Algérie - Diverses relations internationales

Intégration maghrébine et espace euro-méditerranéen : «Une seule main ne saurait applaudir»



La symbiose des apports de l’Orient et de l’Occident, le dialogue fécond des cultures et la tolérance sont sources d’enrichissement mutuel. Car autant l’Islam, le Christianisme ou le Judaïsme ont contribué fortement à l’épanouissement des civilisations et à la tolérance en condamnant toute forme d’extrémisme.

De ce fait, il faut dépassionner les relations au sein des pays du Maghreb et entre l’Europe et le Maghreb. Aux tensions doivent se substituer une coopération et un dialogue soutenu pour éviter des factures douloureuses. L’intégration euro-maghrébine au sein de l’espace euro-méditerranéen, tout en n’oubliant pas les relations géostratégiques des USA et de la Chine pour le Maghreb et l’Afrique, est une nécessité politique et économique pour enclencher un véritable développement de notre région en s’adaptant aux enjeux de la mondialisation. C’est l’objet de cette modeste contribution.

La remarque fondamentale est que le commerce intra-UMA ne représente que 2% des échanges extérieurs des pays de la région, selon le dernier rapport du FMI (2006), pour un marché d’environ 80 millions d’habitants. Les institutions internationales, les USA comme la CEE recommandent aux dirigeants du Maghreb de dépasser leurs visions étroites et d’accélérer l’intégration qui est une condition stratégique pour attirer l’investissement au moment de la consolidation des grands ensembles.

Les statistiques officielles montrent les caractéristiques suivantes: la proportion importante des produits manufacturés dans les échanges intra-régionaux, le fait du Maroc et de la Tunisie et la situation de mono-exportateurs de l’Algérie, de la Libye et de la Mauritanie qui ne livrent respectivement à leurs voisins maghrébins que des hydrocarbures pour les deux premiers pays et des produits de la pêche pour le troisième. Il convient toutefois de souligner que ces données expriment le mouvement des flux officiellement recensés, qui ne saurait occulter une dynamique du commerce impulsée par les échanges informels. Du point de vue des relations maghrébines, cela explique qu’au lieu que l’intégration soit dominée par des économies contractuelles ou organisées, nous assistons à une dynamique informelle caractérisée par une identité culturelle qui permet à des milliers de Maghrébins, surtout aux frontières, de contourner la myopie des bureaucraties nationales. La raison essentielle trouve un fondement socio-historique qui rend d’actualité les analyses ibn-khaldouniennes avec le poids du politique dans les sociétés maghrébines, accentué par des structures familiales et tribales qui se consolident en période de récession économique. Il s’agira impérativement d’intégrer cette sphère dominante au niveau du Maghreb par la délivrance des titres de propriété devenant citoyenne, car acquise aux réformes pouvant constituer une force sociale dynamisante.

La faiblesse des échanges intermaghrébins est due fondamentalement tant à un manque de concertation commerciale qu’à des raisons structurelles. Parmi lesquelles on peut citer cinq raisons essentielles: 1- les législations en vigueur qui ne favorisent pas encore les échanges, qu’il s’agisse de la réglementation générale, de l’import-export ou de barrières douanières; 2- les moyens de financement des exportations sont rares afin que des Maghrébins financent des exportations vers ses voisins. Etant donné la non-convertibilité de leurs monnaies respectives, ils continuent encore à s’approvisionner auprès de leurs fournisseurs traditionnels hors Maghreb; 3- les normes de production et de conditionnement changent sensiblement d’un pays à un autre de la région et le consommateur, ne retrouvant pas les repères sécurisants habituels, boude très souvent les produits des pays voisins. A cette réaction de marché, s’ajoute une réaction psychologique, notamment au sein des entreprises au niveau de leurs consommations intermédiaires et de leur équipement en moyens de production; 4- la méconnaissance réciproque des opérateurs économiques n’incite pas non plus à des relations confiantes, d’autant plus que les assurances de garantie à l’exportation, même si elles ont été maintes fois confirmées, sont encore au stade d’ébauches; 5- enfin, l’insuffisance du maillage (organisation, disposition), la faiblesse des infrastructures de transport et de communication constituent une barrière de taille. Quel est le cheminement de l’édification de L’UMA ?

