Maroc». Joslin reconnaît, quand même, qu?ajoutée aux accords d?association, au processus de Barcelone, au 5 5, à la politique de voisinage... «ça fait un peu trop quand chacun veut sa solution». Pour Gallet «Barcelone, plus personne ne le porte politiquement». Il affirme que le retour au bilatéral est nécessaire parce que dans le multilatéral «on ne parlait que d?émigration et de terrorisme». Et dit-il «c?est l?approche la plus réductible qu?on peut se faire de la Méditerranée». Les élus français ont exprimé «une demande spécifique aux autorités algériennes, que les élus algériens rejoignent les élus du monde en s?intégrant dans CGLU».L?on note que l?Algérie y siégeait jusqu?en 1984 «lorsque ses élus ont quitté la salle après un différend avec les Marocains sur le Sahara Occidental». Ils ont aussi demandé au ministre délégué aux Collectivités locales, Dahou Ould-Kablia, de permettre aux élus d?assister au colloque que compte organiser CGLU en Corée du Sud, à la fin du mois d?octobre. Ils sont persuadés qu?ainsi, «l?Algérie pourra bénéficier d?actions concrètes de coopération dans des domaines comme l?habitat, le développement durable, l?eau, la gestion des déchets, les transports urbains...» Un protocole d?accord de coopération sera signé aujourd?hui entre Boumerdès et Belfort. Il sera aussi procédé à l?évaluation des projets en cours de réalisation dans le cadre de la coopération décentralisée.


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