Algérie

Intégration des infrastructures vertes pour la sécurité hydrique et la résilience climatique



Par Nadjib Drouiche(*)
Une nouvelle génération de projets d'infrastructure est nécessaire pour atteindre les objectifs de développement durable, notamment la sécurité hydrique et la résilience au changement climatique. Protéger les populations contre ces menaces qui se multiplient avec des infrastructures classiques telles que les barrages et les digues sera insuffisant. Ainsi, des solutions rentables, qui permettent d'améliorer la fourniture des services des infrastructures, résilientes au changement climatique, et qui contribuent aux objectifs sociaux et environnementaux, doivent être développées et déployées particulièrement dans les zones urbaines.
Reconnaissant que l'infrastructure de la prochaine génération a un rôle essentiel à jouer pour relever le défi de l'adaptation au climat, un mouvement croissant promeut des solutions basées sur la nature et l'élargissement de l'utilisation des infrastructures vertes.
Par ailleurs, le rapport des nations unies sur le développement des ressources en eau de 2018 a souligné la contribution des solutions basées sur la nature (notamment les infrastructures vertes) pour la réalisation des ODD 2030 (WWAP 2018).
De même, le Groupe d'experts sur l'eau, consulté par les Nations unies et la Banque mondiale, a conclu que l'infrastructure verte peut «contribuer à relever certains des défis les plus pressants en matière d'eau, en particulier si elle est planifiée en harmonie avec les infrastructures grises» (HLP 2018).
Les systèmes d'infrastructures classiques dites grises reposent sur des solutions construites pour assurer le bon fonctionnement des sociétés.
Face à la multiplication des menaces environnementales, cette approche seule ne peut plus assurer la résilience climatique et les niveaux de services requis de nos jours.
L'infrastructure verte peut prendre de nombreuses formes et fait appel à la nature pour fournir des avantages naturels ? les systèmes naturels tels que les écosystèmes forestiers, les zones humides, les plaines inondables et les sols peuvent contribuer à un approvisionnement en eau propre et fiable et protéger contre les inondations et la sécheresse. Dans de nombreuses circonstances, la combinaison de cette «infrastructure verte» avec les «infrastructures grises» classiques, telles que les barrages, les réservoirs, les systèmes de traitement et les canalisations offre le potentiel d'aider à fournir de l'eau, de la nourriture et de l'énergie à une population croissante, et à atténuer les effets du changement climatique. Elle contribue par ailleurs à offrir un triple avantage pour l'économie, les communautés et l'environnement.
Les approches d'ingénierie conventionnelles présentent des avantages immédiats ? les brise-lames en béton réduisent l'énergie des vagues, par exemple ?, mais peuvent être coûteux à mettre en place et à entretenir.
En outre, elles peuvent nuire à l'environnement ? par exemple, les barrages peuvent perturber la migration des poissons vivant dans les canaux en aval.
D'autre part, les fournisseurs de services tels que les services d'eau, les agences de gestion des crues et les agences d'irrigation peuvent fournir des services plus rentables et plus résilients en intégrant des infrastructures vertes dans leurs plans.
Bien que les infrastructures vertes ne conviennent pas à tous les projets ou emplacements, les possibilités d'utiliser les systèmes naturels dans des projets sont souvent négligées et ne sont pas encore intégrées dans les études et conceptions courant dominant.
Cependant, des exemples d'intégration et de réussite en matière d'infrastructure verte ont maintenant atteint une masse critique, se basant sur un processus de conception robuste qui permet aux fournisseurs de services et aux partenaires du développement d'envisager avec confiance les approches d'infrastructures vertes et grises, et mettent les opportunités d'investissement sur un pied d'égalité.
des connaissances scientifiques et des idées provenant d'un nombre croissant de projets démontrent que l'infrastructure verte peut être conçue en fonction des circonstances locales pour compléter, remplacer ou protéger les infrastructures grises.
En s'appuyant sur les plantes, le sol et les systèmes naturels pour gérer le ruissellement des eaux de pluie, reconnu comme source de pollution des ressources hydriques, l'infrastructure verte permet de résoudre les problèmes d'eau dans les villes et de renforcer la résilience climatique. Ce faisant, elle contribue à réduire le nombre d'inondations et les eaux de ruissellement polluées qui atteignent les égouts, les ruisseaux, les oueds et la mer. L'infrastructure verte capte la pluie là où elle tombe. Elle imite les processus hydrologiques naturels et utilise des éléments naturels pour transformer les précipitations en une ressource plutôt qu'un déchet. Elle améliore également la qualité et la quantité des réserves d'eau locales et offre une multitude d'autres avantages environnementaux, économiques et sanitaires, souvent dans des zones urbaines privées de nature comme c'est souvent le cas dans notre pays.