 

L’intégration euro-maghrébine, une vocation historique

Le sommet maghrébin tenu à Zéralda (Algérie) en 1988 a vu la concrétisation du premier jalon de l’édification de l’Union du Maghreb Arabe (UMA). Malgré les implications tendant à remettre en cause des pans de souverainetés nationales aux décideurs politiques qui prenaient auparavant les décisions qu’ils jugeaient les meilleures pour le développement économique et social individuel de leur « Etat-Nation », le deuxième sommet maghrébin, tenu le 19 février 1989 à Marrakech, voit l’adoption du traité de l’UMA qui définit les modalités d’une construction maghrébine. Cette communauté complémentaire (UMA) représente, aux termes du Traité de Marrakech, «une étape essentielle dans la voie de l’unité arabe» et doit constituer «une véritable plate-forme pour la réalisation d’une union plus vaste groupant d’autres pays arabes et africains». C’est ainsi que les institutions prévues par le Traité ont été mises en place: Conseil des ministres des Affaires étrangères, Comité de suivi, Secrétariat général, Conseil consultatif et Commissions ministérielles spécialisées, véritables chevilles ouvrières de l’action maghrébine commune. Plusieurs conventions et des accords maghrébins ont été conclus qui portent sur quatre préoccupations: 1- en matière économique, l’adoption d’une «stratégie maghrébine commune de développement», définissant les bases de la solidarité économique entre les pays maghrébins et invitant à l’élaboration de politiques communes dans le but de l’instauration d’une zone de libre-échange, une union douanière et, dans un deuxième temps, un marché commun; 2- sur le plan institutionnel, une convention a été adoptée en vue de mettre sur pied une «banque maghrébine d’investissement et de commerce extérieur», chargée de mobiliser les fonds nécessaires au développement économique au niveau régional et de financer ou participer au financement de projets d’investissements maghrébins et d’opérations de commerce extérieur; 3- sur le plan commercial, l’UMA a adopté les règles du démantèlement des droits de douane et des taxes d’effets équivalents, de l’abaissement graduel des barrières non tarifaires, de la condamnation du dumping et des subventions à l’exportation, de l’adoption du principe de la concurrence loyale entre les producteurs; 4- sur le plan de la réglementation des investissements, il a été adopté des règles communes relatives à la garantie des investissements allant dans le sens de la non-discrimination, de l’égalité de traitement et de libéralisation des exportations.

 

Les objectifs stratégiques de l’intégration maghrébine 

D’une manière générale, les objectifs stratégiques assignés sont que l’intégration économique doit être conçue et mise en oeuvre pour trois raisons essentielles: 1- tirer un meilleur parti des ressources complémentaires des différents pays; 2- créer un marché de taille plus vaste susceptible d’entraîner de significatives économies d’échelle, indispensable dans un univers de compétitivité économique ouverte, 3- et créer un climat économique plus favorable au Maghreb dans les échanges économiques internationaux.

Cependant, la mise en oeuvre de l’intégration renforcée passe par, d’une part, la reconquête des marchés intérieurs sur les produits intermédiaires où le Maghreb dispose simultanément des ressources naturelles, des ressources énergétiques, des ressources humaines et des compétences technologiques et des capacités de financement; d’autre part, la spécialisation des pays dans les secteurs d’activités où ils disposent d’un avantage «naturel» du fait de leurs ressources, de leur situation géographique ou de leur capacité de financement, et enfin une harmonisation progressive des modes de vie et des spécifications techniques des équipements et des produits.

Car les pays du Maghreb disposent de sérieux atouts susceptibles de leur permettre d’enclencher, assez rapidement, de fortes croissances de leurs économies analogues à celles observées dans d’autres régions du monde. Parmi ces avantages, on peut citer: une population jeune, éduquée et en pleine expansion, sur un vaste territoire; une homogénéité culturelle que renforce l’unité linguistique; l’existence d’une élite importante et de qualité; des moyens financiers appréciables; un potentiel énergétique, industriel et agricole prometteur, même s’il est inégalement réparti, et enfin la proximité de l’énorme marché européen.

Car une nouvelle ère dans les relations euro-méditerranéennes s’ouvre du fait que l’Europe redécouvre sa véritable dimension historique et géographique. Trois pays de l’UMA, le Maroc, la Tunisie et l’Algérie, ont signé des accords «euro-méditerranéens d’association» constitués de trois principaux piliers: le respect des droits de l’homme, des libertés et de la démocratie; la création d’une zone de libre-échange entre l’UE et chacun des pays méditerranéens à l’horizon 2010 et l’élargissement graduel de cette zone grâce à la libéralisation des échanges, tout en précisant que cet espace ne saurait être isolé de l’Afrique, du fait de la construction du NEPAD, création récente mais dont l’action concrète constitue une chance pour ce continent (1).

 

