Interroger et changer le monde

Parcours ? Face aux bouleversements sociopolitiques et aux exigences du 3e millénaire, qu'en est-il du cinéma engagé ' Est-il le même que celui des années 1960 et 1970 par exemple 'Le cinéma engagé reste invariable dans son objectif, celui de défendre les causes justes et de dévoiler les vérités. Mais son contenu change, puisque, ancré dans une époque bien déterminée, il s'adapte à tous les changements et bouleversements. C'est ainsi que Liazid Khodja, réalisateur algérien, qui a coréalisé avec Rachid Benallal ?Si Mohand U M'Hand, l'Insoumis', déclare : «Le cinéma engagé tel que perçu dans les années 1970 est un genre aujourd'hui révolu, au vu de la diversité des thèmes et de la plura-lité des points de vue sur les sujets traités.» Mais en dépit de ces changements et de ces ruptures, «le cinéma engagé a encore toute sa place dans un contexte de plus en plus marqué par la guerre des images pour imposer sa vision du monde», estime-t-il. Puisque «le cinéma engagé est seul capable d'attirer l'attention de l'opinion publique sur les causes oubliées ou méconnues».Avis partagé par Abdelkrim Tazarout, journaliste et critique de cinéma.«Nous avons l'impression, de loin, que le cinéma engagé s'est estompé, que nous ne sommes plus dans les années 1960 ou 1970... où l'engagement était largement répandu. Il se trouve cependant que l'engagement existe toujours et par conséquent, le cinéma dédié à cet engagement existe. Il y a des cinéastes qui en font leur raison de vivre. Par le cinéma, ils militent pour un monde meilleur, afin de donner une autre vision du monde, contraire à celle véhiculée par les médias officiels.»Pour sa part, Tariq Teguia, un jeune réalisateur algérien, ayant signé ?Zendj Revolution', un film deux fois primé et salué par la critique internationale, affirme que «le cinéma engagé dans son acception moderne se doit d'être un cinéma contemporain».«La fonction assignée au film engagé est d'interroger le monde ici et maintenant, sinon de le changer», souligne-t-il, et de renchérir : «Le mot engagé appliqué au cinéma peut poser problème s'il se réduit au discours véhiculé et si celui-ci n'est pas livré dans les formes et techniques cinématographiques adéquates, c'est-à-dire professionnelles.»Mais tous s'accordent à dire que devant l'«impératif de coller à l'actualité, le cinéma engagé contemporain a investi le genre documentaire, parfois amateur, délaissant la fiction qui a fait les beaux jours de ce genre cinématographique dans les années 1970.»«Cette tendance, expliquent-ils, a tout de même permis la production en quantité plus importante de films traitant de causes individuelles, collectives, partisanes, économiques, politiques ou sociales. Il reste que quel que soit sa forme ou son message, le cinéma engagé reste nécessaire, pour changer le monde, servir une cause sociale, humanitaire, voire politique.» Ainsi, quel que soit le contexte dans lequel il se trouve, le cinéma engagé ? il est pourfendeur des injustices, témoins de l'histoire ? trouve toute sa raison d'exister.