Ils estiment tout savoir'

Le choléra était de retour sur leur territoire «immaculé» ! Certaines chaînes d'infos françaises en ont glosé, sans discontinuer, toute la journée de mercredi dernier. Et qui en était la cause ' Un avion d'ASL Airlines avait décollé le matin même, d'Oran, et se dirigeait vers Perpignan. A bord, un enfant algérien, âgé de huit ans. Il avait visité plusieurs fois dans les toilettes et s'était mis à vomir. L'équipage, pris de panique, décide alors d'en informer la tour de contrôle, et c'est la «suspicion de choléra à bord». Dès l'atterrissage, une brigade de pompiers et de médecins étaient sur le tarmac de Perpignan, avec tout l'attirail médical qui s'impose lors d'une catastrophe humanitaire. Les 136 passagers n'ont été autorisés à descendre qu'après avoir été dûment désinfectés, et avoir subi une vérification pour s'assurer qu'ils ne présentaient aucun symptôme. L'enfant et sa mère, ainsi que les passagers mitoyens, ont été transportés d'urgence à l'hôpital, pour y subir une batterie d'examens. Le garçonnet a ainsi subi une prise de sang, un prélèvement de selles, d'urine, de salive, et tout le tintouin de tests ont été envoyés en urgence à l'Institut Pasteur. Bien que disproportionné, ce déploiement de moyens vertigineux peut être compréhensible, au nom du principe de précaution, au vu des quelques cas de choléra survenus chez nous. Notons, aussi, qu'aucun cas ne s'était déclaré en dehors du territoire algérien. Bref, pas de quoi fouetter un chat. En fait, loin de l'épidémie de peste noire qui a endeuillé l'Europe au XIVe siècle?Tel ne fut pourtant pas l'avis et l'attitude de ces chaînes d'infos «au rendez-vous» pour alerter de ce «danger cholérique» qui guettait la France. Médecins, diplomates, managers et même islamologues (?) étaient au rendez-vous sur les plateaux, pour y distiller leur «savoir». Ainsi, on aura eu droit à des remarques bien chauvines sur «le manque d'hygiène dans ces pays là», ou sur «l'importation» de cette maladie qui, «Dieu merci, a été éradiquée en France dès le XVe siècle», dixit un «expert» aussi pédant qu'ignorant, puisque la dernière épidémie de choléra à avoir frappé la France remonte à 1991, et d'après les historiens de la médecine, il y en a eu sept en tout, entre 1817 et 1991. A ces déclarations, un poil racistes, ajoutons la blague déplacée de ce médecin-journaliste, qui a déclaré sur BFM, pour ne pas la citer (?): «Le choléra c'est quoi ' Eh bien, c'est une maladie transmise par un bacille formidable, qui vous donne une diarrhée d'enfer, et des vomissements?». A l'heure du repas, bonjour les bons appétits. Et ce médecin, savait-il que le choléra provoque effectivement des diarrhées et des vomissements en série, en déshydratant le corps humain, jusqu'à ce que mort s'ensuive ' Il croyait savoir? Aussi, pas de quoi se poiler?Mais au fait, qu'en est-il dudit enfant ' «Au vu des analyses effectuées sur les prélèvements biologiques, il apparaît que l'enfant ne présente aucune des caractéristiques du choléra. Ses vomissements semblent plutôt indiquer une intoxication alimentaire passagère, ou un simple mal de l'air. Lui et sa mère ont été autorisés à quitter l'hôpital dès ce soir.»? C'est avec une mine déconfite qu'un journaliste, dépêché en urgence à Perpignan, a annoncé l'épilogue concret de cette affaire, bien éloigné du scénario catastrophe. En somme, beaucoup de bruit pour rien, et inutile de s'étonner qu'après ce genre d'infos, tirées par les cheveux, des franchouillards «Bac, moins six» rejoignent la vague des extrémistes en Europe. Sous couvert de disposition sanitaire ou autre, y'a pourtant tout un monde entre le savoir et la croyance.Ce monde-là essaie de faire croire, sans savoir vraiment. Les chocottes devant des «migrants» d'une autre culture, d'une autre religion, l'abrutisse ce monde-là. Et ça, on l'appelle de la xénophobie, de façon décontractée?