Intégration maghrébine et espace euro-méditerranéen 

C’est dans ce cadre que je juge utile de rappeler les dernières recommandations du Forum européen international (2) tenu pour la première fois dans un pays du Tiers-Monde, à Alger, en février 2006, sous la haut patronage du Président de la République, sur le thème dialogue Nord-Sud sur la Méditerranée, qui a mis en relief cinq facteurs qui conditionnent une vision commune du futur: 1- la considération du savoir et de l’élite sans lesquels il ne peut y avoir de développement durable pour une lutte efficace contre le chômage et la pauvreté, et donc atténuer l’exode des cerveaux par leur revalorisation (la ressource humaine étant un facteur clef) préconisant l’urgence de la création d’une université euro-méditerranéenne; 2- une bonne gouvernance et une société fondée sur un Etat de droit par la lutte contre la corruption et les entraves bureaucratiques qui limitent fortement la mise en oeuvre d’affaires communes; 3- liée à la construction d’un Etat de Droit, l’intégration loin des mesures autoritaires, de la sphère informelle par la délivrance des titres de propriété, dans la mesure où la citoyenneté se mesure par la progressivité du paiement des impôts directs; 4- la mise en oeuvre par les deux parties du partenariat euro-méditerranéen, de la libre circulation effective des personnes, des biens, des services et des capitaux; 5- enfin, le renforcement du secteur financier, dont celui des banques, pour une contribution efficace au financement de l’économie et notamment la création d’un environnement juridique favorable au micro-crédit avec la professionnalisation de la micro-finance.

L’objectif retenu est de dynamiser l’investissement pour une richesse partagée, axé sur huit (08) axes fondamentaux: 1- que les institutions internationales ciblent leurs décisions de financement sur les investissements ayant des externalités loin d’une vision purement commerciale; 2- une harmonisation des législations, notamment au sein de la zone Sud surtout, avec la création d’une zone de libre-échange avec l’Europe et l’adhésion de ces pays à l’Organisation mondiale du commerce, lorsqu’on sait que les deux derniers pays ayant accédé à l’OMC sont l’Arabie Saoudite (2005) et le Vietnam du Nord (2006), restant pour des pays potentiels du Sud, la Libye, la Corée du Nord, l’Irak et l’Algérie; 3- l’institutionnalisation d’une banque dédiée au développement des économies des pays du sud de la Méditerranée et la création d’une agence euro-méditerranéenne des investissements étrangers; 4- la promotion d’un groupe de travail sur la promotion de l’image des pays du Sud (notamment du risque qui est surévalué); 5- la création d’une bourse et d’une banque centrale euro-méditerranéenne; 6-la dynamisation de la PME avec la mise en place d’un système de garantie couvrant les risques politiques, juridiques et commerciaux; 7- renforcer l’implication de la société civile, signe de la vitalité de toute société, dans les programmes de développement à travers des programmes décentralisés; 8- impliquer l’émigration, facteur d’inter- culturalité et de consolidation de la coopération entre les deux rives de la Méditerranée, recelant d’importantes potentialités économiques (savoir-faire technologique et organisationnel) et financières. Car, selon un rapport récent de la Banque européenne d’Investissement (BEI, mars 2006), les migrants dans le monde se chiffrent à environ 200 millions (les femmes représentant la moitié des migrants dans le monde, un migrant sur trois vivant en Europe et un sur quatre en Amérique du Nord) et les fonds transférés dans le pays d’origine avoisinent 232 milliards de dollars US en 2005, dont 167 concernent les pays en voie de développement,la plus grande fraction provenant des Indiens, Chinois et Mexicains.

En conclusion, d’une part, il est suicidaire pour chaque pays du Maghreb de faire cavalier seul, d’autre part, le Maghreb et l’Europe sont deux régions présentant une expérience millénaire d’ouverture sur la latinité et le monde arabe avec des liens naturels et dans son ensemble porte de culture et d’influences anglo-saxonnes. L’accélération des réformes économiques, sociales, culturelles (le droit à la différence), de la démocratie, de la promotion de la condition féminine conditionnent largement la réussite de cette grande entreprise qui interpelle notre conscience maghrébine et plus globalement méditerranéenne, l’histoire commune nous imposant d’entreprendre ensemble.

 

1) Voir « L’intégration maghrébine au sein de l’espace euro-méditerranéen et urgence d’un partenariat renforcé entre l’Europe et l’Afrique » : A. Mebtoul, intervention au siège de l’Unesco, Paris, France (1995), lors de la fondation de l’Association Europe-Afrique, rencontre présidée par l’actuel Président de l’Afrique du Sud. Même conférence au siège du Ministère des Affaires Etrangères (Alger) devant le corps diplomatique accrédité à Alger (reproduite dans le recueil du MAE 1996).

2) Abderrahmane Mebtoul a présidé pour l’Algérie l’atelier investissement de ce forum international, assisté du Professeur Mustapha Mansouri, de la Faculté des Sciences politiques de Tunis, et de M. Henry Marty-Qauquié, Directeur à la Banque européenne d’Investissement.




de quel espace euro-méd.s'agit-il?avec la venue du verrouilleur sarkozy,a la lim.du nettoy.ethn.!,avecle voisinage...acide sur les 2bords,peut-on sincerement réver d'1 unionE-M du salut p.notre affligé peuple (harragas) et puis assez d'utopie face a1nord avare!et puis stop aux usurpateurs en tout genre(d'avis av.louisa h.)je ne suis pas du PT.dommage,j'aurai pu etre député!-(médiocrité obkige!)
Dr Benammar morsli - med.spé.réed.fct.
21/05/2007 - 95

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