Les inondations urbaines constituent un autre problème croissant et peuvent laisser derrière elles des problèmes de santé comme les maladies respiratoires et celles causées par les moisissures.
L'infrastructure verte réduit les risques d'inondation et renforce la résilience climatique des communautés en empêchant la pluie d'atteindre les égouts et les cours d'eau et en la captant là où elle tombe.
Par ailleurs, plus de la moitié de la pluie qui tombe dans les zones urbaines couvertes principalement par des surfaces imperméables finit par ruisseler. Les pratiques d'infrastructure verte peuvent efficacement réduire le ruissellement en captant les eaux pluviales et en leur permettant de recharger les nappes phréatiques ou d'être récupérées à des fins telles que l'aménagement paysager. Cela permet de réduire la demande en eau des municipalités (ce qui est encore plus important en raison de la diminution des précipitations, de la sécheresse et des températures plus élevées qui peuvent accompagner le changement climatique. A titre d'exemple, jusqu'à 75% de l'eau de pluie qui tombe sur un toit peut être captée et utilisée à d'autres fins.
Chaque projet d'infrastructure est l'occasion de donner une priorité égale à la conservation de la nature et à la fourniture de services naturels essentiels aux communautés. Une approche combinée vert-gris peut être plus efficace que l'une ou l'autre stratégie appliquée individuellement.
Combiner stratégiquement les infrastructures vertes et grises peuvent en outre réduire les coûts et améliorer la résilience face à la crise financière et environnementale imminente à laquelle des systèmes d'infrastructure mondiaux font face.
Dans le secteur de la protection et la gestion des bassins versants, la combinaison gris-vert peut contribuer à améliorer la qualité de l'eau ainsi que le contrôle des sédiments.
En effet, la conservation ou la restauration de la couverture végétale comme les forêts à travers des conditions saines par le biais d'une gestion active, telle que l'éclaircissement mécanique, l'enlèvement des petits arbres et des broussailles et le brûlage dirigé, peut aider à réduire la surpopulation et le risque d'incendie de forêt et de surcroît réduire le risque d'inondation et d'érosion et préserver leur capacité à stocker l'eau et d'augmenter les débits, et de filtrer les polluants, empêchant de ce fait leur entrée dans le système l'approvisionnement en eau.
Les exemples susmentionnés font ressortir que les services écosystémiques sont un concept, ce qui montre la capacité de ces infrastructures à faciliter la fourniture de multiples biens et services liés au cycle de l'eau.
De nouvelles lignes de recherche sont ouvertes, basées sur l'analyse d'autres éléments des infrastructures vertes liés à l'eau, comme les eaux souterraines. La capacité de l'infrastructure verte à fournir de multiples avantages publics et privés peut unir les intérêts de divers investisseurs et décideurs pour ouvrir des voies de financement, d'utilisation et de promotion à grande échelle.
Les politiques de soutien peuvent grandement favoriser l'adoption de l'infrastructure verte. Comprendre les conditions politiques et financières est une étape clé du processus de développement d'un projet.
Les politiques qui soutiennent les approches mixtes vert-gris offrent une voie vers la sécurité hydrique du futur, mais elles nécessiteront un engagement stratégique pour préserver le capital naturel.
En l'absence d'une telle gestion, les coûts des infrastructures et des services liés aux ressources en eau risquent d'augmenter considérablement en recourant de plus en plus aux ressources hydriques non conventionnelles comme le dessalement et de contrarier les efforts déployés pour parvenir à une sécurité hydrique durable inconditionnée des aléas du changement climatique.
En adoptant une combinaison vert-gris, la société bénéficiera également de la valeur non économique du capital naturel géré de manière durable, notamment sa biodiversité. L'ingénierie traditionnelle est une partie nécessaire de la solution, mais elle n'est ni économiquement ni écologiquement réalisable en tant qu'unique approche de développement et de mobilisation durable des ressources en eau.
N. D.
(*) CRTSE-Division CCPM- N°2, Bd Dr. Frantz-Fanon, P.O.Box 140, 16038 Alger Sept Merveilles, Algeria.


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