Une bonne partie des Algériens a le regard rivé sur la présidentielle française. Ils étaient nombreux à suivre in live dimanche l'affront subi par le président français, candidat à sa succession. Nicolas Sarkozy a trébuché, il reste dans la course contre son rival socialiste, mais son classement de second a réduit considérablement la probabilité de le voir reconduit à la tête de la France. Dans les rues d'Alger, ce lundi, il y avait comme un air de satisfaction. Pour beaucoup, Nicolas Sarkozy aura eu ce qu'il mérite après avoir fait preuve de mépris à l'égard de l'Algérie. L'histoire de l'Algérie avec la France est longue, tumultueuse et semée d'embûches, mais pas au point où elle est arrivée durant le quinquennat de Sarkozy. Les produits français inondent le marché algérien et le classement de la langue de Molière dans le monde doit beaucoup aux Algériens pour lesquels c'est un butin de guerre, pour reprendre la célèbre phrase de Kateb Yacine. Les relations des deux pays, au lieu d'être fortes et normales, comme l'a raconté Sarkozy lorsqu'il s'était installé à l'élysée, ont évolué sous son règne en dents de scie jusqu'à devenir aphones ces dernières années. Dire que sa défaite le 6 mai influera le devenir du cours entre les deux riverains de la Méditerranée, n'est pas peu dire. Beaucoup d'Algériens vivent en France et chérissent leur terre d'origine, même si la plupart d'entre eux ont la nationalité du pays d'accueil. Les Algériens d'ici savent à quelle sauce Sarkozy a mangé leurs frères de là-bas, dès lors qu'il s'était résolu à faire sien le programme raciste, xénophobe et islamophobe du lepénisme, dont le fondateur, Jean-Marie Le Pen, a officié durant la guerre pour l'indépendance en Algérie en qualité de tortionnaire avant de rassembler chez lui, en France, tous les nostalgiques de l'Algérie française, à commencer par les membres et partisans de l'OAS. Son virage vers la droite extrême, Sarkozy l'a pleinement assumé avec sa compilation de lois liberticides contre l'immigration et sa détermination assumée officiellement d'en chasser une bonne partie au motif lepéniste que ces têtes brunes de la rive sud de la Méditerranée mangent le pain des Français de souche, des blancs judéo-chrétiens. Peut-être n'est-il pas lui-même tout à fait français pour comprendre le brassage culturel en action dans tout le bassin méditerranéen ' Ce sont des Français qui l'ont dit lorsque Nicolas Sarkozy avait pris le relais de la bataille de la viande halal livrée par Marine Le Pen. Pour beaucoup, la France est actuellement vue comme une terre hostile, islamophobe. Que la France ne puisse pas accueillir la misère du monde, on comprend, disent les Algérois, mais c'est la politique de l'exclusion mise en 'uvre par Sarkozy qui les a dérangés, c'est sa stigmatisation qui les a blessés. Si l'élection présidentielle française intéresse les Algériens, il est à se demander si également elle va influer dans les rapports franco-algériens. Pour beaucoup, la réponse est oui. Les relations 'historiques' entre les deux pays seront plus ou moins apaisées avec le président socialiste. Même si les Algériens, qui ne sont plus dupes, restent convaincus que les autorités de leur pays ont leur part dans l'arrogance et le mépris affichés à l'endroit de l'Algérie par leurs homologues étrangers. Le respect et la crédibilité, contrairement à ce qu'on a pensé auparavant à Alger, se gagnent d'abord dans le pays. Les Algériens souhaitent des relations franches, normales et mutuellement avantageuses, hors de la démagogie qui les a entourées avec Sarkozy. L'image que véhicule François Hollande à Alger est celle d'un homme de gauche qui adoucira les lois anti-immigrés de son prédécesseur, permettra un épanouissement légitime de la diversité cultuelle qui a fait la richesse de la France, qu'il saura replacer dans son milieu naturel que constitue la rive sud de la Méditerranée orientale où l'Algérie occupe une place centrale. Les Algériens ont gardé au frais le souvenir d'un candidat socialiste présent à des commémorations, à Paris, sur les affres subis par les Algériens durant la guerre d'Algérie. C'est important. Il reste qu'à leurs yeux, la nouvelle France socialiste doit s'imprégner du fait qu'elle n'a aucun rôle à jouer dans les prochaines batailles que l'Algérie affronte pour régler ses propres problèmes. Le cynisme mitterrandiste a été mis à nu en son temps.
D. B
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Posté Le : 24/04/2012
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Djamel Bouatta
Source : www.liberte-algerie.com