Algérie

Incendies de forêt Dr Messaoudene Mahand nous écrit



Suite à l'article publié par F. H. dans votre journal InfoSoir du 28/09/2012 intitulé «Il y a une destruction préméditée», je vous prie de bien vouloir insérer dans vos colonnes cette présente mise au point. Votre jeune journaliste m'a attribué à tort certains propos.
Tout d'abord, il ne s'agit pas d'une conférence de presse comme l'atteste l'auteur de l'article. Le village de Mezguène (Moula Oumalou) m'a invité pour animer une conférence sur l'environnement portant sur le sujet intitulé «Les fonctions de l'arbre et de la forêt», puis j'ai abordé un autre aspect lié à l'environnement : la pollution. Il s'agit d'une communication scientifique et de vulgarisation suivie d'un débat. Je l'ai faite devant les habitants (es) de ce village, pas devant les journalistes.
Par rapport aux propos suivants : «Une moyenne de 32 000 ha de forêt part annuellement en fumée. En 150 ans, l'Algérie a perdu 37 % de sa superficie.» Pas possible, avec cette moyenne et cette durée, l'Algérie aurait perdu toute sa couverture forestière, pas uniquement 37 %. Sur le plan historique, les données sur les incendies de forêts remontent uniquement à 1961. J'ai bien cité ce chiffre, mais pas en tant que superficie forestière incendiée. Il intègre tous les espaces touchés par les feux. Effectivement, j'ai parlé de la dynamique régressive de la forêt algérienne et j'ai donné l'exemple de la suberaie «les formations à chêne liège» que je considère comme formation forestière économiquement plus rentable en Algérie. C'est vrai, par rapport aux données de la littérature ancienne de 1950, la suberaie productive algérienne a perdu 50 %; jadis, elle occupait 480 000 ha et actuellement 230 000ha.
«Au moment où l'Etat est quasiment absent». J'ai parlé de l'absence de l'autorité de l'Etat (pas absence de l'Etat), et ce, par rapport à l'application des lois régissant la protection de l'environnement et des divers écosystèmes (forestiers, des eaux stagnantes et courantes). Sinon, comment expliquer toutes ces montagnes de déchets dans tous nos espaces urbains, cours d'eau et cette dynamique régressive continuelle de nos forêts '
L'Etat est bien présent et représenté par les services de l'administration forestière et de la Protection civile. Les forestiers et les pompiers, à mon avis, sont deux corps d'Etat qui combattent le feu jour et nuit. Ils mettent en péril leurs vies (cas des deux pompiers et forestier de Souk-Ahras). Aujourd'hui, je ne peux pas désavouer la bravoure et le courage de ces Hommes. J'ai également dénoncé l'absence d'une véritable politique forestière en Algérie. En effet, l'absence de projets d'aménagement et de gestion forestière durable de nos massifs ne peut être que négative à l'encontre de notre patrimoine forestier. L'Algérie a beaucoup investi dans les programmes de reboisement. Le mal profond est de voir ces plantations partir en fumée au bout d'une ou deux années après. L'absence de traditions ou de politique sylviculturale dans nos forêts en est la cause majeure. A mon avis, cette principale science de la foresterie (aussi art) est préalable et indispensable pour éduquer et protéger nos forêts de ce fléau infernal, améliorer la production et régénérer cycliquement les espaces. Par rapport aux reboisements, j'ai bien donné des chiffres (prix de revient par hectares et les volumes réalisés) et leurs situations actuelles. Par ailleurs, j'ai cité nos réseaux de parcelles expérimentales ou de démonstration touchés par ces incendies. Pourquoi ces informations sont occultées '
«Pour lui, autre grave affirmation, ces feux sont d'origine criminelle.» Pourquoi grave affirmation ' Dans le lexique de l'écologie et de la foresterie, la destruction d'êtres vivants (espèces animales et végétales confondues) par l'homme est considérée comme acte criminel. Dans ce cas, pour moi, le fait de porter atteinte à la vie de plusieurs milliers d'êtres vivants est considéré comme crime contre la nature et le pyromane comme criminel. D'après mes propres observations sur terrain, le nombre important de foyers d'incendie répétitifs dans une même forêt et leurs distributions spatiales régulières interprète bien une action préméditée et volontaire. La cause est l'Homme, pas un autre facteur (ni météorites, ni foudre et ni mégots de cigarettes).
Effectivement je désapprouve et conteste scientifiquement les chiffres avancés sur les surfaces parcourues par le feu. La méthode planimétrique utilisée pour l'estimation de ces surfaces sous-estime les dégâts et fausse les statistiques. Le recours aux techniques de traitement d'images satellitaires pourrait fournir des données plus proches de la réalité. A défaut, il fallait corriger la surface planimétrique par un coefficient de pente. J'ai rattaché ce problème à l'absence de moyen matériel performant pour procéder à des évaluations probantes.
«Le scientifique et le chercheur se voient en dehors de tout centre de décision.» Quel centre de décision ' C'est vrai, certaines compétences sont marginalisées au sein des Institutions. Mais, à mon sens, le rôle du chercheur est de publier, vulgariser et proposer ses résultats de recherche aux divers secteurs économiques pour l'application de sa recherche. Au jour d'aujourd'hui, je suis pour l'invitation des chercheurs et des compétences nationales aux débats sur les stratégies à adopter dans le contexte du développement durable. Bien évidemment, il ne suffit pas de regrouper les universitaires, chercheurs et autres compétences nationales pour les regrouper, cas de nombreux séminaires, colloques, symposiums et journées d'études. L'idéal est de passer à l'acte : appliquer les recommandations de ces rencontres, pas les laisser moisir dans des armoires hermétiquement fermées. Egalement, faire confiance à nos chercheurs pour la concrétisation de nombreux projets nationaux ne peut que renforcer leurs volontés à aller de l'avant. C'est vrai, nous sommes dépourvus de laboratoires dotés de moyens scientifiques performants permettant d'être compétitif à l'échelle internationale.


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