Algérie

Ils préfèrent la charité citoyenne à l'aide de l'état Actualité : les autres articles


Hier, quatre familles occupaient le centre d'accueil des réfugiés syriens ouvert il y a trois jours à Sidi Fredj : une famille syrienne et trois algériennes. Au square Port-Saïd, des dizaines de familles continuent de profiter de la charité citoyenne.
Les alaouites de Damas s'acharnaient sur nous. Ils posaient la photo de Bachar Al Assad par terre et nous obligeaient à nous prosterner dessus en criant qu'il était le dieu des Syriens.» Le centre de vacances de l'entreprise NetCom à Sidi Fredj est l'espace réquisitionné par l'Etat pour prendre en charge les 3700 réfugiés syriens recensés à Alger. Seul chalet occupé, le dortoir n°7 où un couple et deux enfants assis sur leurs lits attendent sans savoir quoi. Fehd, le chef de famille, agite les mains et se lève pour poursuivre son récit : «C'est les alaouites qui tuent les gens ! La maison de mon voisin s'est effondrée lors d'un bombardement. Je ne pouvais plus me permettre d'attendre que la situation s'améliore !» Fehd, 45 ans, constructeur de paraboles vendues en Algérie depuis 2006, a tout laissé derrière lui, son usine, sa maison, ses biens, mais aussi sa mère et une de ses filles.
Chaleur de plomb et vent sec, ses gestes sont lents et sa voix presque éteinte, mais il en a trop sur le c'ur : «Je n'ai pu ramener en Algérie que trois de mes enfants et ma femme. J'ai passé quatre jours au square Port-Saïd à dormir à la belle étoile. Je suis content à présent d'être à l'abri, ici à Sidi Fredj.»
Autour, une vingtaine de personnes, membres du personnel de NetCom et bénévoles des Scouts musulmans algériens, vont et viennent avec des casiers de nourriture. Les cuisiniers sont déjà en poste en ce début d'après-midi, mais les 14 chalets du centre sont pratiquement tous fermés et la grande cour est déserte. Une vingtaine de familles syriennes avaient été acheminées vers ce centre lundi soir, il n'en reste qu'une sur place, celle de Fehd. Sa femme Lamia et ses trois enfants semblent les seuls Syriens à se réjouir de l'ouverture de ce centre d'accueil. Les autres familles ont du mal à se défaire de ce qui est devenu, depuis quelques semaines déjà, leur coin attitré : le square Port-Saïd.
«Nous ne voulons pas être isolés»
Grand malaise dans le centre d'accueil de Sidi Fredj, boudé par les centaines de réfugiés syriens débarqués dans la capitale depuis des semaines. Ils étaient 30 Syriens à accepter de venir au centre lundi dernier, à la première journée d'ouverture. Ils n'étaient plus que 20 au second jour et 17 avant-hier soir. Il ne reste à présent que 4 personnes sur place : Fehd et sa petite famille. Trois familles de démunis algériens ont par contre profité de l'occasion pour se frayer un chemin parmi ses réfugiés et se mettre à l'abri.
L'incompréhension est totale. «Nous avons mis à leur disposition toutes les commodités, nous ne comprenons pas pourquoi ils refusent de rester ici. Ils viennent très tard dans la nuit dormir puis quittent le centre le matin très tôt pour rejoindre le square», a affirmé le directeur du centre, M. Ghouli. Les Syriens seraient plus de 12 000 dans tout le pays, livrés à la solidarité populaire pendant des semaines. Les autorités algériennes, qui viennent à peine de sortir d'une torpeur qui aura duré plus d'un mois, semblent être arrivés trop tard.
«L'Etat aurait dû les prendre en charge plus tôt. Maintenant, c'est trop tard. Ils ont trouvé du réconfort auprès des citoyens, ils ne veulent pas y renoncer !» C'est ce que pense Ali, un jeune Algérois, habitué du square Port-Saïd. Près de lui, Hassan, teint basané et cheveux noir corbeau, pose sa main sur sa poitrine en signe de reconnaissance et confirme : «Le peuple algérien est merveilleux. Il nous témoigne une solidarité sans faille, chaque soir, des familles viennent nous voir, ici au square, pour nous aider, ça nous réconforte tellement», explique ce jeune Syrien. Hassan a fui Adlib avec sa femme, son frère et ses cousins, il y a deux semaines. «Ma mère et ma s'ur sont au Liban, dans une situation déplorable, j'aimerais bien qu'elles nous rejoignent ici en Algérie».
Le square Port-Saïd, ultime refuge
Le cercle s'élargit, des passants curieux se joignent à la conversation. Chacun y va de son commentaire. «C'est la moindre des choses qu'on puisse faire pour eux, ce sont nos frères», lance une vieille dame compatissante. «On leur offre un toit et à manger, pourquoi continuent-ils de tendre la main '», se demande un jeune dubitatif avant de se dérober. «C'est normal, ils ont besoin d'argent pour payer les billets du reste de leurs familles», explique l'un. «C'est trop facile de les juger, qu'aurait-on fait à leur place '», s'interroge un autre. Deux gendarmes viennent d'entrer dans la place, attirant tous les regards. Ils font le tour du jardin en silence.
Ici, l'insalubrité continue de régner. Les SDF algériens se mêlent aux familles syriennes, les enfants jouent et les passants continuent de s'arrêter pour assouvir leur curiosité ou leur élan de générosité, c'est selon. «Comment vont-ils régler ce problème ' Ils ne peuvent quand même pas les laisser comme ça», se demande encore un Algérois de passage. Grande question qui tarabuste tous les esprits, y compris ceux qui sont obligés d'y trouver une réponse et à qui la situation semble avoir assurément échappé.
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