Algérie

Indépendance du Kosovo : les Européens divisés



Les Européens étaient divisés hier, sur l'attitude à adopter vis-à-vis de la proclamation dimanche de l'indépendance du Kosovo. Si à Washington le président américain a vite reconnu ce mini nouvel Etat composé essentiellement d'Albanais, les Européens étaient partagés sur un geste qui a énervé les Serbes. La France, l'Italie, la Pologne ou l'Allemagne ont annoncé qu'elles reconnaîtraient bientôt le Kosovo, alors que l'Espagne, la Grèce, la Slovaquie, la Roumanie ou Chypre s'y sont opposés. Malgré ces divergences de fond entre pays membres de l'UE, le chef de la diplomatie européenne, l'Espagnol Javier Solana a estimé que «l'Union européenne a déjà décidé d'envoyer une mission de stabilisation, une mission de droit et de justice, qui devrait contribuer à plus de stabilité dans le pays». Cette mission composée de près de 2.000 hommes a été approuvée à l'unanimité samedi dernier par les membres de l'UE, et sa mise en place doit prendre quatre mois. Mais, face aux divergences profondes sur la reconnaissance de l'Etat du Kosovo, maintes fois reportée, et farouchement combattue par la Russie, allié stratégique des Serbes de Belgrade, l'Union européenne a entrepris de définir une position «aussi unifiée que possible», appelant au calme dans la province où des incidents sont susceptibles d'être organisés par la minorité serbe. Ainsi, les chefs de la diplomatie des pays de l'UE se sont retrouvés à Bruxelles pour se mettre d'accord sur un dossier qui les divise, même s'il est exclu de revivre les déchirements qui ont accompagné il y a 15 ans l'éclatement de la Yougoslavie. Le Premier ministre slovène Janez Jansa, dont le pays préside pour l'instant l'Union européenne, n'a pas caché que tous n'étaient pas sur la même longueur d'ondes. «L'objectif de la présidence continue d'être des arrangements qui assureront la stabilité de la région et qui représentent une position européenne aussi unifiée que possible», a-t-il déclaré dans un communiqué à Ljubliana. En fait, des observateurs européens avancent qu'une vingtaine de pays de l'Union reconnaîtront rapidement l'indépendance du nouveau pays malgré l'opposition de la Serbie et de la Russie, suivant en cela l'exemple des Etats-Unis, et cela dès lundi pour certains d'entre eux. Cependant, la proclamation d'indépendance de cet Etat, à dominante musulmane, ne sera pas reconnue dans l'immédiat par six Etats membres de l'UE : Bulgarie, Chypre, Espagne, Grèce, Roumanie, Slovaquie. Le plus concerné de ces Etats est l'Espagne où des élections législatives auront lieu le 9 mars. Madrid, en butte aux revendications d'indépendance des Basques, et après avoir éliminé de la course le parti pro-ETA, Batasuna, ne veut pas surtout encourager les revendications indépendantistes de ses minorités ethniques. «Le gouvernement espagnol ne reconnaîtra pas l'acte unilatéral proclamé hier, par le Parlement du Kosovo», a déclaré le chef de la diplomatie espagnole, le ministre Miguel Angel Moratinos, selon lequel, en droit international, un tel acte dépend soit de l'accord des deux parties, soit du vote d'une résolution de l'Onu. La France, par contre et pour des intérêts évidents, a pris la tête du peloton des pays favorables à l'indépendance du Kosovo. «Nous savions qu'il y aurait des positions différentes, mais ce n'est pas parce qu'il y a des positions différentes, parce que des pays affrontent des difficultés bien réelles dans leur territoire qu'il n'y a pas d'unité. Tout le monde est libre de faire le choix qu'il souhaite», a estimé Bernard Kouchner. Pour autant, les chefs de la diplomatie européenne, en adoptant une position «conciliante» sur ce dossier chaud, se sont efforcés de calmer le jeu pour éviter des affrontements dans la province peuplée à 90 % d'Albanophones décidés à être indépendants neuf ans après l'intervention de l'Otan, qui a mis fin en 1999 à une campagne d'épuration ethnique menée par l'armée serbe. Du «tact» qu'emploieront les pays de l'UE à gérer cette indépendance du Kosovo, malgré la forte opposition de Belgrade et Moscou, dépend l'avenir de ce bout de territoire, enclavé dans la poudrière des Balkans. Les Etats-Unis, en reconnaissant de fait l'indépendance des Kosovars, ont mis un terme au blocage russe, mais ont surtout montré qu'ils restent très intéressés par tout ce qui a un rapport avec la paix et la sécurité dans cette région.


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