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Indépendance économique et mondialisation



Indépendance économique et mondialisation
Depuis les années soixante, les économistes de tout bord examinent avec attention le concept d'indépendance économique. C'était l'ère de la guerre froide, de la confrontation Est-ouest et de l'essai des pays sous-développés de se constituer en pays non-alignés afin d'asseoir un minimum d'indépendance politique vis-à-vis des deux blocs antagonistes.Nous avons été le chef de file de ce mouvement durant les années soixante-dix. Le prolongement de ces choix politiques était forcément la recherche d'un modèle économique qui consacrerait un minimum d'indépendance économique. Pour l'Algérie, c'était la fameuse option de l'industrie industrialisante. Il fallait intégrer l'économie nationale (noircir la matrice interindustrielle) de sorte à aboutir à une économie autocentrée. Les «chaînes de valeur» devraient donc être internalisées au maximum. De nombreux autres pays avaient contemplé une voie similaire à l'époque : Inde, Egypte, Irak, etc.De nos jours, aucun pays ne contemple une variante aussi extrême. Il n'est simplement pas permis dans un contexte d'intégration mondiale aussi poussé que l'ordre économique présent. Cependant, beaucoup de nos décideurs continuent de penser avec le prisme des années soixante-dix. Et les preuves abondent. Nous sommes l'un des rares pays de la planète où nos spécialistes décideurs pensent que le modèle hyper centralisé et hyper bureaucratisé des années soixante-dix était en train de réussir et qu'il aurait pu faire de l'Algérie un pays émergent si on ne l'avait pas abandonné. Il faut donc s'en inspirer maintenant pour un redressement salutaire.L'actuelle «réindustrialisation» qui privilégie le secteur public est une idée rémanente de cette ligne de pensée. Précisément parce que cela aboutirait à une plus grande «indépendance économique». Mais qu'en est-il de cette idée d'indépendance économique ' Comment est-elle traitée par les décideurs internationaux ' Quelles sont les implications pour notre pays 'Indépendance économique dans le contexte actuelAujourd'hui, les Think Tanks spécialisés en géostratégie ne cautionneraient guère l'idée d'une indépendance économique basée sur l'intégration économique nationale. Les chaînes de valeur se sont éclatées et éparpillées à travers toute la planète ; et un pays doit en récupérer le maximum là où il peut exceller. Ce qui implique de développer des avantages comparatifs, soit créés (développement humains, recherches et développement etc.), soit acquis (matières premières, main d'?uvre, etc.).Aujourd'hui, se refermer sur soi, intégrer trop fortement son économie en faisant fi de l'efficacité internationale reviendrait sur le long terme à mettre en danger sa propre compétitivité. Supposons qu'on produise notre acier trois plus cher que le reste du monde et qu'on l'utilise pour produire des véhicules et des biens électroménagers. Toute une chaîne d'industries et de services seraient non compétitifs, à savoir : le transport, les produits touristiques, la restauration, notre agriculture, nos produits agroalimentaires, etc. L'effet de chaîne serait dévastateur pour nos produits et services. Alors, comment consacrer une indépendance économique en processus de mondialisation 'Les pays développés et émergents jouent sur une panoplie d'instruments pour asseoir leur indépendance. La meilleure manière pour eux d'être indépendants serait d'opter pour des politiques qui assurent leur output. Les politiques extérieures et technologiques sont interpellées pour garantir cette logique. Nous n'allons pas faire des incursions en matière de stratégie de politiques extérieures des pays pour garantir leurs inputs et également ouvrir des marchés à leur production nationale.Des experts en politique peuvent mieux nous éclairer. Mais en matière de stratégie économique, beaucoup de réalités sont mal analysées. Par exemple, la meilleure manière d'acquérir une indépendance économique serait de devenir un acteur technologique majeur avec une visée mondiale. La France n'extrait pas un litre de pétrole de son sous-sol. Mais c'est un acteur énergétique mondial grâce à ses entreprises high tech Elf, Total et Suez. C'est le savoir-faire technologique internationalisé qui constitue l'essence de l'indépendance économique. Bientôt la Corée du Sud sera acteur énergétique mondial sans matières premières internes.Et ce qu'il convient de faireNous avons les germes des stratégies «d'indépendance économique». Ce sont les capacités technologiques et la productivité d'un pays qui lui confèrent son «indépendance économique». Une internationalisation croissante suivie d'une meilleure intégration à des économies permet de mieux asseoir son indépendance. C'est ce qu'essaye de faire la Chine avec l'Afrique et même le reste du monde.En s'intégrant par des programmes de coopération avec les pays africains et les joint-ventures qu'elle constitue, elle devient incontournable et par là garantit ses matières premières et les marchés pour ses produits. D'ailleurs, de nos jours, on parle surtout du concept de «capacité d'indépendance et non d'indépendance réelle». Par exemple, l'Allemagne et la France ne produisent pas les microprocesseurs pour les ordinateurs qu'elles utilisent. Elles acceptent d'être dépendantes. Mais en cas de problème, leurs usines et leurs centres de recherche sont capables de produire ces microprocesseurs. Elles ont une capacité d'indépendance. Elles ne réfléchissent pas en termes de dépendance, mais en termes de capacités d'indépendance.Par exemple, notre pays a intérêt à internationaliser Sonatrach beaucoup plus profondément que le peu d'investissements qu'elle a réalisés par le passé. Bien sûr que le mode managérial et les systèmes de rémunération doivent changer radicalement. Tout en exploitant nos ressources énergétiques et en diversifiant notre bouquet énergétique (comme prévu par le plan du gouvernement), il faut investir intensément pour reconstituer, puis développer le savoir-faire technologique de Sonatrach pour la propulser à être un acteur international majeur.Mais, économiquement, il y a des domaines qui relèvent de la sécurité nationale, comme la production de blé, de lait et de médicaments. Il faut les obtenir au début par des politiques de subvention de l'offre, puis pas de meilleures politiques sectorielles. Dans la configuration de l'économie mondiale actuelle, le meilleur gage d'indépendance serait un secteur éducatif (y compris enseignement supérieur) de standard mondial et des ressources humaines de niveau international, bien rémunérées, motivées, valorisées et qui libèrent leur génie créatif pour propulser nos industries, agriculture et services au tout premier rang mondial. Tout le reste n'est que conjectures subjectives sans réelle valeur.




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