Instantané

Les pouvoirs publics prennent parfois des initiatives qui laissent les citoyens perplexes. C'est le cas des travaux de réalisation d'un muret sur les principales autoroutes que compte la capitale. On ne disconvient pas que d'un point de vue purement esthétique, le muret apporte une touche de beauté incontestable à l'autoroute. Cependant, sur le plan de l'utilité, les automobilistes ne lui trouvent aucune fonction. L'autoroute a depuis toujours été dépourvue de ce muret, les autorités viennent de découvrir subitement qu'il est indispensable.L'erreur, ce n'est pas de l'avoir construit, mais de l'avoir imposé en tant que priorité. Or, de l'avis de beaucoup de citoyens, la priorité se trouve ailleurs. Messieurs les responsables, faites un tour du côté des Palmiers, un quartier de Oued Ouchayeh où la misère est le lot quotidien des habitants. Serez-vous aussi enthousiastes à la construction de ce fameux muret lorsque vous verrez la misère se lire sur les visages des enfants en bas âge, pataugeant dans la boue et la saleté ' Serez-vous enclins à la décoration de l'autoroute lorsqu'on vous relatera les cas de jeunes gens qui, minés par le désespoir, se sont donné la mort par pendaison dans un bois mitoyen avec les immeubles du quartier 'Serez-vous aussi transportés par la fougue et l'ardeur qu'entraîne ce projet d'embellissement lorsque vous entendrez les gémissements des parents qui retentissent dans les entrailles de la cité pour avoir perdu leurs enfants en mer, candidats à la harga ' Lorsqu'on ne partage pas la misère des autres, on ne peut prétendre à une quelconque compassion. Il est vrai que le développement et le progrès sont un ensemble homogène, où il est question de toucher plusieurs volets, y compris celui ayant trait au muret de l'autoroute. Néanmoins, dans notre situation actuelle, il serait judicieux et équitable de privilégier ces quartiers et leurs habitants qui ne voient aucune amélioration de leur cadre de vie.